En 1982, Monsieur et Madame se sont mariés.

Artiste amateur, Monsieur a décoré leur maison d’une fresque murale.

En 2014, Monsieur et Madame ont entamé une procédure de divorce.

L’ordonnance de non-conciliation a attribué à Madame la jouissance du domicile conjugal.

Dans le cadre de la vente de la maison, l’agent immobilier a conseillé à Madame de faire disparaître la fresque.

Madame a donc recouvert la fresque de couches de peinture.

Problème : Madame n’a pas demandé l’autorisation de Monsieur.

Monsieur a alors poursuivi Madame pour violation de ses droits patrimoniaux et moraux.

Le 7 novembre 2022, la CA Bordeaux a jugé que la fresque était protégée par le droit d’auteur, et condamné Madame à des dommages-intérêts.

1/ Sur la protection de la fresque par le droit d’auteur

La Cour rappelle qu’est éligible au droit d’auteur une œuvre originale, c’est-à-dire reflétant la personnalité de son créateur.

A quoi ressemble donc cette fresque ?

La fresque est divisée en 3 tableaux, qui sont des reproductions de 2 affiches publicitaires d’Alfons Mucha et d’une peinture de Jan Preisler, où les visages des mannequins et personnages sont remplacés par ceux de Monsieur et Madame ou de leurs filles.

Pour la Cour, certes la fresque s’inspire d’œuvres connues.

Mais elle présente des caractéristiques propres :

  • la fresque fusionne 3 œuvres connues (les 2 affiches + la peinture)
  • Monsieur a modifié des éléments de décors et l'orientation du tableau de Jan Preisler afin d'obtenir un ensemble cohérent
  • la famille est représentée selon le point de vue de Monsieur

Dès lors que la fresque traduit la vision de Monsieur de sa propre famille, elle est originale.

2/ Sur l’indemnisation de Monsieur

Certes, Madame a commis une faute en recouvrant la fresque sans recueillir l’accord de Monsieur.

Mais cette faute n’est à l’origine d’aucune préjudice patrimonial pour Monsieur qui, en cédant sa maison, savait qu’il perdait son droit de représentation (eh oui, les acquéreurs n’ont aucune obligation de permettre à Monsieur d’accéder à la fresque !).

Quant au droit de reproduction, il appartenait à Monsieur de réaliser une copie ou une photo de la fresque avant son départ de la maison.

En revanche, Monsieur subit un préjudice moral puisqu’il n’a jamais acquiescé à la destruction de son œuvre.

Montant des dommages-intérêts : 500 €

J’ignore à quoi ressemblait cette fresque, dont il n’existe aucune reproduction, mais le simple fait que la Cour ait rappelé qu’il ne lui appartenait pas de se prononcer sur sa qualité artistique ni sur le talent de Monsieur nous laisse imaginer le pire !