En 1981, X, collectionneur et amateur d'art, a confié une gouache de Picasso, Portrait de Jacqueline, à une galerie chargée de la déposer dans un coffre-fort.
 
Après le décès de X et la découverte du reçu de la galerie, les héritiers ont appris l’existence du tableau.
 
La fille de Jacqueline Picasso, dernière épouse du peintre, a alors agi en revendication de l’œuvre, estimant que cette dernière se trouvait dans le patrimoine de sa mère en 1980 lors de l’inventaire de la succession de Picasso.
 
Le 6 avril 2021, la CA Paris a débouté la fille de Jacqueline, retenant la prescription acquisitive (= usucapion) des ayants droit de Y sur l’œuvre, au motif que :
 

  1. la mauvaise foi de X n’est pas démontrée
  2. les 4 conditions de la possession sont réunies (art. 2261 du Code civil) : 
  • possession continue : l’œuvre est restée 35 ans dans le coffre-fort
  • possession paisible : la galerie a restitué l’œuvre aux héritiers de X sans opposition
  • possession publique : le reçu de la galerie mentionne l’identité de X et le lieu de stockage de l’œuvre, excluant toute volonté de dissimulation
  • possession non équivoque : il n’y a aucun doute quant à l’intention de X de se comporter en véritable propriétaire

Estimant au contraire que la possession n’était pas publique mais clandestine, la fille de Jacqueline Picasso a formé un pourvoi contre cet arrêt.
 
Le 26 octobre 2022, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a rejeté son pourvoi.
 
La Cour de cassation approuve la Cour d’appel qui, pour juger que la possession n’était pas clandestine, a retenu que :
 
CERTES, le tableau a été déposé en 1981 dans un coffre, endroit en principe secret.
 
MAIS :

  • le tableau avait été confié à la galerie en même temps que d'autres œuvres
  • le reçu remis par la galerie mentionne l'identité du dépositaire ainsi que le lieu de dépôt des œuvres

Il n’y avait donc aucune volonté de dissimulation à l'égard des tiers, donc pas de clandestinité de la possession.