LA CONTRIBUTION AUX CHARGES DU MARIAGE 

 

La contribution aux charges du mariage fait partie des devoirs des époux.

En effet, l’article 212 du Code civil dispose notamment que les époux se doivent mutuellement secours et assistance et l’article 213 du même code qu’ils assurent ensemble la direction matérielle de la famille.

Il s’agit donc pour les époux de contribuer aux charges usuelles du ménage : loyer ou emprunt, alimentation, entretien des enfants, charges locatives ou de copropriété, taxes d’habitation et foncière, assurances, mutuelles, ….

Il sera toutefois souligné que, d’un point de vue civil les charges relatives à l’impôt sur le revenu ne sont pas incluses dans les charges usuelles du ménage, alors que d’un point de vue fiscal les époux, quel que soit le régime matrimonial choisi, doivent faire une déclaration commune de leurs revenus et sont solidaires envers l’Administration fiscale du règlement des impôts correspondants.

L’article 214 du Code précité prévoit que si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives.

Dans l’éventualité où l’un des époux ne contribuerait pas spontanément aux charges du mariage, qu’il soit ou non parti du domicile conjugal, son conjoint peut saisir le Juge aux affaires familiales afin qu’il fixe une contribution aux charges du mariage.

La contribution ainsi fixée par le Juge s’appliquera :

- dans le cadre d’un divorce contentieux : jusqu’à l’obtention d’une ordonnance de non-conciliation : elle sera alors éventuellement remplacée par une pension alimentaire au titre du devoir de secours qui n’est pas toutefois de même nature puisqu'elle suppose la démonstration de la situation de besoin de celui qui la sollicite, ce qui n'est pas le cas en matière de contribution aux charges du mariage.

- dans le cadre d’un divorce amiable : jusqu’à la signature d’une convention de divorce.

Il doit être signalé qu’avec la future réforme du divorce issue de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 qui entrera en application à compter du 1er janvier 2021, l’audience de conciliation sera supprimée et donc également l’ordonnance de non-conciliation qui en résulte.

Toutefois, comme il sera possible de solliciter des mesures provisoires lors d’une audience dite d’orientation et sur mesures provisoires, la contribution aux charges du mariage devrait cesser de la même façon à compter de la décision qui sera prononcée suite à cette audience.

 

Deux actualités doivent être signalées :

 

1°) FISCALITE :

Jusqu’à présent, il était considéré d’un point de vue fiscal, que lorsque les époux déclaraient séparément leurs revenus ( trois cas sont prévus par l'article 6 du CGI: si séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit; si abandon du domicile conjugal par l'un mais chacun disposant de revenus distincts; si en instance de divorce ils ont des résidences séparées), seul le débiteur d’une contribution aux charges du mariage fixée judiciairement pouvait la déduire de ses revenus et corrélativement le créancier devait la déclarer comme un revenu au titre des pensions alimentaires.

Or, le Conseil Constitutionnel, saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité, a considéré dans sa décision du 28 mai 2020 (n°2020-842 QPC) que l’existence d’une décision de justice exigée par l’article 156 II 2° du Code général des impôts dans sa rédaction résultant des décrets du 3 juin 2015 et 10 juin 2016, était inconstitutionnelle car méconnaissant le principe d’égalité devant la Loi, dès lors que la différence de traitement entre les contribuables n’était justifiée par aucun motif.

En conséquence, il a décidé que ces dispositions ne sont plus en vigueur et que la déclaration d’inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de publication de la décision.

Pour autant, un débiteur d’une contribution aux charges du mariage s’exécutant spontanément peut-il aujourd’hui déduire de ses revenus le montant réglé à ce titre ?

Ce n’est pas encore le cas, même si à terme la solution devrait s’imposer.

En effet, ce sont les seules dispositions dans leur rédaction de 2016 qui ont été annulées et si la Loi fiscale critiquée avait été ultérieurement modifiée afin d’intégrer les pensions allouées dans le cadre du divorce par consentement mutuel contresigné par acte d’avocat (divorce sans juge), les dispositions actuellement en vigueur prévoient toujours la nécessité d’une décision de Justice.

Certes, ces dispositions encourent les mêmes griefs que ceux reprochés au texte invalidé mais encore faut-il qu’elles soient elles aussi soumises à la censure du Conseil constitutionnel, lequel devrait statuer dans le même sens, pour que demain une telle déduction soit réellement possible sans encourir de critiques de la part de l’Administration fiscale.

Il conviendra donc de suivre l’évolution de cette problématique.

 

 2°) SEPARATION DE BIENS ET AMENAGEMENT CONTRACTUEL DE LA CONTRIBUTION AUX CHARGES DU MARIAGE? :

Il est usuel dans les contrats de mariage adoptant le régime de la séparation de biens qu’une clause soit insérée précisant que chacun des époux sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive aux charges du mariage, de sorte qu’aucun compte entre eux ne sera fait à ce sujet.

A la lecture d’une telle clause, certains époux pourraient être tentés de s’exonérer d’une contribution, considérant que cet aménagement contractuel les y autorise.

Pour autant, ce genre de clause ne peut dispenser un époux de respecter l’obligation de contribuer aux charges du mariage qui est d’ordre public.

C’est ce qu’a jugé la Cour de cassation (1ère civ 13 mai 2020 n°19-11444) dans une affaire où le contrat de mariage contenait une telle clause complétée par la mention « qu’ils n’auront pas de recours l’un contre l’autre pour les dépenses de cette nature ».

La Haute Cour a considéré que cette clause :

 « ne fait pas obstacle, pendant la durée du mariage, au droit de l’un d’eux d’agir en justice pour contraindre l’autre à remplir, pour l’avenir, son obligation de contribuer aux charges du mariage ».

En conclusion, si marié sous le régime de la séparation de biens, vous êtes confronté à un conjoint qui ne contribue pas aux charges du mariage, vous avez tout intérêt à agir assez rapidement.