La Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises du 11 avril 1980 s’applique aux contrats de vente de marchandises entre des parties ayant leur établissement dans des États différents lorsque ces États sont des États contractants; ou lorsque les règles du droit international privé mènent à l’application de la loi d’un État contractant.
 
Cette convention, institue un droit matériel de la vente internationale de marchandises, qui s’applique en substitution du droit interne (lorsque l’application de la Convention n’est pas exclue par les parties).
 
La Convention contient à ce titre des dispositions relatives à la formation, à l’exécution, et à la rupture des contrats.
 
Lorsque les parties entrent dans le champ d’application de la Convention, mais que celle-ci est silencieuse pour trancher une question de droit, son article 7 dispose qu’il convient d’appliquer les principes généraux dont la Convention s’inspire, ou à défaut les dispositions de la loi compétente par application des règles de droit international privé :
 
«  Les questions concernant les matières régies par la présente Convention et qui ne sont pas expressément tranchées par elle seront réglées selon les principes généraux dont elle s’inspire ou, à défaut de ces principes, conformément à la loi applicable en vertu des règles du droit international privé ».
 
La prescription de l’action dans la Convention de Vienne du 11 avril 1980 :
 
La question du délai de prescription de l’action n’est pas régie par la Convention.
 
Son article 39 contient cependant des dispositions relatives à la déchéance du droit de se prévaloir d’un défaut de conformité :
 
« L’acheteur est déchu du droit de se prévaloir d’un défaut de conformité s’il ne le dénonce pas au vendeur, en précisant la nature de ce défaut, dans un délai raisonnable à partir du moment où il l’a constaté ou aurait dû le constater.
 
Dans tous les cas, l’acheteur est déchu du droit de se prévaloir d’un défaut de conformité, s’il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises, à moins que ce délai ne soit incompatible avec la durée d’une garantie contractuelle ».
 
Cette déchéance du droit peut-elle être considérée comme un délai qui obligerait les parties à introduire une action en non-conformité dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises sous peine de prescription de l’action ?
 
La solution retenue par l’arrêt de la Cour de cassation Chambre commerciale du 21 juin 2016 (pourvoi n°14-25359) :
 
Dans cette affaire, une entreprise allemande, assignée en non-conformité devant les tribunaux français, soutenait que la demande formée à son encontre était irrecevable par application de l'article 39 de la Convention de Vienne.
 
Pour ce faire, elle indiquait que l’assignation en non-conformité, intervenue 4 ans après la livraison des marchandises, se heurtait à l'application de l'article 39 de la Convention de Vienne, et du droit allemand applicable sur le fond, dans la mesure où le demandeur disposait d'un délai de deux ans pour agir à compter de la livraison des marchandises.
 
La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 27 juin 2014 rejetait cet argument au motif que la Convention de Vienne du 11 avril 1980 intègre la convention sur la prescription en matière de vente internationale de marchandises dite de New York du 14 juin 1974 qui dispose que le délai de prescription est de 4 ans au moins.
 
Dans ces conditions, la Cour d’appel estimait la prescription revendiquée par la société allemande non acquise.
 
La Cour de cassation censurait l’arrêt d’appel pour deux raisons :

 

Elle rappelait dans un premier temps que la convention de New York du 14 juin 1974 sur la prescription était non applicable:

« Vu les articles 55 de la Constitution et 3 de la Convention de La Haye du 15 juin 1955 sur la loi applicable aux ventes à caractère international d'objets mobiliers corporels ;

Attendu que pour déclarer l'action recevable, l'arrêt retient que la Convention de Vienne du 11 avril 1980, applicable en l'espèce, intègre la Convention de New York du 14 juin 1974 sur la prescription en matière de vente internationale de marchandises ;

Qu'en statuant ainsi, alors que ni la France ni l'Allemagne n'ont signé cette dernière, la cour d'appel a violé les textes susvisés
 ».

Elle rappelait dans un second temps que le délai de l’article 39 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 ne doit pas s’envisager sous l’angle de la prescription car il s’agit d’un délai de dénonciation d’un défaut de conformité :

« (…) le délai de deux ans prévu par l'article 39 de la Convention de Vienne est un délai de dénonciation du défaut de conformité et non un délai pour agir en réparation d'un éventuel préjudice ».


Il en ressort que le délai dans lequel la Convention de Vienne du 11 avril 1980 enferme la dénonciation du défaut de conformité ne doit pas s’analyser comme un délai de prescription dans lequel l’acheteur doit introduire son action contre le vendeur.

 

                                                                Nasser Merabet
                                                                      Avocat