On sait que la maladie suspend et le contrat de travail et les obligations du salarié vis-à-vis de l’employeur.

Sauf son obligation de loyauté

1-Une intolérance certaine en droit de la sécurité sociale

L’article L323-6 CSS prévoit que le salarié « qui se trouve dans l’incapacité physique constatée par le médecin […] de continuer ou de reprendre le travail » (CSS, art.L.321-1) doit s’abstenir de toute activité non autorisée, qu'elle soit professionnelle ou même parfois personnelle (Soc., 5 nov. 1986 no 84-16.204), rémunérée ou non…

Sauf autorisation expresse du médecin, la Caisse n’autorise pas le salarié, par exemples, à exercer un mandat de représentant du personnel (Cass. 2e civ., 9 déc. 2010, n° 09-17.449), des tâches de gérant de brasserie (2e civ., 25 juin 2009, no 08-17.594.), des travaux d’entretien ou de réfection (2e civ., 25 juin 2009, no 08-14.670.), du jardinage (Cass. soc., 19 oct. 1988, no 86-14.256),  la pratique d’une activité sportive (2e civ., 9 déc. 2010, no 09-14.575) etc.

Le salarié qui travaille pendant son arrêt maladie sans y être autorisé s’expose à devoir rembourser ses indemnités journalières (CSS, art. L. 323-6) et, en cas activité rémunérée à une pénalité financière (CSS, art. L. 114-17-1.)

2-Une solution bien différente vis-à-vis de l’employeur

La solution est tout autre vis-à-vis de l’employeur.

Il est admis de longue date que l’obligation de loyauté pesant sur le salarié n’est pas affectée par l’inobservation éventuelle de ses obligations à l’égard de la sécurité sociale.

Vis-à-vis de l’employeur, la Jurisprudence reconnait au salarié le droit d’exercer (sous exceptions de plus en plus rares) d’autres activités et même de travailler pendant son arrêt de maladie…

  • L’exercice d’une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté qui subsiste pendant la durée de cet arrêt. (Cass. Soc. 11-6-2003 n° 02-42.818)

La seule limite qu’elle pose est de ne pas exercer une activité susceptible de causer à son employeur ou à l’entreprise un préjudice (Cass. Soc. 12-10-2011 n°10-16.649 - Cass. Soc. 21-11-2018 n° 16-28.513).

Cette position se justifie par le fait que, le contrat étant suspendu du fait de la maladie, les faits commis pendant un arrêt relèvent de la vie privée du salarié.

Mais, même en droit, ces faits sont susceptibles de justifier un licenciement lorsqu’ils causent un trouble objectif caractérisé au sein de l’entreprise ou lorsqu’ils sont indissociables de l’activité professionnelle du salarié.

La Cour de Cassation adopte cependant une appréciation très restrictive du préjudice de l’employeur et autorise le salarié à exercer des activités très diverses, même si elles ne sont autorisées en droit de la Sécurité sociale…

Le salarié peut par exemple, et on le conçoit, exercer pendant son arrêt de travail médicalement justifié :

  • Une activité occasionnelle  (Cass. Soc., 5 mars 2014, n° 12-21.682 - Cass. Soc., 21 mars 2000, n° 97-44.370) ;
  • Une activité bénévole (Cass. Soc., 4 juin 2002, n° 00-40.894).
  • Une Aide occasionnelle dans le cadre de l’entraide familiale (Cass. Soc., 11 juin 2003, n°02-42.818 Cass. soc., 28 nov. 2006, n° 05-41.845 - Cass. Soc., 12 juin 2008, n° 07-40.307- Cass. Soc., 12 oct.2011, n° 10-16.649).

Et même… une activité professionnelle… 

Alors qu’en 2005 la Cour de Cassation n’admettait pas le salarié puisse exercer une activité rémunérée

  • « Mais attendu qu’abstraction faite d’un motif erroné mais surabondant tiré de l’application de l’article L. 324-1 du Code du travail, la cour d’appel, qui a soulevé que durant son arrêt de travail, M. X... avait occupé pendant plusieurs mois un emploi rémunéré de serveur de bar, faisant ainsi ressortir que celui-ci avait manqué à son obligation de loyauté » (Cass Soc 12 janvier 2005, 02-46.002)

Progressivement les juges sont revenus sur cette position admettent maintenant que le salarié puisse exercer d’autres activités professionnelles… même rémunérées…

  • L’exercice d’une autre activité professionnelle pendant un arrêt maladie ne révèle pas nécessairement un comportement déloyal et donc fautif (Cass. Soc., 21 nov. 2018, no16-28.513).

Ainsi ont été admis:

  • La création par un Consultant informatique et son travail non rémunéré pendant son arrêt maladie, d’un hôtel de luxe dont il était le gérant (Cass. Soc. 21 nov. 2018 n° 16-28513).
  • Le fait d’exercer une activité professionnelle dans un commerce non concurrentiel, d’une société dont le salarié est l’unique associée (Cass. Soc. 26-2-2020 n° 18-10.017).
  • Travailler pour « au moins un autre employeur », en exerçant les mêmes fonctions, durant ses arrêts de travail (Cass Soc, 7 décembre 2022, 21-19.13).

Cela, même si le salarié est lié par une clause d’exclusivité

Ce qui est de nature à modifier l’équilibre économique des parties dans la mesure où le maintien du salaire pendant un arrêt de maladie avait été à l’origine instituée pour permettre au salarié de ne pas être pénalisé du fait de sa maladie et de continuer de percevoir une rémunération malgré celle-ci.

Mais alors, quelles sont les activités jugées fautives ?

Il ne fait pas vraiment de doute, que l’activité concurrentielle est reconnue comme constitutive d’une faute grave car elle portant préjudice à l’employeur, qu’elle soit exercée pour le compte d’une société concurrente (Cass. Soc., 28 janv. 2015, n° 13-18.354) ou pour son propre compte (Cass. Soc. 21-10-2003 n° 01-43.943).

Et pour le reste ?

Certains employeurs ont alors imaginé d’invoquer deux arguments :

a)  Premier argument : l’existence d’un préjudice financier lié au versement par l’employeur de tout ou partie de la rémunération du salarié

Tant le code du travail (C.trav art L. 1226) que celui de la Sécurité sociale (CSS, art.L.321-1) conditionnent le versement d’un revenu de remplacent à une « incapacité physique du salarié »

Vis-à-vis de l’assurance maladie, la Cour de cassation retient que l’action de la Caisse en répétition d’indemnités journalières est fondé, non pas sur une sanction, mais sur le fait que l’assuré a indument perçu un revenu de remplacement qu’il n’aurait pas dû obtenir en raison de la disparition de l’une ou de plusieurs des conditions auxquelles leur versement est subordonné (Cass. 2e civ., 7 févr. 2018, avis no 17-70.038 Cass. 2e civ., 12 juill. 2018, no 17-16.539).

L’indu représente un préjudice pour celui-ci le verse ....

Mais, alors que le salarié peut être amené à rembourser à la CPAM les IJSS perçues, la Cour de Cassation considère en revanche que le préjudice causé à l’employeur ne résulte pas du versement injustifié par lui d’un maintien en tout ou partie de la rémunération durant l’arrêt maladie

  • Cass Soc. 26-02-2020 n° 18-10.017 - Cass Soc. 07-12-2022 n° 21-19.132- Cass Soc., 1 févr. 2023, n° 21-20.526 pour un maintien intégral

Or, le maintien du salaire par l’employeur procède pourtant du même objectif que l’indemnité journalière, à savoir d’assurer un revenu de remplacement au salarié qui ne peut plus exercer ses fonctions étant dans « l’incapacité physique constatée par le médecin, […] de continuer ou de reprendre le travail » (CSS, art.L.321-1

Ainsi, la Cour de cassation applique prioritairement le régime de la simple suspension du contrat de travail, comme peut l’être un congé sans solde, en omettant la condition d’incapacité physique expressément visée par l’article L. 1226-1 C.trav

De plus, alors que le maintien du salaire par l’employeur est classiquement conditionné au fait que le salarié soit effectivement pris en charge par la sécurité sociale (CSS, art. L. 315-2) la Cour de cassation a parfois décorrélé ces deux indemnisations en retenant que le bénéfice du complément conventionnel d’indemnisation à la sécurité sociale peut parfois  ne pas impliquer pour l’intéressé la nécessité de percevoir une prestation de la caisse, mais simplement celle d’avoir la qualité d’assuré social. (Cass. Soc., 24 juin 2020, n° 18-23.869).

Ainsi, le salarié pourra :

  • Être amené à devoir rembourser la CPAM les ISS perçues indument
  • Tout en conserver le salaire maintenu en tout ou partie par l’employeur,
  • Tout en le cumulant avec le revenu tiré d’une autre activité professionnelle quel qu’en soit le montant

Ce, sans même exiger comme le fait la caisse qu’un médecin autorise expressément telle ou telle activité résiduelle pendant un arrêt de travail.

Le préjudice financier de l’employeur (paiement sans cause) n’est pourtant pas retenu comme constituant une faute du salarié alors qu’il l’est pour la Caisse…

Et pourtant, constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement le fait pour un salarié de se faire volontairement consentir une rémunération indue (Cass. Soc., 19 avr. 2000, no 97-43.754)

Reconnaître que l’action en répétition la caisse n’est pas une « action-sanction » devait sans doute conduire la Cour de cassation à refuser à l’employeur le droit de licencier le salarié pour avoir travaillé pendant son arrêt…

b- Second  argument: Le risque de l’activité d’aggraver l’état de santé ou de prolonger les arrêts de travail.

Un second argument avait parfois été relevé, parfois avec succès.

En effet, le salarié peut exercer pendant son arrêt une activité physique (sports), incompatible avec l’incapacité de travail à l’origine de son arrêt , susceptible d’aggraver son état de santé, et donc de prolonger les arrêts de travail source pour son employeur d’un préjudice fonctionnel, organisationnel et économique.

Certaines rares décisions ont pu admettre dans le cas  de compétitions sportives ou de sports violents la faute du salari.

  • Pratique d’une compétition sportive (VTT) incompatible avec l’arrêt de maladie consécutif à un accident du travail (risque d’aggravation de l’état de santé en remettant en cause les suites de son opération et d’en faire supporter l’imputabilité à son employeur à raison de la présomption s’appliquant pour les soins continus consécutifs à un accident du travail) (CA Bordeaux, Ch sociale, Section B, 4 juin 2015, RG nº 13/04981)
  • Sport de combat, pratiqué à un haut niveau de performance qui «accroissait son état de fatigue alors qu’il aurait dû respecter un repos absolu, présentait des risques importants de blessure ou de lésions nuisibles à son rétablissement et susceptibles de conduire à un allongement de la durée des arrêts de travail » (CA Paris, Pôle 6, Ch 5, 18 février 2016, RG nº 13/0397.)
  • Pratique d’un « sport extrême » (activité de rallyes automobiles) nécessitant l’utilisation de ses deux mains, risquant sciemment d’aggraver l’état de santé et de prolonger ses arrêts de travail avec des conséquences inévitablement préjudiciables pour l’organisation et le fonctionnement de la RATP, tenue de suppléer son absence au sein de l’entreprise. (Cour d’appel de Paris, Pôle 6, Chambre 8, Arrêt du 8 décembre 2016, RGnº 13/10631).

Ici encore, la Cour de cassation vient de rejeter ce type d’argument en imposant à l’employeur de démontrer que « cette participation aurait aggravé son état de santé ou prolongé ses arrêts de travail ».

  • "Le fait pour un salarié de participer à 14 compétitions de badminton pendant ses cinq arrêts de travail ne constitue pas un manquement à son obligation de loyauté, dès lors que l’employeur ne démontre pas que cette participation aurait aggravé son état de santé ou prolongé ses arrêts de travail" (Cass. Soc., 1er févr. 2023, no 21-21.526).

Ce qui ressort pourtant du seul domaine médical.

Ainsi, le droit de la Sécurité́ Socials se montre bien plus sévère à l’égard du salarié que le droit du travail.

Deux poids, deux mesures donc…

Pascale Rayroux Lopez

 

 

 

 

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