Le nouvel impôt sur la fortune immobilière (IFI), c'est en gros l'ISF limité aux immeubles.

La base se réduit, mais la complexité se concentre.

A ce jour la réglementation sur l'IFI n'est pas encore complètement connue car il manque les commentaires administratifs, qui viendront nécessairement apporter des précisions importantes.

De plus, le texte de loi comporte de nombreuses anomalies et il est vraisemblable qu'il sera corrigé dans la prochaine loi de finances.

Je propose toutefois, d'ores et déjà, des solutions simples et sécurisées pour échapper à l'IFI tout en ayant un patrimoine immobilier.

Attention au fait que mes conseils ne portent que sur l'IFI et que tout schéma doit bien sûr prendre en compte les autres contraintes, fiscales, patrimoniales et personnelles.

 

S'endetter pour acheter ses immeubles

En matière d'IFI, les dettes relatives aux immeubles taxables sont déductibles.

Donc il ne faut plus acheter des locaux taxables par un financement personnel. Il faut systématiquement aller voir son banquier pour financer son achat.

Il faut demander un prêt amortissable remboursable sur 30 ans.

En investissement direct, il ne sert à rien de demander un prêt in fine car il est transformé fictivement en prêt amortissable pour les besoins du calcul de l'IFI.

Il me paraît possible en revanche de demander à son banquier une franchise de 2 ans pour commencer à rembourser le capital, ce qui est courant en matière de prêt immobilier.

L'idée est de maintenir le plus longtemps possible l'endettement déductible de la base de l'IFI.

Par ailleurs, tant qu'à s'endetter pour acheter un bien, il est plus judicieux, d'acheter l'immeuble par l'intermédiaire d'une SCI qui s'endette, plutôt que de s'endetter directement.

En effet, certaines limites sur l'endettement déductible (prêt in fine ou plafond global) n'existent que pour l'endettement à titre personnel, et n'existent pas pour l'endettement des sociétés. Cela étant, il ne peut être exclu une évolution des textes sur ce point.

 

Acheter ses locaux professionnels

Les locaux affectés à l'entreprise du contribuable sont exonérés d'IFI.

Donc, il peut être intéressant d'acheter les locaux utilisés par son entreprise.

Pour faire cet achat, il est possible de choisir entre l'achat personnel suivi de la location du bien à son entreprise, ou encore de faire acheter directement le bien par l'entreprise.

Pour financer cet achat, il n'est pas utile de s'endetter.

Il me paraît au contraire judicieux d'essayer de financer l'achat par un apport personnel, quitte à prêter les fonds de son patrimoine privé à son entreprise.

En effet, si le contribuable s'endette pour acheter les locaux de l'entreprise, il ne pourra plus s'endetter pour acheter ses immeubles personnels or seules les dettes relatives aux immeubles personnels sont déductibles. Il faut réserver sa capacité d'endettement aux immeubles personnels.

Par ailleurs, si l'entreprise est sous la forme d'un groupe avec une holding, il faut faire très attention à adopter un schéma optimal au plan de l'IFI.

 

Investir dans une entreprise individuelle de location meublée

Les loueurs en meublé peuvent être exonérés d'IFI à peu près dans les mêmes conditions qu'ils pouvaient être exonérés d'ISF.

Pour ceux qui investissent directement par l'intermédiaire d'une entreprise individuelle, cela suppose de respecter deux conditions de seuil.

D'abord le total des loyers doit être supérieur à 23 K€.

Ensuite le revenu net de charges doit être supérieur aux autres revenus professionnels du foyer fiscal.

Cette deuxième condition, différente de celle applicable en matière d'impôt sur le revenu qui se base uniquement sur les recettes et non sur le revenu net, est très difficile à remplir.

Elle implique d'abord que l'activité de location meublée soit bénéficiaire, ce qui élimine beaucoup d'investisseurs pour qui l'activité donne un résultat déficitaire ou nul.

Ensuite, les bénéfices de l'activité doivent être supérieurs aux autres revenus professionnels du couple. En pratique, il ne faut donc pas avoir des salaires ou des revenus d'activité professionnelle très importants, ou alors avoir de très importants revenus nets de location meublée.

Une question, à ce jour sans réponse, est de savoir si, pour le régime IFI, les pensions de retraite sont considérées ou non comme des revenus professionnels.

En matière d'ISF, il était admis que les pensions de retraite ne devaient pas être considérées comme des revenus professionnels au sens de ce régime. Cela permettait aux retraités d'échapper à l'ISF à hauteur de leurs placements en location meublée, sous réserve encore une fois que l'activité de location meublée soit bénéficiaire. A ce jour rien ne permet de garantir que cette doctrine favorable sera reprise en matière d'IFI. Mais c'est vraisemblable.

 

Investir dans une société de personnes de location meublée

Il est possible d'investir dans la location meublée par l'intermédiaire d'une société de personnes, transparente fiscalement, comme une EURL ou une SARL de famille, ou encore par une société assujettie à l'impôt sur les sociétés, une SARL classique ou une SAS notamment.

En cas d'investissement dans une société de location meublée, les conditions de seuil en matière de recettes ou de revenu net ne s'appliquent pas. Il faut appliquer les règles de droit commun en matière d'exonération des activités professionnelles principales.

S'agissant de la société de personnes, l'exonération IFI suppose que l'associé exerce dans la société son activité professionnelle principale. C’est-à-dire en pratique qu'il y consacre l'essentiel de son temps de travail.

Cette condition peut être remplie par l'un des membres du couple et peu importe que ce soit l'autre membre du couple qui soit le propriétaire des titres. Cette position ne résulte pas du texte mais c'est l'interprétation qui en était donnée par l'administration en matière d'ISF et je ne pense pas que la solution sera différente en matière d'IFI.

Il y a donc une différence de régime importante entre l'entreprise individuelle de location meublée, pour laquelle ce sont les conditions de seuil qui doivent être respectée, et la société de location meublée, même unipersonnelle comme l'EURL, où la condition à respecter est celle de l'implication personnelle principale.

En pratique, selon les situations, les contribuables pourront donc choisir, soit l'entreprise individuelle, soit l'EURL ou la SARL de famille, pour essayer d'avoir l'exonération IFI.

Et quelles sont les règles à appliquer si une personne a investi à la fois en entreprise individuelle et en EURL ? Je n'en sais rien (tout expert a ses limites).

 

Investir dans une société de location meublée assujettie à l'impôt sur les sociétés

L'idée est ici de constituer une société assujettie à l'impôt sur les sociétés, par exemple une SARL assujettie à l'impôt sur les sociétés.

Le contribuable apporte tous ses sous à la société sous la forme d'un compte courant. Si c'est possible, il faut ici éviter l'endettement bancaire.

La société investit dans des immeubles loués en location meublée. Le contribuable ou son conjoint est nommé gérant dans la SARL. Une rémunération de gérance lui est versée. Cette rémunération doit être supérieure à ses autres revenus professionnels, sans tenir compte de ceux du conjoint.

Dans cette situation, la valeur des parts de la SARL échappent à l'IFI.

Cette solution peut intéresser ceux qui ont de gros patrimoine immobilier locatif et qui veulent se constituer une forme de foncière familiale à long terme.

 

Investir dans la location de locaux équipés

L'idée est d'acheter des locaux professionnels équipés suffisamment pour permettre l'exercice de l'activité qui y est exercée.

Il peut s'agir de locaux à usage de bureaux, à condition de les équiper avec des meubles de bureaux, des ordinateurs et tout le matériel nécessaire.

Pour les bureaux, il faut selon moi aussi rajouter des services comme l'assistance informatique, le standard téléphonique, le nettoyage des locaux, le gardiennage, etc.

Le régime de la location de locaux équipés est proche de celui de la location meublée, à l'exception du régime de l'entreprise individuelle.

Si l'activité est exercée en entreprise individuelle ou en société de personnes, il est nécessaire de prouver l'implication personnelle principale pour avoir l'exonération IFI. Ce n'est pas facile et peu courant.

Si l'activité est exercée en société assujettie à l'impôt sur les sociétés, l'exonération suppose que l'un des conjoints soit dirigeant rémunéré avec un niveau de rémunération supérieur à ses autres revenus professionnels, sans tenir compte de ceux du conjoint.

Là encore, la solution de la société assujettie à l'impôt sur les sociétés peut intéresser les gros patrimoines. Elle permet d'investir dans des locaux à usage professionnel comme les bureaux.

 

Investir dans la parahôtellerie mais plutôt en société

Contrairement à la location meublée ou à la location de locaux équipés, la parahôtellerie est traitée comme une activité dite "opérationnelle".

Donc son régime est celui du droit commun, c’est-à-dire l'exclusion sans condition de la base d'IFI.

Si vous achetez des parts de la SARL de boucherie de votre voisin, vos parts de SARL ne sont pas assujetties à l'IFI, même si la SARL de boucherie est propriétaire des locaux de la boucherie et même si vous n'avez aucune activité professionnelle dans la boucherie de votre voisin (heureusement pour ses clients).

Donc si vous êtes propriétaire d'une société (EURL ou SARL de famille, ou société assujettie à l'impôt sur les sociétés) qui a acheté une maison en Corse (ou ailleurs) et que cette maison est exploitée en parahôtellerie, par exemple sous la forme d'un meublé de tourisme avec des services parahôteliers significatifs, vos parts sont exonérées d'IFI.

Cette exonération est sans condition d'activité personnelle dans la société, contrairement à ce qui a été évoqué pour la location meublée.

En conclusion, si vous ne souhaitez pas particulièrement payer l'IFI, que vous vous voulez acheter une résidence secondaire pour passer 15 jours de vacance d'été et quelques week-ends d'hiver, et que vous êtes prêt à accepter que votre maison soit occupée par des tiers le reste du temps, mettez en place un schéma d'exploitation en parahôtellerie (venez me voir avant c'est plus prudent).

Attention toutefois au fait que seule l'activité exercée en société bénéficie de cette exonération sans condition. En effet, les immeubles des entreprises individuelles ne bénéficient pas de cette exonération sans condition.

Si votre investissement en parahôtellerie est réalisé en entreprise individuelle, le seul moyen d'obtenir l'exonération est d'exercer l'activité à titre professionnel et principal. Autrement dit, il faut que l'un des conjoints exerce l'essentiel de son temps professionnel à la gestion de l'activité.

Dans certains cas, les contribuables devront s'interroger pour savoir si leur intérêt n'est pas d'apporter leur entreprise individuelle à une société pour échapper à l'IFI.

Toutefois cette exclusion des entreprises individuelles est discriminatoire, et peut-être anticonstitutionnelle. Elle est directement contraire à l'esprit du texte qui est de frapper les fortunes immobilières de façon progressive, et en exonérant l'immobilier professionnel.

Elle sera peut-être supprimée par une précision favorable des commentaires administratifs ou dans le cadre d'une réforme législative.

J'invite tous les exploitants individuels de meublé de tourisme, de gites ruraux et de chambres d'hôtes à protester auprès de leur député préféré.

 

Profiter du plafonnement

L'IFI a un régime de plafonnement identique à l'ISF.

L'impôt sur le revenu et l'IFI ne peuvent être supérieurs à 75 % de vos revenus.

Donc pour échapper l'IFI, il ne faut plus avoir de revenu.

Vous avez un gros patrimoine immobilier locatif et vous n'avez plus envie de faire partie du troupeau des vaches à lait de l'Etat. Que faire ?

Constituez une société assujettie à l'impôt sur les sociétés et vendez vos biens à crédit à cette société. Vous récupérerez de l'argent par remboursement progressif de ce prêt. Et surtout vous n'aurez plus de revenus locatifs.

Le schéma n'est pas très efficace si le contribuable dispose d'autres revenus importants, comme les pensions de retraite, impossibles à fixer dans une société assujettie à l'impôt sur les sociétés.