M. le Maire de la commune de Saint-Cast Le Guildo avait accordé à un particulier un permis de construire une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section AN n° 92 située avenue de Pen Guen.

Cette décision ne fût toutefois pas du goût de l'association « Protégeons le site et le panorama de Pen Guen » qui a demandé au tribunal administratif de Rennes de l’annuler.

Par un jugement du 8 février 2019, le tribunal a fait droit à cette demande en accueillant les moyens tirés de ce que le terrain, d’une part, n’était pas situé en continuité avec une agglomération ou un village (article L. 121-8, anciennement L. 146-4 I du Code de l’urbanisme), et d’autre part, n’était pas situé dans un espace urbanisé de la bande de cent mètres (article L. 121-16, anciennement L. 146-4 III du Code de l’urbanisme).

La commune et le bénéficiaire de l’autorisation ont fait appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Nantes.

Leur appel a été rejeté par la décision ici commentée, même si le jugement contesté était entaché d’une méconnaissance dans le champ d’application de la loi Littoral.

En effet, le cour administrative d’appel a censuré le jugement de première instance dès lors qu’il s’est fondé sur les deux moyens précités.

D’après la Cour dès lors que « le projet en cause est intégralement situé dans la bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage (…) seules étaient applicables les dispositions du III de l'article L. 146-4 et non pas également celles du I. Dès lors, il y a lieu de soulever d'office le moyen tiré de l'erreur commise par le tribunal administratif de Rennes dans le champ d'application de la loi en faisant droit à une demande en se fondant sur le moyen tiré de la méconnaissance du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme alors que ce moyen était inopérant ».

Ainsi donc, dès lors qu’un projet est situé intégralement dans la bande de cent mètres, seule la réglementation encadrant l’urbanisation dans ladite bande peut être appliquée.

On sait que la Cour a déjà jugé qu’un projet peut être situé en continuité avec une agglomération ou un village, mais pour autant ne pas être situé dans un espace urbanisé de la bande de cent mètres (CAA Nantes 10 juillet 2017 Commune de l’île-aux-Moines n° 16NT°1506 V. également sur ce point CE 21 juin 2018 Commune de l’île d’Houat n° 416564) même si par le passé, elle avait pourtant estimé « qu'une construction implantée en continuité avec une agglomération ou un village existant au sens du I de ce même article appartient par nature à un espace urbanisé au sens de ces dispositions » (CAA Nantes 13 juillet 2012 Commune des Moutiers-en-Retz n° 11NT00843).

La question pourrait alors se poser de savoir si l’inverse est possible, c’est-à-dire si un projet pourrait être situé dans un espace urbanisé, sans pour autant nécessairement être en continuité avec une agglomération ou un village.

Le Conseil d’État a déjà eu l’occasion de juger sur ce point « qu’un espace urbanisé au sens des dispositions du III de l’article L. 146-4 (…) appartient, par nature, à une agglomération ou à un village existant au sens du I du même article » (CE 22 février 2008 Commune d’Excenevex n° 280189).

Le rapporteur public dans cette jurisprudence reconnaissait alors qu’il y avait une certaine correspondance entre la notion d’espace urbanisé au sens du III de l’article L. 146-4 et celle d’agglomération ou de village au sens du I.

Similarité que l’on retrouve aujourd’hui dans la jurisprudence du Conseil d’État qui considère de la même manière que pour être qualifié de village, d’agglomération ou d’espace urbanisé, seule compte l’existence d’un nombre et d’une densité significatifs de constructions (V. CE 9 novembre 2015 Commune de Porto Vecchio n° 372531 et CE 21 juin 2018 Commune de l’île d’Houat n° 416564)

En censurant pour méconnaissance du champ d’application de la loi Littoral le jugement du Tribunal administratif de Rennes, les juges d’appel nantais se sont placés dans ce cadre juridique.

En effet, dès lors que, par nature, un espace urbanisé de la bande de cent mètres appartient à une agglomération ou un village, il n’y a pas lieu de faire application de l’article L. 121-8 du Code de l’urbanisme qui devient surabondant.

En l’espèce, la question portait donc uniquement sur le fait de savoir si la construction projetée était située dans un espace urbanisé de la bande de cent mètres.

Tel n’est pas le cas pour la cour administrative d’appel de Nantes.

Aux termes de sa décision les juges d’appel, confirmant alors sur ce point le jugement de première instance, ont estimé que « le terrain d'assiette du projet en cause s'ouvre à l'ouest sur une vaste zone naturelle et à l'est sur le rivage, dont il n'est séparé que par une voie et une bande de terrain non construit. S'il est situé, au nord et au sud, à proximité de quelques constructions disséminées et d'installations de camping, il ne peut être regardé comme inclus dans un espace urbanisé. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance du III de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme doit être accueilli ».

La cour administrative d’appel a alors pris en compte uniquement les quelques constructions disséminées au nord et au sud de la construction, sans relever qu’à proximité du terrain se trouvaient plusieurs immeubles importants entraînant une densification significative du secteur.

La cour a vraisemblablement considéré que ces constructions, dès lors qu’elles ne sont pas situées à proximité immédiate du terrain, ne peuvent être prises en compte dans la qualification d’espace urbanisé au sens de l’articles L. 121-16 du Code de l’urbanisme.