Les communes littorales sont soumises à un risque de condamnation indemnitaire important lorsqu’elles ont fait une mauvaise application de la loi Littoral.
Concrètement, lorsqu’elles ont déclaré constructibles des terrains qui en réalité n’auraient pas dû l’être en application de la loi Littoral, la jurisprudence reconnaît qu’elles commettent des fautes de nature à engager leur responsabilité.
Il est alors très fréquent, lorsque la prescription de l’action n’est pas acquise, que la commune soit condamnée à verser des indemnisations pour compenser, notamment, la perte de valeur vénale du bien immobilier acquis.
La question se posait de savoir si cette indemnisation pouvait également avoir lieu lorsque l’acquisition du bien immobilier s’était faite à la suite d’un partage successoral.
La Cour administrative d’appel de Nantes vient de répondre à cette interrogation par la positive.
Les faits à l’origine de cette jurisprudence étaient assez classiques.
Un particulier avait acquis un terrain à bâtir sur la commune de l’Hôpital-Camfrout située dans le Finistère.
Le plan local d’urbanisme classait alors en zone constructible ce terrain.
L’intéressé avait alors transmis par un acte authentique de partage successoral ses biens à ses deux enfants.
L’un d’eux avait alors hérité du terrain considéré comme constructible et donc valorisé en tant que tel dans le cadre du partage successoral.
A ce titre, le notaire en charge de la succession avait fait établir un certificat d’urbanisme informatif.
Celui-ci reproduisait alors le classement en zone constructible de la parcelle et ne mentionnait pas l’application possible de la loi Littoral.
Toutefois en l’espèce, le terrain en question était situé dans une zone d’urbanisation diffuse et en application de l’article L. 121-8 du Code de l’urbanisme, aucune construction n’était en réalité possible.
L’héritier du terrain déclassé avait alors recherché la responsabilité de la commune de l’Hôpital-Camfrout devant les juridictions administratives.
Il a été en cela très bien conseillé puisque le Tribunal et la Cour lui ont donné raison.
D’après les magistrats administratifs d’appel nantais : « le partage des biens, qui a été réalisé par l'acte des 24 et 27 décembre 2014, sur la foi de renseignements d'urbanisme erronés quant au caractère constructible de la parcelle, a ainsi eu pour effet de léser les droits de M. A.... Le préjudice en résultant présente donc un lien de causalité directe avec les fautes mentionnées ci-dessus commises par la commune ».
Concernant l’évaluation du préjudice subi, la Cour estime que : « il résulte de l'instruction que la valeur totale des biens soumis au partage a été estimée, de façon erronée, du fait des illégalités rappelées ci-dessus, à 301 000 euros, la valeur de la parcelle ayant, dans ce total, été fixée à 50 000 euros. Il résulte de l'instruction, notamment du barème fixé par l'arrêté du 13 juillet 2015, et des évaluations retenues par l'acte de partage pour d'autres parcelles voisines, que la valeur de cette parcelle, d'une surface de 17 ares et 63 centiares, s'établit, compte tenu de son inconstructibilité, non à 50 000 euros mais à 879,74 euros, la totalité de l'actif partageable s'élevant, par voie de conséquence, non à 301 000 euros, mais à 251 879, 74 euros. M. A... aurait donc dû recevoir, de la succession de ses parents, la moitié de cet actif, soit 125 939, 87 euros. Ce dernier ayant reçu une part d'un montant de 100 755,63 euros, son préjudice au titre de l'erreur d'évaluation de cette parcelle dans l'acte de partage, du fait des illégalités fautives de la commune, s'élève à la somme de 25 184 euros ».
L’intéressé a donc pu bénéficier de l’indemnisation d’un préjudice d’erreur d’évaluation de la parcelle dans l’acte de partage à hauteur de 25.184 euros.
Il est à noter que si le préjudice de perte de valeur vénale de la parcelle avait été pris en compte, il aurait été potentiellement bien supérieur.
Par ailleurs, et dans l’hypothèse où il n’existerait qu’un seul héritier, le préjudice d’erreur d’évaluation de la parcelle n’apparaît pas envisageable.
Outre ce préjudice, les juges administratifs ont également admis que le surplus de frais de succession payé était également indemnisable.
En l’espèce, l’intéressé avait déboursé 5.000 euros au titre des frais de succession pour ce terrain, alors qu’ils auraient dû être seulement d’environ 90 euros. Ainsi, le surplus de droits de succession, à savoir environ 4.900 euros, a été mis à la charge de la commune fautive.
Enfin, un préjudice moral de 1.000 euros a été retenu en l’espèce.
Au final, l’héritier en question a pu bénéficier d’une indemnisation totale d’un peu plus de 31.000 euros.
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