Avant les ordonnances Macron, il y a eu le contrat nouvelle embauche également institué par voie d’ordonnances (Ordonnance 2005-893 du 2/8/2005).
Le discours était identique à celui d’aujourd’hui ; la crise, la flexisécurité, c’est mieux que rien, mais vous avez toute la vie c’est une chance…
Ce dispositif prévoyait la possibilité pour l’employeur de rompre le contrat de son salarié sans motif pendant deux ans sous réserve du paiement d’une indemnité forfaitaire égale à 8% des salaires perçus.
Il avait connu une fin rapide en raison tant des mouvements sociaux déclenchés que de l’intervention du juge judiciaire qui avait mobilisé les règles internationales et notamment la désormais fameuse Convention n°158 de l’OIT (Cass.Soc., 01.07.2008., n°07-44124).
Désormais, les ordonnances Macron ne fixent pas une indemnité forfaitaire automatique mais un système de plancher et de plafond d’indemnité arbitré par le juge en cas d’absence de cause réelle ou sérieuse du licenciement.
Bien qu’organisées de manière différente, les ordonnances Macron ont un effet similaire aux ordonnances CNE précitées puisqu’elles privent totalement d’enjeu la question de la motivation du licenciement pourtant exigée par la convention de l’Organisation Internationale du Travail.
Il s’agit d’une « forfaitisation a minima » de l’indemnisation du manquement de l’employeur à son obligation de motivation.
La comparaison des montants entre les indemnités forfaitaires qui étaient prévues pour les deux premières années du contrat nouvelle embauche et celles prévues par les nouveaux barèmes est tout à fait éclairante s’agissant notamment des entreprises de moins de onze salariés :
Indemnité forfaitaire CNE Barème Macron - de 11 salaires
Ancienneté Salaire Indemnité Ancienneté Salaires Indemnité min Indemnité max
6 mois 1500 720 6 mois 1500 0 1500
11 mois 1500 1320 11 mois 1500 0 1500
1 an 1500 1440 1 an 1500 750 3000
23 mois 1500 2760 23 mois 1500 750 3000
2 ans 1500 2880 2 ans 1500 750 5250
D’un montant forfaitaire perçu sans avoir à recourir au juge, nous sommes passé à un montant nécessitant l’intervention du juge avec un plafond à peine supérieur à celui de l’indemnité forfaitaire antérieure.
De nombreux salariés licenciés avec moins de deux ans d’ancienneté percevront donc une indemnisation moindre que celle de l’indemnité forfaitaire qu’ils auraient perçus dans le cadre du CNE.
Après deux ans d’ancienneté, l’écart est encore plus manifeste.
Dans le cadre des anciennes dispositions, l’indemnisation du licenciement sans cause réelle ni sérieuse était fixée à un minimum de 6 mois (soit, dans l’exemple ci-dessus 9.000 euros).
Désormais, le plancher applicable aux salariés qui avaient plus de deux ans d’ancienneté est devenu le plafond de ceux qui en ont cinq.
Pour ajouter à l’injustice, les salariés supporteront en plus un aléa procédural alors qu’ils étaient certains de percevoir l’indemnisation forfaitaire prévue dans le cadre du CNE.
Le CNE qui avait mis l’ensemble de la société française dans la rue était finalement plus avantageux pour beaucoup de salariés que les nouvelles ordonnances de « sécurisation des relations de travail ».
Si la rue semble plus atone qu’il y a dix ans, nul doute que le juge devra s’interroger sur la compatibilité de ces ordonnances aux normes internationales.
En bref :
- Les indemnités des ordonnances Macron sont moins avantageuses que celles du CNE,
- Elles forfaitisent a minima le défaut de motivation et prive d’effet cette obligation,
- Le forfait peut être combattu en reprenant l’argumentaire établi pour le CNE,
Les liens vers les sources :
L’arrêt de la cour de cassation :https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000019127815
Les ordonnances CNE https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000632473
Les ordonnances Macron https://www.legifrance.gouv.fr/eli/ordonnance/2017/9/22/MTRT1724787R/jo
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