En raison de leur particularité, les préjudices « d'angoisse de mort imminente » et « d'attente et d'inquiétude » doivent être indemnisés de manière spécifique.

        C'est ce qui ressort de deux arrêts rendus le 25 mars 2022 par la chambre mixte de la Cour de cassation, le communiqué accompagnant leur diffusion expliquant que la Cour y « affirme clairement le caractère spécifique de ces deux préjudices et le principe de leur réparation autonome en créant deux nouveaux postes au sein la nomenclature Dintilhac ».

        Une nomenclature qui, parce que la loi ne prévoit pas de référentiel de réparation des préjudices corporels, « s'est dès lors imposée comme une référence pour tous les acteurs de la réparation du dommage corporel », étant utilisée par les juridictions judiciaires, les victimes, les avocats et les assureurs, sachant qu'elle prévoit une liste de « postes » correspondant à des définitions précises de divers préjudices.

        Mais, à la suite notamment des attentats commis en France, la justice a été saisie de demandes en réparation de catégories de préjudices que la « nomenclature Dintilhac » n'avait pas envisagées. Par exemple :

                -le préjudice dit « d'angoisse de mort imminente ». Il s'agit du préjudice ressenti par la victime directe qui, entre le moment où elle a subi une atteinte et son décès, a eu la conscience du caractère inéluctable de sa propre fin. Les héritiers de la victime peuvent, en son nom, obtenir réparation de ce préjudice ;

                -Le préjudice dit « d'attente et d'inquiétude ». Il s'agit du préjudice subi par les proches d'une victime directe lorsqu'ils apprennent qu'elle est ou a été exposée à un péril. Leur souffrance naît de l'état d'attente et d'incertitude dans lequel ils se trouvent, entre le moment où ils apprennent que leur proche est en péril et le moment où ils ont connaissance de l'issue de l'événement pour celui-ci.

       Alors que « jusqu'à présent, les différentes chambres de la Cour de cassation n'apportaient pas de réponse uniforme sur les modalités de réparation du préjudice d'angoisse de mort imminente », la chambre mixte de la Cour de cassation décide :

        • Sur le préjudice d'angoisse de mort imminente : que l'angoisse d'une mort imminente se distingue du poste des « souffrances endurées », lesquelles sont définies par la « nomenclature Dintilhac » comme « toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à-dire du jour de l'accident à celui de sa consolidation [état définitif des séquelles]. En effet, à compter de la consolidation, les souffrances endurées vont relever du déficit fonctionnel permanent et seront donc indemnisées à ce titre ».

        • Sur le préjudice d'attente et d'inquiétude : que le préjudice d'attente et d'inquiétude que subissent les proches de la victime directe ne se confond pas avec leur préjudice d'affection ni avec aucun autre poste de préjudice indemnisant les victimes par ricochet ; mais il constitue un préjudice spécifique qui doit être réparé de façon autonome.

Cass. ch. mixte, 25 mars 2022, n° 20-17.072, B + R

Cass. ch. mixte, 25 mars 2022, n° 20-15.624, B + R

 (Veille LEXIS NEXIS - La Semaine Juridique Edition Générale n° 13, 4 Avril 2022, 415.)