L’article 11 de la loi du la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l’épidémie de COVID 19 autorise le gouvernement à prendre par ordonnances, jusqu’au 24 juin 2020, toute mesure, relevant du domaine de la loi, afin, je cite « de faire face aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation. »

 

L’on s’attendait donc à des mesures fortes adoptées par ordonnances et a minima à une suspension des délais dans le milieu du bâtiment.

 

Ce ne fut pas véritablement le cas.

 

En effet, alors que le Gouvernement a décidé de prendre de mesures de confinement et de fermer certains établissements (commerces non alimentaires, restaurant, écoles etc), il demande, dans même temps, aux entreprises de poursuivre leur activité, même lorsque le télétravail n’est pas possible, à condition de prendre des mesures de prévention protégeant la santé de ses collaborateurs, conformément aux responsabilités des employeurs.

 

Cette première obligation est déjà difficile à respecter tenant le manque cruel de masques…

 

Se posent, par ailleurs, de vrais problématiques en termes d’approvisionnement en matériaux et d’indisponibilité du personnel.

 

De très nombreuses entreprises ont été contraintes d’interrompre leur activité, faute de matériel.

 

C’était la leur première sanction : interrompre les chantiers.

 

Mais les entreprises du BTP vont-elles subir une « double-peine » ?

 

Lorsque l’activité est soit ralentie soit impossible, qu’en est-il des délais contractuellement prévus pour achever le chantier ?

 

 

La logique aurait voulu que le Gouvernement décide de suspendre les délais d’exécution des chantiers durant la période d’état d’urgence + 1 mois.

 

C’est d’ailleurs ce que l’Etat a fait pour de nombreux délais. Ils ont été soit suspendus soit prorogés jusqu’au 24 juin (fin de l’état d’urgence fixée au 24 mai + 1 mois).

 

Mais s’agissant des délais en matière de travaux de construction, les dispositions prises par ordonnances sont insuffisantes, faisant planer un vrai risque sur les constructeurs.

 

En effet, l’ordonnance du 25 mars 2020 n°2020-306 traite en son article 4 des clauses pénales c’est-à-dire des clauses prévoyant des pénalités en cas de non-respect par le constructeur des délais contractuellement prévus.

 

Trois situations doivent être distinguées :

 

  • Si le délai contractuellement fixé expirait avant le 12 mars : les clauses pénales sont suspendues jusqu’au 24 juin. Les pénalités ne seront donc pas comptabilisées entre le 12 mars et le 24 juin.

 

  • Si le délai contractuellement fixé expire entre le 12 mars et le 24 juin 2020 : les clauses pénales ne produiront d’effet qu’à partir du 25 juillet 2020 si le retard persiste. Ainsi, si le retard du chantier pris entre le 12 mars et le 24 juin (plsu de 3 mois), n’a pas pu être rattrapé en 1 mois ( !), alors les pénalités seront dues dès le 25 juillet.

 

  • Si le délai contractuellement fixé expire après le 24 juin 2020 : l’ordonnance ne prévoit rien ! Imaginons un délai expirant le 28 juin 2020. La clause pénale s’appliquera dès le 28 juin et les pénalités seront dues dès cette date !

 

La seule exception possible : que les parties aient prévues que les épidémies constituent une cause légitime de suspension des délais d’exécution, ou qu’elles aient accepté de suspendre les travaux durant cette période.

 

 

 

 

 

Si ce n’est pas le cas, il faudra alors espérer que la jurisprudence considère que cette épidémie constitue un cas de force majeure de nature à exonérer le constructeur de ses obligations.

 

La force majeure est définie comme suit par l’article 1218 du code civil : "Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur."

 

Jusqu’à présent, la jurisprudence avait estimé que les épidémies ne constituaient pas un cas de force majeure.

 

Mais la pandémie actuelle semble être d’un genre nouveau.

 

Les mesures de confinement sont-elles que, de fait, l’entrepreneur se trouve dans l’incapacité de poursuivre ses chantiers.

 

En matière de marches de travaux publics, l’Etat lui-même a retenu la force majeure.

 

Il apparait donc difficile de ne pas retenir la force majeure.

 

Néanmoins, l’aléa judiciaire existe toujours et à ce jour, il n’est pas possible d’affirmer que l’épidémie de COVID 19 constituera systématiquement un cas de force de majeure.

 

Il est donc dommage que l’ordonnance ne soit pas allée au bout de sa logique…

 

Le cabinet reste à votre disposition pour vous accompagner, particulièrement en cette période.

 

 

Sarah HUOT

Avocat spécialisé en Droit Immobilier et Droit de l’Urbanisme

Avocat Associé

SCP VIAL PECH de LACLAUSE ESCALE KNOEPFFLER

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