Outre le confort de déléguer l’organisation des vacances ou d’un séjour professionnel, le fait de passer par un organisme de voyage garantit une indemnisation du dommage corporel subi lors d’un accident au cours d’une activité prévue dans le séjour ou le voyage organisé. Quelles sont les conditions de mise en œuvre de cette responsabilité de plein droit de l’organisme de voyage ? Y-a-t-il une limite à cette responsabilité ? Nous faisons le point ensemble sur ces questions.

 

1.  La responsabilité de plein droit de l’organisme de voyage en vertu du forfait touristique 

Qu’est-ce qu’un forfait touristique ? Les articles L. 211-1 et L.211-2 II A du Code du tourisme définissent ses contours. Il s’agit d’une prestation vendue par un organisme pour un voyage / séjour d'au moins 24 heures ou une nuitée et qui combine au moins deux types de services dans un contrat unique. Ces services peuvent être du transport, de l'hébergement, la location de véhicules ou de matériels, les prestations sportives ou d'autres services.  

Par exemple, est un forfait touristique le séjour de plusieurs jours organisé par une agence de voyage qui réserve l’hôtel et les activités et dont le prix est global. C’est le cas des séjours au Club Med, UCPA, Fram, Jet tours pour ne citer que les plus renommés mais également une multitude d’agences de voyage dont l’offre de services répond aux critères des articles précités.  

L’article L. 211-16 du Code du tourisme pose la responsabilité de plein droit de l’organisme qui vend le forfait touristique en cas de dommage survenu pendant l’exécution du contrat (Cass. 1ère Civ., 13 déc. 2005, n° 03-17.897 ;  Cass. 1ère Civ., 9 décembre 2015, n° 14-20.533).

Cette responsabilité de plein droit implique l’existence d’une obligation de sécurité de résultat dans l’exécution du contrat. La victime de l’accident n’a donc pas besoin de démontrer la faute de l’organisme de voyage pour obtenir une indemnisation de son dommage corporel.

Cette responsabilité vaut pour les services assurés par l’organisme lui-même ou les services confiés à des prestataires (transporteur, hôtelier, animateurs, moniteurs, etc.). Elle vaut également pour les prestations optionnelles mentionnées dans la brochure de l’organisme de voyage (Cass. 1ère Civ., 9 avril 2015, n° 14-15.377 : accident de la circulation lors d’une excursion facultative).

Sur un plan procédural, la prescription de l’action en justice est classique en matière de réparation du dommage corporel, à savoir 10 ans à compter de la consolidation de l’état de santé de la victime (article 2226 du Code civil mentionnée par l’article L. 211-17 VI. du Code du tourisme).

 

2.  Quelques exemples jurisprudentiels d’engagement de responsabilité d’organismes de voyages ayant vendu un forfait touristique

Les juridictions du fond ont eu l’occasion de reconnaître l’existence d’un forfait touristique et la responsabilité de plein droit d’organismes de voyage dans différentes situations accidentelles (liste non exhaustive) :

  • Responsabilité du Club Med dans l’accident d’un vacancier lors d’un cours collectif de ski alpin encadré par un moniteur de l’ESF qui était inclu dans le séjour du Club Med (Cour d’appel de Paris, 19 mars 2019, n°17/21505)
  • Responsabilité de l’agence de voyage Croisières de France pour une vacancière qui a été percutée par une porte battante sur un bateau de croisière (Cour d’appel de Paris, 28 mai 2019, n°18-03827)
  • Responsabilité de l’agence de voyage KARAVEL (Promovacances) dans la chute d’une vacancière dans les escaliers d’un hôtel dont le revêtement en carrelage était glissant en raison d’une pluie tropicale (Cour d’appel de Paris, 4 octobre 2018, n°16-21613)
  • Responsabilité de l’hôtel Mercure dans l’accident de rafting qui était proposé par l’hôtel dans le cadre d’un séminaire professionnel de deux jours (Cour d’appel de Pau, 11 janvier 2022, n°19-00520)
  • Responsabilité de l’UCPA dans un grave accident d’un enfant qui a perdu le contrôle de sa trajectoire lors d’un cours collectif de ski encadré par un moniteur dans le cadre d’un séjour collectif pour mineurs sur les thèmes de sports et vacances (Cour d’appel de Paris, 12 mai 2022, n°19-14671).

 

3. Les causes exonératoires de responsabilité

Il y a des limites à cette responsabilité de plein droit. L’organisme de voyage qui vend un forfait touristique peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que le dommage est imputable soit à une faute du voyageur ou d’un tiers étranger à la fourniture des services compris dans le contrat soit à des circonstances exceptionnelles et inévitables (article L. 211-16 du code du tourisme).

Le Club Med a ainsi été exonéré de sa responsabilité pour un voyageur fautif qui s’est fait mordre par un crocodile en enjambant la barrière de protection bordant le lagon du village, malgré les affiches l’interdisant, afin de récupérer son appareil photo qu’il avait fait tomber dedans (Cour d'appel de Versailles, 19 mai 2022, n° 21/00236).

Les circonstances exceptionnelles et inévitables sont définit comme échappant au contrôle de la partie qui les invoque et dont les conséquences n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises (article L.211-2, V, 3° du Code du tourisme), comme peut l’être une catastrophe naturelle. 

Dans une autre situation, la responsabilité de l’UCPA a été reconnue dans un grave accident lors d’un cours collectif de ski mais les juges ont retenu que la société exploitante des pistes de ski devait sa garantie à l’UCPA en raison de la faute commise dans l’entretien et la sécurisation de la piste qui a participé à la réalisation du dommage. (Cour d’appel de Paris, 12 mai 2022, n°19-14671). De cette manière, la victime a été indemnisée par l’UCPA sans avoir besoin de prouver de faute, et l’UCPA a obtenu que les sommes soient réglées par le tiers qui a commis une faute à l’origine du dommage.

Dernière précision, en matière de dommage corporel, il ne peut y avoir de clause limitative de responsabilité issue du forfait touristique dans le contrat entre le voyageur et l’organisme de séjour.

En résumé, le forfait touristique permet de faciliter grandement l’indemnisation d’une victime d’un accident corporel en cours de séjour qui n’a pas à prouver de faute de l’organisme de voyage. Il reviendra à ce dernier de prouver la faute d’un tiers s’il souhaite ne pas être le régleur définitif de l’indemnité.