Par arrêt du 2 septembre 2021 (Sanchez / France), la Cour Européenne des Droits de l’Homme a jugé que la décision des juridictions françaises de condamner pénalement un homme politique, "faute pour celui-ci d’avoir promptement supprimé les propos illicites publiés par des tiers sur le mur de son compte Facebook utilisé dans le cadre de sa campagne électorale, reposait sur des motifs pertinents et suffisants, eu égard à la marge d’appréciation dont bénéficie l’État ».
Si cette décision concerne un cas spécifique, sa motivation est intéressante car elle rappelle que le principe de liberté d’expression implique tolérance et respect de l’autre.
La Cour a en effet notamment jugé que :
« La liberté d’expression constitue l’un des fondements essentiels d’une société démocratique, l’une des conditions essentielles de son progrès et de l’épanouissement de chacun. Sous réserve du paragraphe 2 de l’article 10, elle vaut non seulement pour les « informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent, inquiètent : ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels il n’est pas de « société démocratique ».
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S’agissant du contexte électoral invoqué par le requérant, la Cour souligne qu’il est fondamental, dans une société démocratique, de défendre le libre jeu du débat politique. Elle accorde la plus haute importance à la liberté d’expression dans le contexte du débat politique et considère qu’on ne saurait restreindre le discours politique sans raisons impérieuses. Permettre de larges restrictions dans tel ou tel cas affecterait sans nul doute le respect de la liberté d’expression en général dans l’État concerné.
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Cependant, la liberté de discussion politique ne revêt assurément pas un caractère absolu. Un État contractant peut l’assujettir à certaines « restrictions » ou « sanctions ».
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La tolérance et le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains constituent le fondement d’une société démocratique et pluraliste. Il en résulte qu’en principe on peut juger nécessaire, dans les sociétés démocratiques, de sanctionner, voire de prévenir, toutes les formes d’expression qui propagent, encouragent, promeuvent ou justifient la haine fondée sur l’intolérance (y compris l’intolérance religieuse), si l’on veille à ce que les « formalités », « conditions », « restrictions » ou « sanctions » imposées soient proportionnées au but légitime poursuivi.»