1) Les mesures conservatoires
Nous le savons, chaque créancier peut, sans commandement préalable, demander au juge de l’exécution (« le JEX ») l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur un bien appartenant à son débiteur sous réserve de justifier d’une créance fondée en son principe et menacée dans son recouvrement (L. 511-1 du Code des procédures civiles d'exécution).
Cette mesure peut, par exemple, prendre la forme d’une saisie-conservatoire sur un compte bancaire du débiteur ou d’une hypothèque judicaire conservatoire sur un immeuble dont le débiteur est propriétaire.
2) Les mesures conservatoires prises par l’administration fiscale
L’administration fiscale peut, en tant que créancier, se prévaloir des dispositions précitées à l’encontre d’une personne physique ou morale contre laquelle elle ne dispose pas encore d’un titre exécutoire (avis de mise en recouvrement ou « AMR ») pour demander l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de cette personne (particulier ou entreprise).
3) Sur la requête portant demande d’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire adressée au juge de l’exécution par le comptable public du pôle de recouvrement spécialisé
Selon l’article R.511-1 du code de procédure civile d’exécution, la demande d’autorisation de pratiquer des mesures conservatoires (saisie, hypothèque…) est formée par requête.
La requête doit comporter les mentions prévues par les articles 54 et 57 du code de procédure civile.
En pratique, lorsque l’administration fiscale demande l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire c’est bien souvent le comptable chargé d'un pôle de recouvrement spécialisé (le « PRS ») qui adresse une requête au juge de l’exécution.
C’est l’arrêté du 23 juillet 2010 ((NOR : BCRE1018230A, publié au JORF n°0200 du 29 août 2010) portant création de Pôles de Recouvrement Spécialisé dans les services déconcentrés de la Direction Générale des Finances Publiques qui fixe la compétence territoriale des Pôles de Recouvrement Spécialisés.
Aux termes son article 2 : « Les pôles de recouvrement spécialisé ont pour ressort territorial le département (…) ».
L’article 3 précise que « le comptable chargé d'un pôle de recouvrement spécialisé est compétent pour engager ou poursuivre toute procédure visant au recouvrement des créances qu'il a prises en charge directement ou dont la responsabilité lui a été transférée par un autre comptable du département ».
En vertu de l’article 117 du code de procédure civile, le défaut de pouvoir d'une partie ou d'une personne figurant au procès comme représentant d'une personne morale constitue une nullité de fond.
4) Conséquences du défaut de capacité à agir du comptable public
Dans l’affaire visée ci-dessous, c’est le comptable public des Bouches-du Rhône (Marseille) qui a adressé au juge de l’exécution de Paris une demande d’autorisation de pratiquer une saisie-conservatoire sur le compte bancaire d’une société établie à Paris.
Le Juge de l’Exécution de Paris en a déduit qu’il est possible pour le contribuable qui souhaiterait contester la mesure conservatoire dont il fait l’objet d’invoquer, à l’appui d’une demande en nullité de la requête, l’incompétence territoriale du comptable public qui a formé la requête auprès du juge de l’exécution.
En suivant ce raisonnement, il s’avère que si le comptable public du pôle de recouvrement spécialisé n’avait pas le pouvoir de présenter la requête devant la juge de l’exécution la requête est susceptible d’être annulée.
En conséquence de l’annulation de la requête, l’ordonnance rendue par le JEX qui vise et adopte les motifs de la requête se trouve dépourvue de motivation et rendue sur demande d’une personne qui n’avait pas la capacité à agir.
La sanction est la rétractation de l’ordonnance conformément à l’article 497 du code de procédure civile.
Voir JEX PARIS n° RG 22/81928 du 28 février 2023
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