La Cour de cassation estime que la juridiction saisie d’une demande d’effacement de fichier doit analyser son opportunité à l’aune de la finalité de la conservation qu’il lui revient de motiver au regard des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. Cass. Crim., n°17-84674, 10 avril 2018, publiée. « Vu l'article 7-2 du décret n° 87-249 du 8 avril 1987 relatif au fichier automatisé des empreintes digitales géré par le ministère de l'intérieur, modifié par le décret n° 2015-1580 du 2 décembre 2015 ; ;(…) Mais attendu qu'en opposant à la demande de l'intéressé des motifs d'irrecevabilité non prévus par le décret susvisé, alors qu'il lui appartenait de vérifier si l'enregistrement des empreintes répondait aux conditions réglementaires, et d'apprécier si leur conservation était ou non nécessaire pour des raisons liées à la finalité du fichier au regard notamment de la nature ou des circonstances de la commission de l'infraction, ou de la personnalité de la personne concernée, le président de la chambre de l'instruction a méconnu ses pouvoirs ; D'où il suit que la cassation est encourue ; ». Le Fichier Automatisé des Empreintes Digitales (FAED), créé par  le décret n°87-249 du 8 avril 1987 est actuellement mis en œuvre par le service central de la police technique et scientifique au ministère de l’intérieur et placé sous le contrôle du procureur général près la cour d’appel de Paris. Commun à la police et à la gendarmerie nationale, le FAED est un fichier de police judiciaire dit « d’identification », qui ne peut être utilisé à des fins de police administrative mais ayant pour finalités de faciliter la recherche, par les services de police judiciaire, des auteurs de crimes et de délits et de faciliter la poursuite, l’instruction et le jugement des affaires dont l’autorité judiciaire est saisie. Plus précisément, il permet d’identifier les auteurs de crime ou de délit, par comparaison biométrique des traces et empreintes relevées sur des lieux de commission d'infractions, et de s’assurer de la véritable identité des personnes mises en cause dans une procédure pénale ou condamnées à une peine privative de liberté, afin d’éviter les erreurs judiciaires et de détecter les fausses identités et les cas de récidive. Ce fichier qui concerne presque 5 millions de personnes, selon la CNIL, a récemment fait l’objet d’une modification pour se conformer avec une condamnation européenne (CEDH, 5e sect., 18 avr. 2013, n° 19522/09, M. K. c/ France, Procédures n°6, juin 2013, comm. 197, A.-S. Chavent-Leclère) qui avait estimé que le droit à l’effacement était insuffisamment assuré et portait atteinte à la vie privée. Depuis le 1er mars 2017, date d’entrée en vigueur de l’article 5 du décret n° 2015-1580 du 2 décembre 2015 modifiant le décret n°87-249 du 8 avril 1987, la durée de conservation maximale des traces et empreintes ainsi que des informations liées varie en fonction de la gravité de l’infraction, de la qualité de la personne concernée (dont les mineurs) et du caractère national ou international de la procédure et s’échelonne entre 10 et 25 ans. L’espèce du 10 avril 2018 constitue une application concrète de ce droit à l’effacement que la Cour de cassation estime devoir être respecté avec rigueur. Dans le cadre d’une enquête ouverte sur une plainte pour dénonciation calomnieuse à son encontre, le mis en cause faisait l’objet d’un relevé d’empreintes digitales. Il demandait par la suite au procureur de la République l’effacement de ses empreintes, qui rejetait sa demande et le forçait, conformément à la procédure (D. n°87-249 du 8 avril 1987, art. 7-1), à saisir le juge des libertés et de la détention dans le même sens. Il portait le contentieux devant le président de la chambre de l’instruction qui refusait à son tour également d’accéder à sa requête estimant que sa demande d’effacement n’était pas fondée sur un motif légal, en ce sens qu’il ne fournissait, à l’appui de sa demande, aucun élément objectif sur les circonstances de la commission de l’infraction et sur sa personnalité. Cassant cette décision, les Hauts magistrats rappellent que tout fichier a pour seul fondement de son existence sa finalité et pour unique modalité de son déploiement sa proportionnalité. Sur le fond, la demande d’effacement se mesure à la nécessité de la conservation confrontée à la finalité du fichier et sur la forme, la charge de la preuve n’incombe pas au demandeur mais bien aux magistrats qui doivent être en mesure d’assurer concrètement l’effectivité du droit à l’oubli. Cette décision, dont on regrette qu’elle ne soit pas prise au visa de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, devance à l’évidence une condamnation de Strasbourg et  démontre que l’effacement n’a pas à être conditionné à une décision de non-lieu ou de relaxe définitive.