L’arrêt rendu le 22 novembre 2018 par la Cour d’appel de PARIS vient rappeler l’importance de l’obligation de loyauté au centre du contrat d’agent commercial.
On sait qu’à la rupture d’un contrat d’agent commercial, les sociétés mandantes ne peuvent échapper au versement de l’indemnité de fin de contrat de l’agent qu'en démontrant la faute grave de ce dernier.
La faute grave n’est pas définie par la loi mais par les juges du fond.
La Cour de cassation rappelle de manière habituelle, que seuls les juges du fond pouvaient apprécier souverainement la gravité de la faute (Cass Com 11 décembre 2001, n°98-17.921).
La faute grave a été définie par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 octobre 2002 (n°00-18.122) comme une faute « portant atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et rendant impossible le maintien du lien contractuel ».
Récemment, dans un arrêt du 15 mars 2017 (n°15-20.577), la chambre commerciale de la Cour de cassation a par exemple jugé que des négligences répétées d’un agent ayant contribué à dégrader l’image du mandant caractérisent une faute grave. La cour d’appel n’avait pas à rechercher « si la rupture présentait un caractère disproportionné au regard de la perte de chiffre d’affaires qui serait résulté des faits retenus »pour caractériser la faute grave de l’agent. En effet, les négligences à répétition et le comportement de l’agent portaient atteinte « à la finalité commune du mandat d’intérêt commun » et justifiaient que le contrat soit rompu pour faute grave et qu’aucune indemnisation ne lui soit allouée.
Elle a pu également considérer que constitue une faute grave : la vente de produits concurrents du mandant (Cass Com, 29 mars 2017, n°15-26.476). Dans cet arrêt, la Cour de cassation devait considérer que l’agent commercial avait commis une faute grave car il représentait deux sociétés concurrentes sans avoir demandé l’autorisation de la première société mandante.
Ce dernier point mérite que l'on s'y attarde.
En effet, les contrats d'agents stipulent de manière régulière que la représentation d'une entreprise concurrente sera soumise à l'information et/ou l'autorisation du mandant.
Ces clauses sont la reprise, tout à fait logique de l'article L.134-3 du Code de commerce qui précise que l'agent commercial peut accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants, mais il ne peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses mandants sans accord de ce dernier.
Ces dispositions sont essentielles, car elles incarnent et rappellent une obligation fondamentale qui s'impose aussi à l'agent à savoir la loyauté.
Certaines branches d'activité sont extrêmement concurrentielles et il incombe à l'agent d'informer son mandant de la prise dans son portefeuille d'agent de nouveaux clients présentant une activité identique et en concurrence directe avec son mandant.
La Cour de cassation a ainsi considéré, de manière très juste que constitue une faute grave : la vente de produits concurrents du mandant (Cass Com, 29 mars 2017, n°15-26.476).
Dans cet arrêt, la Cour de cassation a estimé que l’agent commercial avait commis une faute grave car il représentait deux sociétés concurrentes sans avoir sollicité l’autorisation de la première société mandante.
En effet, l’article L 134-3 du Code de commerce dispose « l’agent commercial peut accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants. Toutefois, il ne peut accepter la représentation d’une entreprise concurrente de celle de l’un de ses mandants sans accord de ce dernier ».
De ce simple fait, le comportement de l’agent était constitutif d’une faute grave qui justifiait la cessation de son contrat, ce qui ne lui ouvrait nullement droit à une indemnité.
C'est avec beaucoup de justesse que la Cour de Cassation rappelle les obligations de l'agent, mais on regrettera la motivation de la haute juridiction qui aurait pu rappeler de manière ferme l'obligation de loyauté de l'agent qui transparait à travers cette obligation édictée à l'article L 134-3 du Code du Commerce.
C’est en quoi l’arrêt de la Cour d’appel de PARIS du 22 novembre 2018 rendu par la 5èmeChambre présente une motivation limpide et souhaitable.
Elle rappelle que constitue une faute grave de l’agent rendant impossible le maintien de la relation contractuelle le fait de contracter avec une société concurrente sans en informer ni recueillir l’autorisation du mandant.
En l’espèce cette obligation était rappelée au contrat d’agent.
La Cour d’appel vise très justement une violation d’une de ses obligations contractuelles, mais aussi et surtout de son obligation fondamentale de loyauté.
En effet, cette obligation de loyauté qui est d’ailleurs mutuelle dans la relation contractuelle nouée du fait de la signature d’un contrat d’agence est fondamentale.
Son non-respect par l’agent commercial qui contracte sciemment avec une société concurrente sans en informer son mandant constitue une faute grave privative de toute indemnité de rupture.
La motivation retenue par la Cour d’appel est exemplaire en ce qu’elle vise l’obligation de loyauté.
L’obligation fondamentale de loyauté étant violée par l’agent, la relation contractuelle ne pouvait donc se maintenir du fait de son comportement constitutif d’une faute grave.
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