Le projet de Loi Sapin 2, actuellement en discussion devant le Parlement, contient une disposition destinée à encadrer la notion de faute de gestion.

Selon l’article L 651-2 du Code de commerce, « lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ».

Faute de définition légale, c’est la jurisprudence qui a précisé, cas par cas, ce qu’était et n’était pas une faute de gestion. L’éventail des faits susceptibles d’être qualifié comme tel est très large. Il va de la simple négligence aux manœuvres frauduleuses.

Ainsi, par exemple, ont ainsi été considérés comme des négligences fautives :

  • le fait de s’entourer de collaborateurs incompétents ( com. 24 octobre 1995 n° 1859 D) ;
  • l’excès de confiance en ne vérifiant pas les stocks dont le contrôle, laissé à l'appréciation d'un employé dont les domaines d'activité n'avaient pas été définis, s'est avéré inexistant (CA Paris CA Paris 22 juin 2001 n° 00-21262) ;
  • le fait pour un cogérant de se désintéresser de la gestion administrative ( Cass. com. 8 octobre 2003 n° 1405 FD) ;
  • le fait pour un administrateur de SA de manquer à son devoir de contrôle et de surveillance en laissant perdurer une exploitation déficitaire tout en tolérant le versement d'importantes rémunérations au bénéfice de son époux, président et directeur général de la société ( Cass. com. 10 mars 2004 n° 488 FS-D).

Faire supporter à un dirigeant tout ou partie de l’insuffisance d’actif en cas de simple négligence est dorénavant considéré comme faisant peser un risque excessif sur les entrepreneurs et de nature à les dissuader d’entreprendre.

Le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dit projet de loi Sapin 2, prévoit donc d’ajouter un alinéa 2 à l’article L 651-2 du Code de commerce rédigé comme suit :

« Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée. »

Il s’agit d’exclure toute responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif du dirigeant qui commet une simple négligence dans la gestion de son entreprise.

Cette disposition, dont la motivation est louable et qui doit être approuvée, risque toutefois de générer des difficultés d’application faute de définition légale de la « négligence ».

Le débat judiciaire va en effet nécessairement se déporter de la notion de faute de gestion à celle de négligence. Il va non seulement falloir définir les contours précis de cette « simple négligence » et par là, la distinguer des autres « fautes légères » qui elles seront toujours de nature à engager la responsabilité de leurs auteurs.

Quoi qu’il en soit, il vaudra mieux être négligent qu’imprudent ou imprévoyant.

DT