Un arrêt de la Cour de cassation du 4 septembre 2024 rappelle les limites de la déduction des prestations reçues par la victime, notamment la prestation de compensation du handicap (PCH), afin de fixer l'indemnisation due par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).

Dans cette affaire, une victime a subi de graves séquelles après une radiothérapie.

L'ONIAM fait grief à l'arrêt d'une cour d'appel de le condamner à payer à la victime un capital au titre de l'assistance tierce personne permanente, sans déduction de la prestation de compensation du handicap (PCH) pour la période postérieure à la date à laquelle cette prestation a pris fin.

Le moyen de l'ONIAM soulève les dispostions de l'article L. 1142-17 du code de la santé publique selon lesquelles doivent être déduites de l'indemnisation mise à la charge de l'ONIAM au titre de la solidarité nationale, les prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, ainsi que les indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice.

La PCH allouée par le département peut être affectée à des charges liées à un besoin d'aides humaines même celles apportées par les aidants familiaux. La PCH est allouée sans condition de ressources mais son montant est fixé par référence aux ressources de la victime. Elle peut être suspendue ou interrompue lorsqu'il est établi que son bénéficiaire ne l'a pas consacrée à la compensation des charges pour lesquelles elle lui a été attribuée.

Pour la Cour de cassation la PCH a le caractère d'une prestation indemnitaire car elle n'est pas attribuée sous condition de ressources, et elle répare certains postes de préjudices indemnisables en fonction des besoins individualisés de la victime d'un handicap. 

En conséquence, les sommes versées au titre de la PCH par le département viennent en déduction des sommes dues à la victime par l'ONIAM au titre du poste de frais d'assistance par tierce personne.

Le respect du principe de la réparation intégrale implique, en conséquence, que tant la PCH déjà perçue que celle à percevoir soit déduite des sommes allouées à la victime. 

Le juge du fond doit donc rechercher si le handicap de la victime conduit au maintien du versement de la PCH pour l'avenir et de fixer le montant de la rente due par l'ONIAM, qui ne peut agir en restitution des sommes qu'il aurait versées indûment à une victime, en prévoyant la déduction de la PCH qui serait allouée.

Malgré ces principes, dans son arrêt du 4 septembre 2024 la Haute juridiction soulève que la déduction par le juge du fond de la PCH se heurte à trois difficultés de mise en oeuvre notamment au delà de la date limite à laquelle cette prestation a été allouée.

En premier lieu, la PCH n'a aucun caractère obligatoire pour la victime qui n'est pas tenue d'en demander le renouvellement, son montant est fixé par référence aux ressources de la victime pour une période déterminée et elle peut être suspendue ou interrompue pour les motifs précités. La Cour de cassation a ainsi jugé, dans le cas d'une indemnisation versée par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI), que le juge ne peut déduire la PCH de l'indemnisation due au titre de l'assistance par une tierce personne pour l'avenir, au-delà de la date à laquelle elle a été allouée, en tenant compte de la possibilité donnée à celui-ci, en application de l'article 706-10 du code de procédure pénale, de demander le remboursement total ou partiel de l'indemnité allouée à la victime, obtenant, postérieurement au paiement, du chef du même préjudice, une des prestations ou indemnités visées à l'article 706-9 du même code.

En deuxième lieu, les juges du fond apprécient si la réparation du préjudice de la victime doit prendre la forme d'un capital ou d'une rente.

En troisième lieu, la victime ne doit pas se trouver pour l'avenir contrainte de produire régulièrement des justificatifs relatifs à la perception ou non d'une prestation et, le cas échéant, à son montant. La Cour de cassation a ainsi jugé que le versement d'une rente au titre de l'assistance par une tierce personne ne peut être subordonnée à la production annuelle, par la victime, auprès du FGTI, d'une attestation justifiant qu'elle ne perçoit pas la PCH.

La Cour de cassation rejette ainsi le pourvoi de l'ONIAM et approuve la cour d'appel qui a retenu à bon droit que la prestation de compensation du handicap ne pouvait être déduite au-delà de la période pour laquelle elle a été attribuée à la victime.

Dimitri PHILOPOULOS

Avocat à la Cour de Paris et Docteur en Médecine

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