I. Introduction

Lorsqu'il y a une pathologie du placenta, la famille d'un enfant atteint d'une infirmité motrice cérébrale ( paralysie cérébrale ), se pose des questions sur la possibilité d'une mauvaise prise en charge par le gynécologue-obstétricien et/ou la sage-femme de la maternité.

L'avocat en droit de la santé doit conseiller la famille de la victime sur l'opportunité d'engager une action en justice.

Ces observations ont pour vocation de donner des informations à la famille de la victime d'une infirmité motrice cérébrale née dans le contexte de deux pathologies du placenta : l'hémorragie rétroplacentaire ou le placenta praevia. 

II. Placenta praevia 

Normalement, le placenta est situé bien au-dessus du col.

Cependant parfois il se trouve dans le segment inférieur de l'utérus avant la présentation fœtale. Le placenta est dit marginal quand il affleure le col et recouvrant quand il le recouvre complètement.

Plus spécifiquement, il existe quatre formes anatomiques de placenta praevia de gravité croissante : latéral, marginal, recouvrant partiel et recouvrant total.

Il convient de rappeler qu'un placenta bas inséré en début de grossesse peut retrouver une position normale au troisième trimestre en raison de la croissance de l'utérus vers le bas au cours de la grossesse.

Le placenta praevia peut être à l'origine d'une hémorragie, une rupture prématurée des membranes et un accouchement prématuré. Il peut être compliqué par un hématome rétroplacentaire, une insertion trop profonde du placenta ( placenta accreta ) ou des vaisseaux praevia du cordon ombilical.

Lors d'une grossesse à terme, la nécessité de recours à une césarienne avant le travail dépend de la distance entre l'orifice interne du col et le bord inférieur du placenta au moment de la dernière échographie avant l’accouchement ainsi que des caractéristiques cliniques comme la présence d’une orientation instable ou d’une hémorragie.

La voie basse est préférable lorsque la distance entre l'orifice interne du col et le bord inférieur du placenta est supérieure à 20 millimètres. Lorsque cette distance est inférieure à 20mm, la voie basse reste possible donc une épreuve du travail est licite. En revanche, la césarienne devient nécessaire en cas de placenta qui recouvre le col à quelque degré que ce soit.

III. Hématome rétroplacentaire

L'hématome rétroplacentaire est le décollement prématuré du placenta lorsque celui-ci est normalement inséré dans l'utérus. 

Il y a un grand nombre de facteurs de risque de l'hématome placentaire comme par exemple un traumatisme abdominal, une hypertension ou un diabète de la grossesse.

L'hématome rétroplacentaire s'installe souvent dans le dernier trimestre surtout les dernières semaines avant l'accouchement.

Il peut aussi s'installer lentement avec une réduction de la croissance fœtale et de la quantité du liquide amniotique.

L'hématome empêche des échanges entre la mère et le fœtus, comme la transmission de l'oxygène vers le fœtus, ce qui peut entraîner une souffrance fœtale par asphyxie pendant le travail d'accouchement.

L'hématome rétroplacentaire peut se manifester par des saignements avant ou pendant le travail. Cependant le sang peut rester entre le placenta et la paroi de l'utérus et ne pas s'extérioriser.

Dans ces conditions, la seule manifestation peut être des anomalies du rythme cardiaque fœtal.

IV. Rythme cardiaque fœtal

Les ralentissements tardifs permettent de soupçonner une pathologie placentaire telle qu'un hématome rétroplacentaire.

Les ralentissements tardifs débutent par une pente lente et progressive. Ils sont décalés par rapport à la contraction utérine et persistent après la contraction utérine.

Selon les recommandations de la pratique clinique du Collège national des gynécologues-obstétriciens français, en cas d'association à un tracé aréactif (absence d’accélérations) avec variabilité minime (moins de 6 battements par minute), la définition des ralentissements tardifs inclut les amplitudes inférieures à 15 bpm donc des ralentissements peu profonds.

Des ralentissements tardifs non répétés sont néanmoins à risque d'acidose ce qui nécessite une action correctrice et si les anomalies persistent la mise en œuvre un moyen de surveillance de deuxième ligne.

Des ralentissements tardifs répétés avec accélérations absentes ou variabilité minime (moins ou égale à 5 bpm) traduisent un tracé à risque important d'acidose. Dans ces cas, une décision d’extraction rapide devrait être prise étant ajouté que l’utilisation des moyens de surveillance de deuxième ligne permettant d’exclure une acidose fœtale est possible à la condition qu'elle ne retarde pas l’extraction.

Les ralentissements tardifs suivis d'une tachycardie, d'une perte des accélérations et d'une diminution de la variabilité est un tracé à risque majeur d'acidose fœtal nécessitant une intervention obstétricale immédiate par césarienne ou forceps en fonction des conditions obstétricales de la dilatation du col et du niveau de la descente de la présentation du fœtus. 

Bien qu'il s'agisse d'une étude cas témoin, Ekengard et collègues ont étudié pour la première fois la valeur des accélérations sporadiques ( sans rapport aux contractions utérines ) et périodiques ( survenant pendant les contractions ).

La présence d'accélérations sporadiques était associée à un pH supérieur à 7,15 à la naissance, mais celle d'accélérations périodiques ne l'était pas.

Cependant 22% et 40% des fœtus avec un pH supérieur à 7,15 n'avaient pas d'accélérations sporadiques pendant les premier et deuxième stades du travail respectivement.

Donc, la présence d'accélérations sporadiques est rassurante mais l'absence de celles-ci est d'une valeur pronostique incertaine ( cette donnée a déjà été intégrée dans les recommendations de la pratique clinique publiées par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français ).

L'étude a également montré que seulement 20% des cas d'acidose avaient une variabilité réduite.

Ce résultat est similaire à celui rapporté par Cahill et Collègues dans une grande étude prospective ( 2018 ).

Il convient de noter que le seuil du pH choisi dans ces études était de 7,10 afin d'utiliser un pH bas mais cliniquement intéressant car le risque de séquelles d'anoxie n'est pas important laissant le temps pour intervenir en temps utile ce qui n'est pas le cas pour le choix d'un pH à 7.

Cependant, même en utilisant un déficit de base supérieur à 12 mmol/l, donc le seuil où le risque de séquelles est élevé, 58% des nouveaux-né avaient une variabilité normale supérieure à 5 battements par minute ( Williams et Gallerneau, 2003 ).

En revanche, depuis quelques années plusieurs études ont montré que l'aire totale des ralentissements avait la meilleure valeur prédictive.  

Une variabilité normale et des accélérations demeurent rassurantes naturellement mais ces dernières études rappellent la place centrale du ralentissement pour l'interprétation du rythme cardiaque fœtal. 

V. Traitement par hypothermie :

Il convient de rappeler que depuis 2010, le nouveau-né victime d'une encéphalopathie anoxo-ischémique est plongé sous hypothermie thérapeutique contrôlée pendant 72 heures.

Ce traitement par cryothérapie a pour objet d'empêcher la seconde vague de mort des cellules du cerveau du nouveau-né.

Le bénéfice thérapeutique considérable a été mis en évidence par plusieurs essais randomisés contrôlés et leur méta-analyse. 

Il n'en demeure pas moins que cette attente de 72 heures est une période difficile pour les parents.

VI. Préjudices

La nomenclature Dintilhac permet de définir les différents postes de préjudice d'une victime atteinte d'une infirmité motrice cérébrale / paralysie cérébrale avant et après la consolidation des séquelles.

Parmi ces postes de préjudice de l'enfant atteint d'une paralysie cérébrale, la tierce personne fait l'objet de contestations fréquentes.

Par exemple, les besoins en tierce personne peuvent être réduits au motif que l'enfant sans handicap a aussi besoin de l'aide de ses parents. Fort heureusement, la jurisprudence actuelle est devenue plus stricte dès lors que le déficit séquellaire de la paralysie cérébrale modifie radicalement la nature de la présence parentale.

D'autre part, il y a une différence de traitement de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ( AEEH ) entre les deux ordres de juridiction. Pour les établissements de santé privés, la Cour de cassation ne permet pas la déduction de l'AEEH de l'indemnité allouée au titre de l'assistance par tierce personne.

Il n'en va pas de même pour le Conseil d'Etat sous réserve d'une limitation importante. En effet, pour les établissements de santé publics, la haute juridiction administrative décide que cette déduction est opérée dans la mesure requise pour éviter une double indemnisation de la victime. Par suite, lorsque la personne publique responsable n'est tenue de réparer qu'une perte de chance, la déduction ne se justifie que dans la mesure nécessaire pour éviter que le montant cumulé de l'indemnisation et des prestations excède le montant total des frais d'assistance par une tierce personne.

Cette limitation conduit souvent à réduire de manière considérable le montant déduit de l'AEEH. 

VII. Demande de dossiers d'accouchement et de réanimation néonatale

Notre cabinet d'avocat a défendu plusieurs victime d'anoxie suite à des pathologies placentaires.

La première démarche de la famille de la victime d'une infirmité motrice cérébrale / paralysie cérébrale est de demander une copie du dossier d'accouchement par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à Madame ou Monsieur le Directeur de l'établissement de santé en question. 

Il faut aussi demander une copie du dossier du service de réanimation néonatale et du service de néonatologie. 

La victime peut trouver une lettre type de demande du dossier d'accouchement à cette page de notre site internet : 

https://dimitriphilopoulos.com/erreur-grossesse-accouchement-naissance/avocat-erreur-medicale-accouchement.php

Dimitri PHILOPOULOS

Avocat à la Cour de Paris et Docteur en Médecine

22 avenue de l'Observatoire - 75014 PARIS

Site internet : https://dimitriphilopoulos.com

Tél : 01.46.72.37.80