La famille de la jeune victime d'une infirmité motrice cérébrale ne manquera pas de noter quelques jugements récents relatifs aux fautes commises dans des maternités par un gynécologue-obstétricien ou une sage-femme.

Les condamnations ont naturellement pour fondement le I de l'article L.1142-1 du code de la santé publique : Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

I. Tribunal administratif de Cergy-Pontoise - 7ème chambre - 28 mars 2023

Dans une première affaire, le Tribunal administratif a condamné l'hôpital pour une négligence fautive commise par le gynécologue-obstétricien.

Dans cette espèce, le choix de recourir à une accouchement par voie basse a été pris sans que ne soit apprécié le risque de disproportion fœto-maternelle par des examens d'imagerie alors que ce risque existait compte tenu de la taille de la mère de la victime.

En effet, la mesure du diamètre bipariétal deux mois avant l'accouchement imposait un contrôle échographique avant d'autoriser un accouchement par les voies naturelles et ce contrôle n'a pas été fait.

Dès lors, en s'abstenant de procéder à ce contrôle avant de décider un accouchement par voie basse, le gynécologue-obstétricien a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'hôpital.

Pendant le travail, le rythme cardiaque fœtal était micro-oscillant sans que la mère soit mise en position latérale avec oxygénation. En outre, bien que la tête fœtale soit fixée, la poche des eaux n'a pas été rompue.   

Le rythme cardiaque de l'enfant était micro-oscillant pendant une longue période et la décision de césarienne n'a pas été prise.

Plus tard, des ralentissements tardifs ( DIP 2 ) sont apparus.

Une demi-heure plus tard, l'enfant à naître a commencé à souffrir d'asphyxie périnatale et qu'il fallait alors intervenir rapidement par une césarienne, en prévenant le pédiatre qu'une réanimation pourrait être nécessaire.

Dans ces conditions, en tentant une rotation manuelle de la tête fœtale et en prenant la décision de pratiquer une césarienne une heure plus tard, le tribunal a décidé que l'équipe obstétricale a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'hôpital.

L'enfant souffrait d'une l'encéphalopathie anoxo-ischémique sévère à la naissance, associée à une acidose métabolique profonde. Le diagnostic de paralysie cérébrale a été porté quelques années plus tard.

II. Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne - 3ème chambre - 20 janvier 2023

Dans cette espèce, la mère de la victime a débuté une première grossesse qui s'est déroulée sans particularité notable.

Le terme étant dépassé, elle a été admise en travail à la fin duquel le nouveau-né a été extrait difficilement par ventouse. 

L'état neurologique du nouveau-né était celui d'une encéphalopathie anoxo-ischémique imposant une hospitalisation en réanimation néonatale.

Vers la fin du premier stade du travail, le rythme cardiaque fœtal n'était pas normal et il évoquait une acidose fœtale en raison de l'association d'une oscillation réduite par minute et des ralentissements variables atypiques.

Suivant l'expertise, la dilatation complète imposait la sollicitation des efforts expulsifs et, en cas de non progression, le recours rapide à une extraction par instrument, la présentation de l'enfant étant à partie basse. 

Or, l'équipe médicale a réalisé un prélèvement au scalp fœtal et a laissé évoluer le travail avec la mise en place d'une perfusion de Syntocinon alors que l'activité utérine était satisfaisante.

Les efforts expulsifs ont débuté tardivement avant l'extraction fœtale par ventouse qui a duré 33 minutes.

Au total, le rythme cardiaque fœtal anormal imposait le début des efforts expulsifs qui n'ont été engagés que tardivement.

En retardant inutilement la naissance contrairement aux données acquises de la science médicale, le jugement a décidé que cette attitude doit être regardée comme une faute sur le fondement du I de l'article L.1142-1 du code de la santé publique.

III. Tribunal administratif de Cergy-Pontoise - 7ème Chambre - 10 janvier 2023

Au terme d'une grossesse sans particularité, la mère de la victime s'est rendue à la maternité où une échographie et un enregistrement du rythme cardiaque fœtal a été effectué. 

Malgré la dilatation du col à 3 centimètres, elle a été invitée par la sage-femme à regagner son domicile.

Le tribunal a précisé que dès lors qu'en cas de grossesse prolongée, le fœtus présente un risque augmenté de diminution du liquide amniotique, d'anomalies du rythme cardiaque fœtal et d'émission méconiale, le collège national des gynécologues obstétriciens français a publié les recommandations selon lesquelles une surveillance rapprochée de la mère et de l'enfant devait être mise en œuvre au terme de la grossesse et un déclenchement du travail devait être proposé.

En tout cas, en l'espèce, à la suite de l'apparition de contractions puis de saignements la mère de la victime s'est rendue à la maternité où elle a été admise en salle de travail. 

Peu après, le rythme cardiaque de l'enfant s'étant ralenti ( une bradycardie ), les sages-femmes ont appelé le médecin obstétricien de garde ainsi qu'un anesthésiste. 

La victime est née en état de mort apparente et a été immédiatement prise en charge par la sage-femme qui lui ont prodigué un massage cardiaque.

Or, sur fondant sur les constatations des experts, le tribunal a décidé que le ralentissement du rythme cardiaque aurait nécessité l'intervention immédiate d'un pédiatre et que les établissements de santé pratiquant des activités d'obstétrique sont tenus de disposer en permanence en leur sein d'un pédiatre pour intervenir immédiatement en cas d'urgence.

Dans ces conditions, l'absence de pédiatre à la maternité et l'appel tardif au SAMU alors que la fragilité de l'état de santé de l'enfant avait été identifiée lors de la bradycardie, l'hôpital a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité.

IV. Tribunal administratif de Grenoble - 5ème Chambre - 21 février 2023

Dans cette affaire, le rythme cardiaque fœtal n'a fait l'objet d'aucune surveillance en raison de l'arrêt d'enregistrement des bruits du cœur du fœtus car la mère de la victime n'était pas encore en travail. 

Le juge a néanmoins décidé que le monitoring fœtal aurait dû être poursuivi en raison de l'hyperthermie et des contractions hyperalgiques présentées à ce moment-là par Mme A et de la tachycardie fœtale.

Le juge relève également l'absence de pédiatre en salle de naissance, l'absence de reconnaissance immédiate de l'état de mort apparente de l'enfant et une voie d'administration de l'adrénaline non conforme aux recommandations.

En conséquence, sur le fondement de l'article L. 1142-1 (I) du code de la santé publique, ces manquements constituent des fautes médicales de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier.

V. Tribunal administratif de Martinique - 1ère Chambre - 29 novembre 2022

Dans cette espèce, le travail a spontanément commencé avec un rythme cardiaque fœtal sans particularité, le fœtus étant en position de siège.

Cependant, peu après, il a été constaté une bradycardie et une hypoxie fœtale en raison d'une procidence du cordon ombilical. 

Il convient de noter qu'une procidence du cordon ne peut être qualifiée d'accident médical non fautif, au sens du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans la mesure où elle s'est déclenchée spontanément et fortuitement, indépendamment de tout acte de soins prodigué pendant l'accouchement.

Ceci dit, la parturiente a alors été transférée en urgence dans une salle d'opération du bloc chirurgical où le gynécologue-obstétricien a réalisé une grande extraction du siège, permettant la naissance de la victime en état de mort apparente.

L'intubation trachéale a été mise en place à la dixième minute et de l'adrénaline lui a été administrée avec normalisation de la fréquence cardiaque ultérieurement. La victime est transférée en réanimation pédiatrique et placée sous hypothermie contrôlée thérapeutique pendant 72 heures. Elle souffre d'une encéphalopathie post anoxo-ischémique.

Le retard dans cette prise en charge du nouveau-né était une faute de nature à engager la responsabilité de l'hôpital sur le fondement de l'article L. 1142-1 (I) du code de la santé publique.

Concrètement, il s'agissait d'un défaut d'organisation des soins de la maternité à l'origine de ce retard.

VI. Demande de dossiers d'accouchement et de réanimation néonatale

Depuis plus de 25 ans, notre cabinet d'avocat a défendu plusieurs jeunes victimes de paralysie cérébrale suite à des fautes commises par un gynécologue-obstétricien ou une sage-femme.

La première démarche de la famille de la victime d'une infirmité motrice cérébrale / paralysie cérébrale est de demander une copie du dossier d'accouchement par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à Madame ou Monsieur le Directeur de l'établissement de santé en question. 

Il faut aussi demander une copie du dossier du service de réanimation néonatale et du service de néonatologie. 

La victime peut trouver une lettre type de demande du dossier d'accouchement à cette page de notre site internet : 

https://dimitriphilopoulos.com/erreur-grossesse-accouchement-naissance/avocat-erreur-medicale-accouchement.php

Dimitri PHILOPOULOS

Avocat à la Cour de Paris et Docteur en Médecine

22 avenue de l'Observatoire - 75014 PARIS

Site internet : https://dimitriphilopoulos.com

Tél : 01.46.72.37.80