Des contractions excessives de l'utérus pendant le travail obstétrical sont une cause fréquente d'encéphalopathie anoxo-ischémique pouvant évoluer vers une infirmité motrice cérébrale ( paralysie cérébrale ).

Heureusement, aujourd'hui l'enfant qui a subi un manque d'oxygène peut bénéficier à la naissance d'un traitement par hypothermie contrôlée et cette cryothérapie a montré pleinement son efficacité.

De fait, l'hypothermie thérapeutique contrôlée du nouveau-né réduit ou supprime des lésions d'anoxie subie pendant l'accouchement.

En cas de handicap résiduel après la mise sous hypothermie, les parents de la victime posent des questions à l'avocat sur la prise en charge de la naissance afin de connaître les chances de succès d'une demande en justice tendant à engager la responsabilité du gynécologue-obstétricien ou la sage-femme de la maternité.

Parfois, il peut aussi s'agir de la responsabilité de l'anesthésiste ( par exemple, en cas de retard fautif dans la mise en place de l'anesthésie pour la césarienne ) ou celle du pédiatre ( notamment, en cas de négligence pendant la réanimation néonatale ).

En droit de la santé, la victime doit prouver une faute ( une négligence, une imprudence, une inattention, etc. ) en lien de causalité avec le préjudice subi.

Or, une des causes les plus fréquentes d'un manque d'oxygène pendant l'accouchement est celle de l'hyperstimulation utérine conduisant à des contractions trop fortes ou trop fréquentes.  

I. L'avocat devant le travail déclenché

Lorsque le travail ne se déclenche pas tout seul, les contractions peuvent être déclenchées artificiellement soit pour une raison médicale ( comme une grossesse prolongée ou une rupture prématurée des membranes ) soit pour des raisons de pure convenance ( à partir de 39 semaines d'aménorrhée pour un fœtus en présentation céphalique ).

Le déclenchement n'est pas possible dans le cas où l'accouchement par les voies naturelles est gêné par un obstacle ( par exemple, un placenta praevia ) ou par une disproportion entre la taille de la tête du bébé et celle du bassin de la maman. 

Les anomalies importantes du rythme cardiaque fœtal ne permettent pas non plus de déclenchement en raison du risque d'une mauvaise tolérance aux contractions du travail.

Dès lors que l'état du col est favorable, l'oxytocine ( Syntocinon* ) est souvent utilisée pour provoquer des contractions utérines. Après la survenue des contractions régulières, une rupture artificielle de la poche des eaux est souvent pratiquée.

Pour ce qui concerne l'utilisation d'oxytocine pendant le travail déclenché, des recommandations de la Haute autorité de santé ont été publiées en 2008.

En cas de col défavorable au déclenchement pour raison médicale, une maturation du col s'impose le plus souvent par prostaglandine E2 fabriquée en laboratoire, la dinoprostone utilisée sous forme de gel Prostine* ou de dispositif Propess*.

Encore faut-il ajouter l'utilisation de la prostaglandine E1 fabriquée en laboratoire, le misoprostol pour la maturation cervicale. A cet égard, la commercialisation de l'ancienne spécialité, le Cytotec*, a été suspendue laissant sa place actuellement à l'Angusta* par voie orale avec une autorisation de mise sur le marché.

Parfois, la maturation est obtenue de manière mécanique au moyen d'un ballonnet gonflable. 

Pour dire si le col est prêt pour un déclenchement, un score clinique est utilisé, le plus souvent celui dit de Bishop qui doit être supérieur ou égal à 7.

Ce score prend en compte des critères du col à savoir la dilatation, l'effacement, la consistance et la position ainsi qu'un critère sur le niveau de la tête du bébé.

En cas de col qui n'est pas prêt, il y a un risque d'échec du déclenchement voire d'une asphyxie fœtale.  

II. L'avocat devant la gestion du travail spontané

Le travail obstétrical commence par des contractions régulières et douloureuses qui provoquent des modifications du col.

Ce diagnostic du début du travail est important car il signale le point de départ pour l'appréciation de l'avancement du travail et celui du début de la surveillance renforcée du fœtus et de la maman.

Le premier stade du travail concerne la période de la dilatation du col et le deuxième stade celle de la descente et l'expulsion du bébé.

Le premier stade comprend une phase latente, plus lente, allant des premières modifications du col jusqu'à une dilatation de 5 centimètres et, par la suite, une phase active, plus rapide, qui se termine avec la dilatation complète.

Afin de diriger le travail spontané, la sage-femme de la maternité se sert d'une perfusion de l'oxytocine ( Syntocinon* ) dont les nouvelles recommandations du Collège national des sages-femmes de France ( CNSF ) et du Collège national des gynécologues et obstétriciens français ( CNGOF ) ont été publiées en 2017.

Cette hormone fabriquée en laboratoire est administrée sous forme de perfusion dont une dose initiale faible de 2 milli-unités internationales (mUI) par minute augmentée toutes les 30 minutes de 2 mUI par minute jusqu'à ce que des contractions satisfaisantes soient obtenues, donc 3 à 5 contractions pour une période de 10 minutes, étant précisé que la dose maximale est de 20 mUI par minute.

Suivant ces recommandations pour la pratique clinique, la phase de latence du premier stade du travail ne nécessite pas habituellement d'intervention afin de respecter l'importance des modifications physiologiques du col pendant cette phase.

Selon les mêmes recommandations, lors de la phase active du premier stade, une dilatation inférieure à 1 centimètre pour 4 heures ( lorsque le col est entre 5 et 7 centimètres ), ou inférieure à 1 centimètre pour 2 heures ( au-delà de 7 centimètres ), traduit une dilatation anormalement lente qui nécessite éventuellement une gestion du travail par la rupture de la poche des eaux suivie, après un délai d'au moins une heure, par l'administration d'oxytocine.

Le deuxième stade du travail peut nécessiter le renforcement des contractions après deux heures en cas d'absence de descente de la tête du bébé à naître. En tout cas, après la descente, la durée des poussées de la maman doit être strictement limitée.

Enfin, il y a un lien entre la dose d’oxytocine utilisée pendant le travail et le risque d'une hémorragie pendant la délivrance du placenta après la naissance du bébé d'où l'importance des recommandations françaises qui tendant à encadrer les doses.

III. Questions des parents sur la prise en charge de l'hyperstimulation utérine

L'analyse porte sur plusieurs éléments médico-légaux donc on se bornera à soulever quelques-uns ici.

L'avocat en droit de la santé doit vérifier que le déclenchement pour raison médicale est indiqué. Il doit aussi vérifier qu'il n'existe pas de contre-indication. Une maturation du col sera nécessaire en cas de score de Bishop inférieur à 7.

En cas de déclenchement programmé, donc pour raison de convenance, il faudra vérifier qu'il n'existe pas de contre-indication et que le col y est prêt.

Encore faut-il vérifier le consentement libre et éclairé de la maman suivant le modèle déposé par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français.

La rupture de la poche des eaux ne doit pas être pratiquée dans le cas où tête fœtale serait haute car il y a un risque de la chute en avant du cordon ombilical pouvant induire un manque d'oxygène grave avec nécessité d'une césarienne urgente code rouge.

En cas de gestion du travail, l'avocat en droit médical doit également vérifier que la dose d'oxytocine est respectée et qu'il n'y a pas d'augmentation de la dose devant une activité utérine satisfaisante de 3 à 5 contractions pour 10 minutes.

En cas de contractions satisfaisantes et/ou d'une bonne dilatation, la perfusion d’oxytocine peut être simplement diminuée.

En revanche, en cas de contractions trop fréquentes conduisant à des anomalies du rythme cardiaque fœtal, la perfusion de Syntocinon* doit être arrêtée. Parfois, un médicament comme la trinitrine ( Nitronal* ) doit être administré en intraveineuse pour supprimer rapidement les contractions.

Naturellement, il en va de même dans le cas où l'utérus pourrait se contracter sans se relâcher car cette situation est particulièrement dangereuse.

L'avocat spécialiste doit ainsi être attentif à la dose d'oxytocine, à la fréquence des contractions et à la qualité du relâchement entre les contractions. Ces éléments sont à confronter à la tolérance fœtale au travail.

Cette tolérance est traduite par le rythme cardiaque fœtal qui doit être analysé selon la classification du Collège national des gynécologues et obstétriciens français, laquelle distingue les tracés suivant le risque d'acidose fœtale.

Le risque d'acidose fœtal permet de connaître le degré d'urgence d'une éventuelle décision de césarienne selon les codes couleur actuellement utilisés dans de nombreuses maternités en France.

IV. Le dossier médical est nécessaire pour répondre aux questions des parents

Le professionnel du droit restera attentif devant le risque d'un manque d'oxygène consécutif à une hyperstimulation utérine.

L'avocat spécialiste doit analyser le dossier de la maternité afin de répondre aux questions des parents sur la conformité de la prise en charge de leur enfant et ainsi sur l'opportunité d'engager une action en justice afin d'indemnisation du préjudice subi. 

Naturellement, pour que l'avocat puisse effectuer cette analyse, il a besoin d'analyser le dossier médical.

En conséquence, la famille de la victime d'une infirmité motrice cérébrale subie pendant la naissance doit demander une copie du dossier d'accouchement ainsi que des dossiers du service de réanimation néonatale et du service de néonatologie. 

La famille de la victime peut trouver une lettre type pour la demande du dossier d'accouchement à cette page du site internet de notre cabinet d'avocat : 

https://dimitriphilopoulos.com/erreur-grossesse-accouchement-naissance/avocat-erreur-medicale-accouchement.php

Il ne faut pas oublier de demander également le compte rendu du service de réanimation néonatale ( où l'enfant a reçu le traitement par hypothermie ) et celui du service de néonatalogie.

Dimitri PHILOPOULOS

Avocat à la Cour de Paris et Docteur en Médecine

22 avenue de l'Observatoire - 75014 PARIS

https://dimitriphilopoulos.com

Tél : 01.46.72.37.80