Vingt ans après la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale qui a fait entrer la résidence alternée dans le Code civil, la résidence alternée est-elle le mode de résidence privilégié dans les familles séparées ?
En cas de séparation parentale, il y a une tendance à considérer que l’intérêt de l’enfant commande de privilégier un temps de présence aussi équilibré que possible auprès des deux parents.
Néanmoins alors que 76 % des français se disaient favorables à la mise d’une résidence alternée en cas de séparation des parents, selon un sondage de l’Institut français d’opinion publique réalisé en décembre 2017, en pratique seuls 12 % des parents séparés vivent en résidence alternée.
Cette part d’enfants alternants en France apparaît faible par rapport à celle d’autres pays européens tels que la Belgique ou la Suède.
A la lecture des décisions de justice récentes rendues en matière d’exercice de l’autorité parentale, la résidence alternée est présentée comme le mode de résidence à privilégier pour l’enfant, dès lors que plusieurs conditions matérielles et affectives sont réunies :
- 1°) La résidence alternée ne pourra être mise en place que si les domiciles des deux parents sont relativement proches et permettent à l’enfant d’effectuer des trajets relativement jusqu’à son établissement scolaire. - 2°) Le critère de l’âge de l’enfant est souvent apprécié de manière subjective par les Juges mais, bien souvent, la résidence alternée n’est pas mise en place avant les 3 ans de l’enfant, voire parfois 5 ou 7 ans. - 3°) Les conditions d’accueil, de disponibilité et d’implication de chacun des parents sont également des éléments déterminants qui seront étudiés par le Juge pour statuer sur la mise en place ou non d’une résidence alternée. - 4°) L’existence d’un conflit parental est un élément qui justifie parfois le refus de la résidence alternée, bien que de nombreuses juridictions considèrent à contrario que l’alternance « est de nature à réduire les conflits liés à l’exercice d’un droit de visite et d’hébergement » ou un « facteur d’apaisement des rivalités conjugales », allant même jusqu’à considérer que refuser la mise en place d’une résidence alternée au motif que le conflit conjugal est trop important revient à inciter le parent réfractaire à alimenter les rivalités.
Les décisions rendues au cours des années 2021 et 2022 montrent qu’au-delà du maintien des relations personnelles avec l’enfant mineur en cas de séparation des parents, une co-parentalité équilibrée est recherchée.
La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 1er juillet 2021, n° 20/12170 a considéré que :
« La mise en place d’une résidence en alternance peut être tout à fait bénéfique pour l’enfant en lui permettant de développer avec chacun de ses parents de réelles relations et de continuer à se construire de la manière la plus équilibrée possible, en se nourrissant des apports spécifiques transmis par son père et par sa mère, un tel objectif ne pouvant être atteint que dans le cadre de relations fréquentes et régulières allant au-delà de simples hébergements de fins ou de milieux de semaine ».
En l’espèce, la cour d’appel de Paris avait par ailleurs relevé que les conditions matérielles et affectives nécessaires à la mise en place d’une résidence alternée étaient réunies (par exemple : la relative proximité des domiciles parentaux, l’âge de l’enfant, la disponibilité suffisante des parents et leur volonté d’implication dans l’éducation de leur fille).
La Cour d’appel de Besançon, dans un arrêt rendu le 24 février 2022 a considéré que la résidence alternée peut être appréhendée comme le vecteur de la co-parentalité après la séparation conjugale, en permettant à l’enfant de pérenniser le double ancrage identitaire lors de sa construction. Autrement dit, la résidence alternée est considérée comme l’instrument de coopération nécessaire entre les deux parents au seul bénéfice de l’enfant commun.
De telles décisions, qui sont de plus en plus courantes et motivées, vont dans le sens de la Convention internationale des droits de l’Enfant qui consacre en son article 9.3 le droit pour l’enfant d’entretenir des relations personnelles avec ses deux parents, et en son article 18 le principe selon lequel les parents ont une responsabilité commune dans l’éducation de leur enfant.
Néanmoins vous l’aurez compris, la fixation d’une résidence alternée n’est jamais évidente et repose sur des critères qui fluctuent selon les juridictions.
Si vous êtes séparés et qu’aucun jugement n’a encore été rendu, en cas de conflit, il est préférable de s’adresser à un avocat qui pourra vous conseiller sur le mode de résidence qui conviendra à votre enfant et qui vous aidera à constituer votre dossier en vue de saisir le Juge aux affaires familiales.
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