Le régime applicable aux effacements des mentions de condamnations du casier judiciaire national diffère qu’il s’agisse des bulletins n°2 et n°3 (1) ou du bulletin n°1 (2). 

 

1. BULLETINS N°2 & N°3 DU CASIER JUDICIAIRE

Les bulletins n°2 et n°3 peuvent être effacés à la demande du justiciable, on parle alors de demande de dispense d’inscription et d’exclusion d’une mention de condamnation (1.1). En l’absence de demande, un effacement intervient de plein droit par l’écoulement du temps (1.2). 

1.1. Les dispenses d’inscription et exclusions de mentions de condamnations des bulletins n°2 et n°3 

Les articles 775-1 et 777-1 du code de procédure pénale prévoient la possibilité pour le justiciable de demander au tribunal qui prononce une condamnation d’exclure expressément sa mention au bulletin n°2 ou au bulletin n°3 soit dans le jugement de condamnation, soit par jugement rendu postérieurement sur la requête du condamné. 

En cas de demande à l’audience on parle de demande de dispense de d’inscription d’une mention de condamnation ou couramment de « dispense de B2 (ou de B3) ». 

En cas de requête ultérieure, il faut appliquer la procédure des articles 702-1 et 703 du code de procédure pénale. La requête est adressée, selon le cas, au procureur de la République ou au procureur général qui s'entoure de tous les renseignements utiles, prend, s'il y a lieu, l'avis du juge de l'application des peines et saisit la juridiction compétente. La demande ne peut être portée devant la juridiction compétente qu'à l'issue d'un délai de six mois après la décision initiale de condamnation, puis tous les six mois en cas de refus. La juridiction compétente est celle qui a prononcé la condamnation ou, en cas de pluralité de condamnations, la dernière juridiction qui a statué (sauf en cas de condamnation par la cour d’assises, dans ce cas c’est la chambre de l’instruction de la cour d’appel qui est compétente). La juridiction est alors composée « à juge unique » (sauf exceptions) et statue en chambre du conseil.  

L'exclusion de la mention d'une condamnation au bulletin n° 2 emporte relèvement de toutes les interdictions, déchéances ou incapacités de quelque nature qu'elles soient résultant de cette condamnation. 

Cette possibilité n’est pas ouverte à tous les justiciables. Il n’est en effet pas possible de solliciter une telle mesure s’agissant d’une mention afférente aux procédures visées par l’article 706-47 du code de procédure pénale, listant des infractions commises sur des mineurs et des infractions de nature sexuelle. Cette interdiction a été instituée par la loi du 9 mars 2004 et ces dispositions ont été jugées plus sévères par la Cour de cassation qui a en conséquence considéré qu’elles ne sont pas applicables aux faits commis avant l'entrée en vigueur de la loi (Crim. 25 avril 2006, pourvoi n°05-86.876, D. 2006. IR 1560, D. 2007. Pan. 401, obs. ROUJOU de BOUBÉE, AJ Pénal 2006. 313, obs. HERZOG-EVANS, RSC 2006. 851, note FINIELZ ; Crim. 24 mai 2006, pourvoi n°05-84.884, D. 2006. IR 1703, AJ Pénal 2006. 371 ; Crim., 24 mai 2006, pourvoi n°05-85.971, D. 2006. IR 1702).

Cette interdiction est toutefois circonscrite à l’effacement du bulletin n°2 (Crim. 22 juin 2005, pourvoi n°05-81.247,D. 2005. IR 2103, JCP. 2005. IV. 2830, AJ Pénal 2005. 376, obs. HERZOG-EVANS; Dr. pénal 2005. Comm. 164, obs. MARON). 

La Cour de cassation est venue préciser que :

  • « l'exclusion de la mention d'une condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire constitue pour les juges du fond une simple faculté de l'exercice de laquelle ils ne doivent aucun compte » (Crim. 5 février 1990, pourvoi n°89-83.652)
  • « le refus d'exclure la mention d'une condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire relève de l'exercice d'une faculté que les juges n'ont pas à motiver spécialement » (Crim. 4 mai 2006, pourvoi n°05-81.151, AJ Pénal 2006. 317, D. 2006. IR 1769 ; voir également Crim. 16 janvier 2018, pourvoi n°16-87.168, AJ Pénal 2018. 205, obs. THIERRY, RSC 2018. 480, note MISTRETTA, RSC 2018. 70, note DREYER),
  • « l'exclusion de la mention d'une condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire relevant de l'exercice d'une simple faculté, le demandeur ne saurait se faire un grief des motifs retenus par les juges au soutien de leur décision » (Crim. 4 septembre 2007, pourvoi n°06-82.785, D. 2008 ; Pan. 1022, obs. HERZOG-EVANS)

Cela permet donc un aléa judiciaire important (bien que conforme à la lettre de la loi qui n’impose aucune motivation et n’édicte aucun critère).  

L’article 775-2 du code de procédure pénale prévoit une autre possibilité s’agissant des condamnés à une peine ne pouvant donner lieu à réhabilitation de plein droit qui bénéficient, sur simple requête, de l'exclusion de la mention de leur condamnation au bulletin n° 2, à l'expiration d'un délai de vingt années à compter de leur libération définitive ou de leur libération conditionnelle non suivie de révocation, s'ils n'ont pas, depuis cette libération, été condamnés à une peine criminelle ou correctionnelle. 

Dans ce cadre, la Cour de cassation opère un contrôle plus strict et a, dans un arrêt de principe, cassé l’arrêt d’une cour d’appel qui avait rejeté la requête aux motifs que « les renseignements recueillis sur lui sont insuffisants et que la mesure n'est pas justifiée » alors même que les conditions de l’article 775-2 étaient réunies (Crim. 25 mai 2004, pourvoi n°03-87.722, D. 2004. IR 2271, JCP 2004. IV. 2520). 

Il convient de préciser qu’une exclusion d’une mention de condamnation du bulletin n°2 exclue automatiquement cette mention du bulletin n°3 s’il elle y était inscrite.  

1.2. L’effacement des bulletins n°2 et n°3 

Sont retirées du bulletin n°2 :

  • les condamnations ayant fait l'objet d'une réhabilitation (article 775 du code de procédure pénale)
  • les condamnations prononcées sans sursis en application des articles 131-5 à 131-11 du code pénal, à l'expiration d'un délai de trois ou cinq ans à compter du jour où elles sont devenues définitives ; toutefois, si la durée de l'interdiction, déchéance ou incapacité, prononcée en application des articles 131-10 et 131-11, est supérieure à cinq ans, la condamnation demeure mentionnée au bulletin n° 2 pendant la même durée (article 775 du code de procédure pénale)
  • les condamnations prononcées par une juridiction étrangère, à l'expiration des délais prévus à l'article 133-16-1 du code pénal (trois, cinq, dix ou quarante ans selon les cas) (article 775-3 du code de procédure pénale)

Sont retirées du bulletin n°3 à l’expiration de leur durée (article 777 du code de procédure pénale) :

  • les condamnations à des interdictions, déchéances ou incapacités prononcées par une juridiction nationale sans sursis, en application des articles 131-6 à 131-11 du code pénal
  • les décisions prononçant le suivi socio-judiciaire ou la peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs

 

2. BULLETIN N°1 DU CASIER JUDICIAIRE

Dans un cas, la justice pardonne sans oublier, c’est le cas de la réhabilitation qui « efface la condamnation » (article 133-1 du code pénal), tout en conservant la mention de condamnation sur le bulletin n°1 (2.1). Dans d’autres cas, la justice accepte d’oublier lorsqu’elle permet des retraits ou suppressions de mentions de condamnations ou que, d’elle-même, elle efface définitivement des mentions, par l’écoulement du temps (2.2). 

2.1. La réhabilitation  

Selon Laurent GRIFFON-YARZA, la réhabilitation a un double fondement : apurer le casier judiciaire national et faciliter la réinsertion sociale des condamnés. S’agissant de ce second objectif, il cite Martine HERZOG-EVANS : « après la honte, la réintégration dans la communauté des citoyens est une nécessité criminologique […]. Notre sécurité en dépend ».

C’est le raisonnement de la Cour de cassation qui considère que « la réhabilitation, qui suppose l’amendement du condamné, tend à faciliter son reclassement » (Crim. 14 octobre 1971, pourvoi n°71-90.165, Bull. crim. n°266 ; Crim. 14 octobre 1971, pourvoi n°71-91.658, Bull. crim. n°353).

Il existe deux moyens d’obtenir une réhabilitation : il y a une réhabilitation automatique dite de plein droit ou légale et une réhabilitation sur demande dite judiciaire (2.1.1). Toutes deux entraînent globalement les mêmes effets pour le condamné (2.1.2). 

2.1.1. La réhabilitation légale et la réhabilitation judiciaire 

La réhabilitation est prévue tant par le code pénal (article 133-1 ainsi que 133-12 à 133-17) que le code de procédure pénale (article 782 à 799). Elle peut bénéficier à toute personne, physique ou morale, frappée d’une peine criminelle, correctionnelle ou contraventionnelle. La réhabilitation est cependant soumise à des délais particuliers qui la rende impossible, par exemple, dans le cas d’une interdiction définitive du territoire français prononcée à titre principal. 

La réhabilitation légale s’opère automatiquement à l’issue d’un délai (de trois, cinq ou dix ans) qui court à partir de l’exécution ou de la prescription de la peine principale, à la condition qu’il n’y ait pas de nouvelle condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle dans ce délai. S’agissant des peines avec sursis, le délai ne commence à courir qu’à compter de la date à laquelle la condamnation est non avenue. En cas de récidive légale, les délais sont doublés. 

La réhabilitation judiciaire peut être prononcée sur décision de la chambre de l’instruction, à la demande du condamné. Cette demande peut être présentée du vivant du condamné par lui ou son représentant légal et elle peut être poursuivie ou demandée dans l’année qui suit son décès par son conjoint, ses ascendants et ses descendants. Elle ne peut être présentée qu’après un délai d’un an pour les condamnations contraventionnelles, de trois ans pour les condamnations délictuelles (six ans en cas de récidive légale) et de cinq ans pour les condamnations criminelles (dix ans en cas de récidive légale), à compter du jour ou la condamnation est devenue irrévocable (pour les amendes), du jour de leur libération définitive ou de leur libération conditionnelle (pour les peines privatives de liberté) ou de l’expiration de la sanction subie (pour les autres sanctions).

Le point de départ est reporté au non-avenu en matière de sursis (Crim. 17 février 1998, pourvoi n°97-80.334, Bull. crim. 1998 n°62 ; Crim. 9 novembre 1998, pourvoi n°98-81.489 ; Crim. 28 juillet 1953, D. 1953.718 ; Crim. 18 juin 1969, pourvoi n°69-90.400, Gaz. Pal. 1969. 2. 127)

Des délais spécifiques sont prévus par l’article 787 du code de procédure pénale.

Cette requête doit porter sur l’ensemble des condamnations prononcées qui n'ont pas été effacées par une réhabilitation antérieure. Ainsi, la réhabilitation ne peut intervenir tant qu'il reste une condamnation ne remplissant pas la condition de délai (Crim. 16 janvier 2001, pourvoi n°00-84.21).

La réhabilitation supposant l’amendement du condamné, outre l’exécution de la peine et l’écoulement automatique du temps, celui-ci doit justifier du paiement de l'amende et des dommages-intérêts ou de la remise qui lui en est faite (sauf prescription). Des règles spécifiques sont prévues à défaut de justification, en cas de condamnation pour banqueroute frauduleuse, en cas de condamnation solidaire, si la partie lésée n’est pas retrouvée ou si elle refuse de recevoir la somme due (article 788 du code de procédure pénale).

Dans le même esprit de réintégration dans la société du condamné, l’article 790 du code de procédure pénale dispose que « si depuis l'infraction le condamné a rendu des services éminents au pays, la demande de réhabilitation n'est soumise à aucune condition de temps ni d'exécution de peine. En ce cas, la cour peut accorder la réhabilitation même si l'amende et les dommages-intérêts n'ont pas été payés ». 

Le condamné doit adresser sa requête au procureur de la République en indiquant la date de la condamnation et les lieux où il a résidé depuis sa libération, afin que le procureur de la République s’entoure de tous renseignements utiles aux différents lieux où le condamné a pu séjourner, ainsi que solliciter l’avis du juge de l’application des peines. C’est le procureur de la République qui constitue le dossier (jugements de condamnation, extrait du registre des lieux de détention où la peine a été subie constatant quelle a été la conduite du condamné, bulletin n° 1 du casier judiciaire, son avis) qu’il transmet au procureur général qui saisit par conclusions la chambre de l’instruction de la cour d’appel devant statuer sous deux mois dans le cadre d’une audience (articles 790 à 794 du code de procédure pénale).

La chambre de l’instruction a l’obligation de s’expliquer sur la conduite du condamné depuis sa condamnation mais son appréciation est souveraine et échappe au contrôle de la Cour de cassation. Elle peut tenir compte en même temps que des gages d'amendement, de la gravité des faits commis ainsi que de leurs conséquences et de leur retentissement dans l'opinion publique au lieu où réside le demandeur (Crim. 6 novembre 1947, D. 1948. Somm. 1 ; Crim 21 février 1952, D. 1952. 302 ; Crim. 11 décembre 1952, Bull. crim. n°302 ; Crim. 12 février 1963, pourvoi n°62-90.725, D. 1963. 442, RSC 1963. 798, obs. Legal ; Crim. 20 février 1973, pourvoi n°72-91.270, D. 1973. Somm. 47). Elle ne peut toutefois pas se fonder uniquement sur le nombre et la gravité des condamnations prononcées (Crim. 16 octobre 1974, pourvoi n°73-91.238 ; Crim. 10 décembre 1975, pourvoi n°74-91.203). 

2.1.2. Les effets de la réhabilitation  

« La réhabilitation efface la condamnation » indique l’article 133-1 du code pénal. En réalité, l’effacement n’est pas absolu. La réhabilitation a les effets suivants :

  • « elle efface toutes les incapacités et déchéances qui résultent de la condamnation » (article 133-16 du code pénal)
  • elle « ne préjudicie pas aux tiers » (article 133-16 du code pénal renvoyant à l’article 133-10 du code pénal concernant l’amnistie)
  • elle « interdit à toute personne qui, dans l'exercice de ses fonctions, a connaissance de condamnations pénales, de sanctions disciplinaires ou professionnelles ou d'interdictions, déchéances et incapacités effacées par l'amnistie, d'en rappeler l'existence sous quelque forme que ce soit ou d'en laisser subsister la mention dans un document quelconque » (article 133-16 du code pénal renvoyant à l’article 133-11 du code pénal concernant l’amnistie)
  • elle emporte l’effacement de la mention de condamnation des bulletins n°2 et 3 du casier judiciaire (article 798 du code de procédure pénale)

En revanche, « la réhabilitation n'interdit pas la prise en compte de la condamnation, par les seules autorités judiciaires, en cas de nouvelles poursuites, pour l'application des règles sur la récidive légale » (article 133-16 du code pénal). En ce sens, les minutes des jugements, arrêts et décisions peuvent rappeler l’existence de la condamnation et laisser subsister la mention de celle-ci (article 133-11 du code pénal). 

Surtout, la réhabilitation n’emporte pas l’effacement de la mention de condamnation du bulletin n°1 du casier judiciaire (sauf demande de retrait). En effet, l’ancien article 769 du code de procédure pénale prescrivait le retrait des fiches relatives à des condamnations réhabilitées de 1994 (avec le nouveau code pénal) à 2008 (jusqu’à la loi n°2007-297 du 5 mars 2007). Désormais, la réhabilitation figure en marge de la mention de condamnation concernée sur le bulletin n°1. 

La Cour de cassation est venue préciser en 1995 que si l’interdiction de rappeler la condamnation n’est pas prescrite à peine de nullité, « cette nullité doit cependant être prononcée lorsqu'il résulte des motifs d'une décision que la prise en considération de la condamnation effacée par la réhabilitation a influé sur l'appréciation de la peine sanctionnant la nouvelle infraction poursuivie » (Crim. 8 novembre 1995, pourvoi n°95-81.306).

Cette jurisprudence est la conséquence de l’introduction du nouveau code pénal en 1994 car malgré l’ancien article 799 du code de procédure pénale qui prévoyait lapidairement que « la réhabilitation efface la condamnation, nul ne peut en faire état », la Cour de cassation avait jugé tout aussi lapidairement que cette interdiction n’était pas prescrite à peine de nullité (Crim. 21 novembre 1989, pourvoi n°89-85.128, Bull. crim. n°433). En introduisant l’article 133-16 qui dispose que la réhabilitation produit les même effets que ceux qui sont prévus par les articles 133-10 et 133-11 relatifs à l’amnistie, la violation de cette interdiction devait entraîner les mêmes conséquences car, en matière d'amnistie, la Cour de cassation sanctionnait le rappel d'une sanction amnistiée, lorsque ce rappel avait eu une influence sur la peine sanctionnant une nouvelle infraction (Crim. 8 janvier 1986, Bull.crim. n° 230, RSC 1988, p. 415, obs. A. VITU ; Crim. 15 mars 1988, Bull. crim. n° 126). Cette jurisprudence a été confirmée en 2005 et en 2009 (Crim. 19 octobre 2005, pourvoi n°05-81.199 ; Crim. 10 novembre 2009, pourvoi n°09-82.368).

Et pourtant, la Cour de cassation sème le doute ces dernières années.

En 2013, elle a décidé que : « Attendu qu'en se référant, pour apprécier le montant de la sanction, aux éléments de personnalité et aux mentions de casier judiciaire figurant régulièrement au dossier de la procédure, l'arrêt n'a pas encouru les griefs invoqués au moyen, lequel, en conséquence, doit être rejeté ; » et ce, alors même que la cour d’appel s’est appuyée pour déterminer le montant d’une amende notamment sur des condamnations réhabilitées (Crim. 28 mai 2013, pourvoi n°12-81.468, Bull. crim. 2013 n°118).

En 2018, elle a décidé que « la réhabilitation de plein droit d'une condamnation n'interdit pas à la juridiction de prendre en compte, lors de l'examen de la culpabilité de l'intéressé, cet élément de personnalité figurant régulièrement au dossier de la procédure par sa mention au casier judiciaire » (Crim. 17 janvier 2018, pourvoi n°17-80.402).

Il semble donc que la réhabilitation ne doive pas être prise en compte pour déterminer la peine mais peut être prise en compte pour apprécier la culpabilité. Cette dernière décision apparaît d’autant plus contestable que l’appréciation de la culpabilité ne devrait être réduite qu’à l’examen des faits, la personnalité devant être examinée dans l’hypothèse d’une condamnation s’agissant de l’individualisation de la peine. 

Relevons que l’unique différence entre la réhabilitation légale et la réhabilitation judiciaire s’agissant des effets est qu’en cas de réhabilitation judiciaire, le deuxième alinéa de l’article 133-16 du code pénal n'est pas applicable et la réhabilitation produit immédiatement ses effets pour les condamnations prévues au même alinéa (article 783 du code de procédure pénale). Cet alinéa dispose, d’une part, que lorsque la personne a été condamnée au suivi socio-judiciaire prévu à l'article 131-36-1 du code pénal ou à la peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, la réhabilitation ne produit ses effets qu'à la fin de la mesure et, d’autre part, que la réhabilitation ne produit ses effets qu'à l'issue d'un délai de quarante ans lorsqu'a été prononcée, comme peine complémentaire, une interdiction, incapacité ou déchéance à titre définitif. 

2.2. L’effacement, le retrait et la suppression des condamnations du bulletin n°1 

L’oubli judiciaire ultime, c’est l’effacement du bulletin n°1 du casier judiciaire qui intervient automatiquement (2.2.1) ou bien à la suite d’une demande de retrait ou de suppression (2.2.2). 

2.2.1. L’effacement des condamnations du bulletin n°1 

L’effacement est une procédure qui intervient de plein droit dans des cas spécifiques ou par l’écoulement du temps, en application de l’article 769 du code de procédure pénale.  

Sont retirées du casier judiciaire, sans qu’un délai ne soit prévu, les fiches relatives :

  • condamnations effacées par une amnistie
  • condamnations réformées par une décision de rectification du casier judiciaire
  • condamnations ayant fait l’objet d’une réhabilitation judiciaire avec retrait de la condamnation
  • décisions disciplinaires effacées par la réhabilitation
  • condamnations prononcées par les juridictions étrangères, dès réception d'un avis d'effacement de l'Etat de condamnation ou d'une décision de retrait de mention ordonnée par une juridiction française

Les délais d’effacement du bulletin n°1 sont les suivants :

  • quarante ans pour les condamnations qui n’ont pas été suivies d’une nouvelle condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle (sauf en ce qui concerne les condamnations prononcées pour des faits imprescriptibles ou par une juridiction étrangère)
  • trois ans pour les dispenses de peines
  • trois ans pour les contraventions (cinq ans en cas de récidive constituant un délit)
  • trois ans pour les compositions pénales (sauf si la personne a, pendant ce délai, soit subi une condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une nouvelle composition pénale)
  • trois ans pour les mesures et sanctions éducatives concernant les mineurs délinquants (sauf si la personne a, pendant ce délai, soit subi une condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une composition pénale, soit fait l'objet d'une nouvelle mesure ou sanction éducative)
  • au terme de l’hospitalisation d’office ou des mesures de sûreté pour les déclarations d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental

S’agissant des jugements prononçant la faillite personnelle ou l'interdiction prévue par l'article L. 653-8 du code de commerce, l’effacement intervient lorsque ces mesures sont effacées par un jugement de clôture pour extinction du passif, par la réhabilitation ou à l'expiration du délai de cinq ans à compter du jour où ces condamnations sont devenues définitives. Toutefois, si la durée de la faillite personnelle ou de l'interdiction est supérieure à cinq ans, la condamnation relative à ces mesures demeure mentionnée sur les fiches du casier judiciaire pendant la même durée. 

2.2.2. Le retrait et la suppression des condamnations du bulletin n°1 

L’article 798 du code de procédure pénale dispose que « mention de l'arrêt prononçant la réhabilitation est faite en marge des jugements de condamnation. Dans ce cas, les bulletins n° 2 et n° 3 du casier judiciaire ne doivent pas mentionner la condamnation. L'arrêt qui prononce la réhabilitation peut toutefois ordonner que la condamnation soit retirée du casier judiciaire et ne soit pas non plus mentionnée au bulletin n° 1... ». 

L’article 798-1 du Code de procédure pénale dispose que « toute personne dont la condamnation a fait l'objet d'une réhabilitation légale en application des dispositions du code pénal peut demander, selon la procédure et les modalités prévues par le présent chapitre, que la chambre de l'instruction ordonne que cette condamnation soit retirée du casier judiciaire et ne soit plus mentionnée au bulletin n° 1. » 

Cette procédure de retrait est l’unique procédure permettant à tout condamné d’effacer véritablement et intégralement son casier judiciaire. La condition sine qua non est d’avoir obtenu une réhabilitation. S’il s’agit d’une réhabilitation légale, le condamné peut présenter une requête dans les conditions de la requête aux fins de réhabilitation judiciaire. Si le condamné a sollicité une réhabilitation judiciaire, il peut également demander le retrait de la condamnation.  

Cet unique article ne précise pas de quels critères les magistrats doivent faire dépendre leur décision. A cet égard, Martine HERZOG-EVANS relève que cette procédure de demande de retrait répond aux mêmes conditions de fond et de forme que pour la réhabilitation judiciaire et que par conséquent les exigences sociales et comportementales propres à cette mesure s'imposent donc également.

Il existe également une procédure de suppression spécifique aux mineurs et aux jeunes majeurs, prévue par l’article 770 du code de procédure pénale. En effet, les mineurs bénéficient d’un régime plus favorable quant à l’oubli judiciaire, leurs condamnations ne sont pas inscrites sur les bulletins n°2 et 3 et une fiche de leur casier judiciaire peut être supprimée par le tribunal pour enfants, d’office, à la requête du ministère public ou à sa demande (même s’il est depuis majeur). La condition de forme est l’expiration d’un délai de trois ans à compter de la condamnation. La condition de fond est que la rééducation de ce mineur apparaisse comme acquise. 

Un jeune majeur de 18 à 21 ans au moment des faits peut présenter la même requête, au procureur de la République. La condition de forme est identique s’agissant du délai de trois ans mais il faut également que les peines privatives de liberté aient été subies, les amendes payées et que les peines complémentaires soient expirées. La condition de fond est similaire en ce que le reclassement du jeune majeur doit paraître acquis. 

 


SOURCES :

  • L. GRIFFON-YARZA, Guide de l’exécution des peines, 1re éd., LexisNexis, 2015, 1007, p. 399
  • M. HERZOG-EVANS, AJP 2010, p. 457
  • M. HERZOG-EVANS, « Réhabilitation », §38, in Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Dalloz, Coll. Répertoire, 2018
  • C. SAAS, « Interdiction définitive du territoire français prononcée à titre principal : une peine perpétuelle faute de réhabilitation », Note sous Cons. cons. 27 novembre 2015, AJ Pénal 2016. 142