Le Conseil constitutionnel saisi sur questions priotaires de constitutionnalité (QPC) est venu renforcer l'obligation d'aviser le mandaire judiciaire à la protection des majeurs lorsque le majeur sous tutelle ou curatelle est placé en garde à vue (2018), lorsqu'il fait l'objet d'une perquisition (2021) ou lorsqu'il est convoqué devant le juge de l'application des peines (2021).

 

1. Décision n° 2018-730 QPC du 14 septembre 2018, M. Mehdi K. [Absence d'obligation légale d'aviser le tuteur ou le curateur d'un majeur protégé de son placement en garde à vue] [Non conformité totale - effet différé]

Dans cette décision, les Sages ont tout d'abord rappelé que le tuteur ou le curateur doit être avisé notamment en cas de poursuites pénales et pour certaines alternatives aux poursuites et que le gardé à vue sous curatelle ou tutelle peut demander à ce que son mandataire judiciaire soit avisé de son palcement en garde à vue et que celui-ci peut lui désigner un avocat.

Le Conseil constate que "ni les dispositions contestées ni aucune autre disposition législative n'imposent aux autorités policières ou judiciaires de rechercher, dès le début de la garde à vue, si la personne entendue est placée sous curatelle ou sous tutelle et d'informer alors son représentant de la mesure dont elle fait l'objet".

Ainsi, les Sages ont donc déclaré l'article 706-113 du code de procédure pénale contraire à la Constitution en ce que "dans le cas où il n'a pas demandé à ce que son curateur ou son tuteur soit prévenu, le majeur protégé peut être dans l'incapacité d'exercer ses droits, faute de discernement suffisant ou de possibilité d'exprimer sa volonté en raison de l'altération de ses facultés mentales ou corporelles. Il est alors susceptible d'opérer des choix contraires à ses intérêts, au regard notamment de l'exercice de son droit de s'entretenir avec un avocat et d'être assisté par lui au cours de ses auditions et confrontations."

La déclaration d'inconstitutionnalité est intervenue sur le fondement de la méconnaissance du principe des droits de la défense garanti par l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

 

2. Décision n° 2020-873 QPC du 15 janvier 2021, M. Mickaël M. [Absence d'obligation légale d'aviser le tuteur ou le curateur d'un majeur protégé d'une perquisition menée à son domicile dans le cadre d'une enquête préliminaire] [Non conformité totale - effet différé]

Après avoir procédé au même rappel des cas où le tuteur ou le curateur est avisé dans le cadre d'une procédure pénale, le Conseil a tenu un raisonnement similaire dans son huitième considérant : "ni les dispositions contestées, ni aucune autre disposition législative n'imposent aux autorités policières ou judiciaires de rechercher, au préalable, si la personne au domicile de laquelle la perquisition doit avoir lieu fait l'objet d'une mesure de protection juridique et d'informer alors son représentant de la mesure dont elle fait l'objet. Or, selon le degré d'altération de ses facultés mentales ou corporelles, le majeur protégé, s'il n'est pas assisté par son représentant, peut être dans l'incapacité d'exercer avec discernement son droit de s'opposer à la réalisation d'une perquisition à son domicile."

La déclaration d'inconstitutionnalité du premier alinéa de l'article 706-113 du code de procédure pénale est intervenue sur le fondement de la méconnaissance du principe d'inviolabilité du domicile. Ce fondement a été relevé d'office par le Conseil constitutionnel qui était saisi sur la base de la méconnaissance des droits de la défense et du droit à un procès juste et équitable.

 

3. Décision n° 2020-884 QPC du 12 février 2021, M. Jacques G. [Absence d'obligation légale d'aviser le tuteur ou le curateur d'une personne protégée en cas d'audience devant le juge de l'application des peines] [Non conformité totale]

La Conseil constitutionnel a repris le même raisonnement que celui de sa décision de 2018 dans son huitième considérant : "lorsque le condamné est un majeur protégé, ni les dispositions contestées, ni aucune autre disposition législative n'imposent au juge de l'application des peines d'informer son tuteur ou son curateur afin qu'il puisse l'assister en vue de l'audience. Or, en l'absence d'une telle assistance, l'intéressé peut être dans l'incapacité d'exercer ses droits, faute de discernement suffisant ou de possibilité d'exprimer sa volonté en raison de l'altération de ses facultés mentales ou corporelles, et ainsi opérer des choix contraires à ses intérêts."

La déclaration d'inconstitutionnalité du premier alinéa de l'article 712-6 du code de procédure pénale est intervenue sur le fondement de la méconnaissance du principe des droits de la défense garanti par l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Il convient de relever qu'entre-temps un article 712-16-3 a été ajouté au code de procédure pénale par la loi n°2020-1672 du 24 décembre 2020 qui dispose que : "lorsque le condamné est une personne majeure faisant l'objet, conformément à l'article 706-112, d'une mesure de protection juridique, son curateur, son tuteur ou la personne désignée en application des articles 706-114 ou 706-117 est avisé de la date du débat contradictoire prévu à l'article 712-6 ou de l'audience prévue à l'article 712-13. Ce curateur, ce tuteur ou cette personne peut faire des observations écrites ou être entendu comme témoin par la juridiction de l'application des peines, sur décision de son président. Le condamné doit être assisté d'un avocat, désigné par lui ou l'une de ces personnes ou, à la demande du juge de l'application des peines, par le bâtonnier, conformément à l'article 706-116."