L’article L. 424-1 du Code de l’urbanisme fixe le régime juridique du sursis à statuer à une demande de permis de construire, et plus largement à une demande d’autorisation d’urbanisme.

  • D’une part, « il peut être sursis à statuer sur toute demande d’autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus aux articles L. 102-13, L. 153-11, L. 311-2 et L. 313-2 du présent Code et par l’article L. 331-6 du Code de l’environnement».

Reprenons chacun des articles visés par l’alinéa 2 de l’article L. 424-1 :

Article L. 102-13, al. 1er, du Code de l’urbanisme :

« Lorsque des travaux, des constructions ou des installations sont susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation d’une opération d’aménagement dans le périmètre des opérations d’intérêt national, le sursis à statuer peut être opposé, dans les conditions définies à l’article L. 424-1, dès lors que la mise à l’étude du projet d’aménagement a été prise en considération par l’autorité administrative compétente de l’Etat et que les terrains affectés par ce projet ont été délimités ».

Article L. 153-11, al. 3, du Code de l’urbanisme :

« À compter de la publication de la délibération prescrivant l’élaboration d’un PLU [devant préciser, selon l’alinéa 1er, les objectifs poursuivis et les modalités de concertation], l’autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délais prévus à l’article L. 424-1, sur les demandes d’autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan ».

Article L. 311-2 du Code de l’urbanisme :

Instaure le sursis à statuer sur les terrains compris dans le périmètre d’une zone d’aménagement concertée « ZAC », à compter de la publication de l’acte créant une telle zone.

Article L. 313-2 du Code de l’urbanisme :

Instaure le sursis à statuer pour les autorisations de travaux « ayant pour effet de modifier l’état des immeubles » compris dans le périmètre d’un plan de sauvegarde et de mise en valeur à compter de la publication de la décision, en prescrivant l’élaboration ou la révision.

  • D’autre part, l’alinéa 3 de l’article L. 424-1 du Code de l’urbanisme, identifie, trois séries d’hypothèses pouvant conduire au prononcé d’une décision de sursis à statuer à la délivrance d’une autorisation de construire :

« 1° Dès la date d’ouverture de l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique d’une opération, sur les demandes d’autorisation concernant des travaux, constructions ou installations à réaliser sur des terrains devant être compris dans cette opération »

 « Lorsque des travaux, des constructions ou des installations sont susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse l’exécution de travaux publics, dès lors que la mise à l’étude d’un projet de travaux publics a été prise en considération par l’autorité compétent et que les terrains affectés par ce projet ont été délimités »

3° « Lorsque des travaux, constructions ou installations sont susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation d’une opération d’aménagement dès lors que le projet d’aménagement a été pris en considération par la commune ou l’EPCI compétent et que les terrains affectés par ce projet ont été délimités ».

Explicitons le régime juridique des points 2° et , à l’aune de la jurisprudence administrative :

  • Une décision, devant émaner de l’autorité publique compétente pour décider du projet de travaux ou d’aménagement public(s), doit identifier et faire état de la « prise en considération pour la mise à l’étude » d’un tel projet. 

La décision ou l’acte de prise en considération doit avoir été publié(e) avant l’enregistrement de la demande de permis de construire.

Cela signifie que l’autorité publique projetant la réalisation de travaux ou d’aménagements doit publiquement, et de manière suffisamment précise, décrire son projet de travaux ou d’aménagement visant une partie du territoire (v. CE, 28/07/1993, SARL Linck : req. n° 111.315) ;

  • L’autorité administrative maître de l’ouvrage doit également identifier les terrains – privés ou publics – qui pourraient être affectés par l’opération de travaux ou d’aménagement public(s) et, à ce titre, générer des mesures de sauvegarde telles que le sursis à statuer (v. CE, 12/11/2007, Cne de Talaudière : req. n° 281.345 ; ).

Etant précisé que la délimitation des « terrains affectés » par l’opération de travaux ou d’aménagement publics dont la mise à l’étude est prise en considération peut s’étendre au-delà des seuls terrains d’emprise strictement nécessaires aux travaux projetés (CE, 27/06/2008, Cnes de Sartrouville et d’Argenteuil : req. n° 292.844-293.026) ;

  • Enfin, l’autorité d’urbanisme ne peut régulièrement opposer un sursis à statuer à une demande de permis de construire, sur l’un des terrains identifié par le maître de l’ouvrage public que si l’exécution des termes dudit permis de construire est susceptible de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation du projet d’ouvrage ou d’aménagement public (v. CE, 12/11/2007, Cne de Talaudière : req. n° 281.345). 
  • Par ailleurs, le législateur, via l’alinéa 5 de l’article L. 424-1, enjoint l’autorité d’urbanisme à motiver sa décision de sursis à statuer.

Ce qui suppose que l’arrêté prononçant le sursis contienne l’énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision. De sorte que son destinataire puisse « à la seule lecture de la décision » en connaître les motifs (v. CE, 17/11/1982, KairengaLebon p. 385) et donc être suffisamment éclairé.

  • Enfin, le dernier alinéa de l’article L. 424-1 ouvre un « droit de délaissement » aux propriétaires victimes des effets d’un sursis à statuer.

Le droit de construire ou d’aménager un terrain étant un attribut du droit de propriété, toute atteinte à ce droit, même motivée par l’intérêt général, doit être « compensée » :

« Lorsqu’une décision de sursis à statuer est intervenue, les propriétaires des terrains auxquels a été opposé le refus d’autorisation de construire ou d’utiliser le sol peuvent mettre en demeure la collectivité ou le service public qui a pris l’initiative du projet de procéder à l’acquisition de leur terrain dans les conditions et délai mentionnés aux articles L. 230-1 et suivants ».

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