Exploiter une station-service n’est pas une activité comme une autre. Elle relève du régime des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), et, à ce titre, elle expose son exploitant à des responsabilités particulièrement lourdes. Trop souvent, les gérants de sociétés porpriétaires des sites ou locataires gérantes, se fient à leur fournisseur d’hydrocarbures, pensant que ce dernier assume l’essentiel des contraintes réglementaires. La réalité est différente : en cas de contrôle, c’est bien l’exploitant, et lui seul, qui devra justifier du respect des prescriptions de sécurité.


I. Des obligations techniques strictes

Les stations-service sont encadrées par plusieurs arrêtés ministériels, dont les plus importants restent ceux du 18 avril 2008 relatif aux réservoirs enterrés, du 15 avril 2010 fixant les prescriptions générales applicables aux stations, et celui du 11 mai 2015 qui a renforcé certaines de ces obligations.

Ces textes imposent une vigilance permanente. Les cuves doivent être à double paroi ou équipées d’un système équivalent, relié à un dispositif de détection de fuite. Chaque détecteur doit correspondre à une cuve identifiée et être relié à une alarme sonore. Ces systèmes eux-mêmes doivent être vérifiés régulièrement par un organisme agréé. Quant aux tuyauteries encore simples enveloppes, elles doivent faire l’objet d’un contrôle d’étanchéité périodique, toujours par un organisme accrédité.

Au-delà des cuves et des canalisations, l’exploitant doit être capable de présenter à tout moment un plan du site : emplacement des réservoirs, des tuyauteries enterrées, des bouches de dépotage, des appareils de distribution. Ce plan est indispensable lors des inspections. Enfin, le quotidien impose aussi ses contraintes : affichage clair des consignes de sécurité, procédures de maintenance, nettoyage régulier de l’installation et, de manière obligatoire, le nettoyage annuel du séparateur d’hydrocarbures.


II. La fin d’activité et la remise en état du site

Lorsqu’une station ferme définitivement, les obligations de l’exploitant ne disparaissent pas : elles se transforment. Le code de l’environnement prévoit que l’exploitant doit notifier la date d’arrêt définitif au préfet, au moins un mois à l’avance, en indiquant les mesures de mise en sécurité prévues.

Ces mesures sont lourdes : vidange et inertage des cuves, dépollution des sols, et surtout établissement d’une attestation de mise en sécurité par une entreprise certifiée dans le domaine des sites et sols pollués. Le terrain doit ensuite être réhabilité pour permettre un usage futur compatible avec la vocation initiale du site. Une fois la réhabilitation achevée, l’exploitant doit en informer par écrit le préfet, mais aussi la commune et, le cas échéant, l’établissement public compétent en urbanisme.


III. Des contrôles inopinés

Les services d’inspection peuvent se présenter à tout moment. Dans ces circonstances, il ne suffit pas d’avoir respecté les règles : il faut aussi pouvoir le prouver. Les justificatifs attendus sont nombreux : rapports de contrôle d’étanchéité des cuves et des tuyauteries, attestations de vérification des détecteurs, contrats de maintenance, procédures de nettoyage, plans d’implantation. L’absence de production de ces documents est assimilée à un manquement, qui peut suffire à déclencher une mise en demeure.


IV. Sanctions et risques pour le gérant

Le préfet dispose de pouvoirs étendus. Il peut mettre en demeure l’exploitant de régulariser sa situation, assortir cette mise en demeure d’une astreinte journalière, voire exécuter d’office les travaux aux frais de l’exploitant. Les sanctions administratives peuvent aller jusqu’à la consignation de sommes ou la suspension de l’activité.

Le volet pénal n’est pas à négliger : le non-respect d’une mise en demeure peut être sanctionné pénalement, notamment sous l’article L. 173-2, qui prévoit une peine d’un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende pour certaines installations en cas de non-exécution d’une mise en demeure prescrite. L’article L. 173-1 s’applique quant à lui aux infractions d’exploitation sans autorisation ou aux manquements de remise en état post-cessation (alinéa III).


conclusion

La gestion d’une station-service ne se limite pas à la relation avec le fournisseur d’hydrocarbures ou à l’organisation quotidienne de la distribution. Elle implique une responsabilité personnelle et permanente en matière de sécurité et de protection de l’environnement. Chaque gérant doit être conscient que le moindre relâchement peut conduire à des sanctions lourdes, tant administratives que pénales. Anticiper les contrôles, tenir ses justificatifs à jour et préparer la fin d’activité sont autant de réflexes indispensables pour prévenir des difficultés qui, autrement, peuvent s’avérer redoutables.