A l'ouverture de la succession de son mari, l'épouse découvre que celui-ci avait fait donation de 320 000 € à sa maîtresse. Elle parvient à obtenir la nullité des libéralités et ainsi à faire réintégrer les sommes dans l'actif successoral.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 20 novembre 2019, 16-15.867, Publié au bulletin.
La question posée à la Cour de cassation était de savoir si un époux, marié sous un régime de communauté, pouvait valablement faire des donations à un tiers sans l’accord de son conjoint.
Face au risque de devoir rapporter à la succession plus de 300 000 €, la maitresse soutenait que l’accord de l'épouse n’était pas nécessaire dans la mesure où l’époux pouvait disposer seul et librement de ses gains et salaires.
L’argumentaire est rejeté.
Explications. Dans le régime de la communauté légale, les gains et salaires constituent des acquêts de communauté. En principe, tout acte qui a pour effet d'appauvrir la communauté doit être consenti par les deux époux. Mais, parce que ce ne sont pas des biens communs comme les autres, l’article 223 du Code civil prévoit que chaque époux a la pouvoir de disposer seul de ses gains et salaires après s’être acquitté des charges du mariage
Dans cette affaire, les 320 000 € donnés à la maitresse provenaient en grande partie des gains et salaires que l’époux avait économisés sur des comptes bancaires.
Pour la Cour de cassation, ces fonds étaient devenus des économies et ne constituaient plus des gains et salaires. Il en avait perdu la libre disposition. Ainsi, les donations consenties sans l’accord de l’épouse devaient être annulées.
Il ressort de cet arrêt que lorsque les gains et salaires ont été économisés, l’époux ne peut plus en disposer seul. Il doit recueillir l’accord de son conjoint.
En pratique la difficulté résidera dans le fait de savoir à quel moment les gains et salaires deviennent des économies faisant perdre à l’époux le pouvoir d’en disposer seul.
Toutefois, même dans l’hypothèse où la donation de gains et salaires est valable, le conjoint peut toujours se prévaloir d’une récompense.
En résumé :
- La donation de gains et salaires économisés, faite sans l’accord du conjoint, peut être annulée.
- En revanche, un époux peut valablement consentir, seul, une donation de ses gains et salaires avant qu’ils ne soient économisés. Dans ce cas, reste au conjoint le mécanisme des récompenses.
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