En matière de référé précontractuel, le juge dispose de prérogatives importantes lorsqu’il constate un manquement dans le respect des règles de publicité et mise en concurrence. Les pouvoirs du juge sont énumérés à l’article L. 551-2 du code de justice administrative : ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations, suspendre et annuler l’exécution de toute décision se rapportant à la passation du contrat, supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat.
Il dispose ainsi de pouvoirs de suspension et d’injonction et peut ordonner de recommencer toute la procédure ou de la reprendre là où le manquement est apparu. Selon une jurisprudence constante, le choix de la sanction doit se faire en fonction de la nature du vice affectant la procédure.
Ainsi, un manquement dans la procédure d’élaboration des offres entraînera l’annulation de l’ensemble de la procédure.
Voir en ce sens : CE, 23 décembre 2011, Département des Bouches-du-Rhône, n°350519 : « Considérant, en deuxième lieu, que le manquement ainsi relevé concerne l'élaboration même des offres ; que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille n'a ainsi pas commis d'erreur de droit en annulant l'ensemble de la procédure, alors même que les sociétés Cari et Cordioli et C S.P.A. n'ont été éliminées qu'au stade de la sélection des offres »
En revanche lorsque le manquement concerne la phase de sélection des offres alors le juge des référés ne pourra annuler la procédure qu’à compter de l’examen de ces offres
Voir en ce sens :
- CE, 12 janvier 2011, Département du Doubs, n°343324 : « Considérant toutefois, en second lieu, que compte tenu du manquement ainsi relevé, qui se rapportait à la seule phase de sélection des offres par le pouvoir adjudicateur, il appartenait au juge des référés de n'annuler la procédure qu'à compter de l'examen de ces offres ; que, par suite, le juge des référés a commis une erreur de droit en annulant l'ensemble de cette procédure et en enjoignant au DEPARTEMENT DU DOUBS, s'il entendait la poursuivre, de la reprendre dans l'intégralité ; que le DEPARTEMENT DU DOUBS est en conséquence fondé à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Besançon en tant qu'elle a annulé la procédure à un stade antérieur à la phase de sélection des offres. »
- CE, 30 septembre 2011, Département de la Haute-Savoie, n°350153 : « Considérant, toutefois, que pour annuler la procédure de passation du marché, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a relevé que le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-SAVOIE avait manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en retenant une offre ne respectant pas la réglementation générale ; que compte tenu du manquement ainsi relevé, qui se rapportait à la seule phase de sélection des offres par le pouvoir adjudicateur, il appartenait au juge des référés de n'annuler la procédure qu'à compter de l'examen de ces offres ; que, par suite, le juge des référés a commis une erreur de droit en annulant l'ensemble de cette procédure ; que, par conséquent, le DEPARTEMENT DE LA HAUTE-SAVOIE est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance du 31 mai 2011 en tant qu'elle a annulé la procédure à un stade antérieur à la phase de sélection des offres ;
- CE, 23 mars 2012, Caisse des écoles de la commune de Six-Fours-les-Plages, n°355439 : « Considérant toutefois, en troisième lieu, que compte tenu du manquement ainsi relevé, qui se rapportait à la seule phase de sélection des offres par le pouvoir adjudicateur, il appartenait au juge des référés de n'annuler la procédure qu'à compter de l'examen de ces offres ; que, par suite, le juge des référés a commis une erreur de droit en annulant l'ensemble de cette procédure et en enjoignant à la CAISSE DES ECOLES DE LA COMMUNE DE SIX-FOURS-LES-PLAGES, si elle entendait la poursuivre, de la reprendre dans son intégralité ; que la CAISSE DES ECOLES DE LA COMMUNE DE SIX-FOURS-LES-PLAGES est en conséquence fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulon en tant qu'elle a annulé la procédure à un stade antérieur à la phase de sélection des offres ; ».
C’est ainsi que le Conseil d’Etat a précisé, dans une décision récente, que l’erreur de qualification d’une offre comme offre anormalement basse ne pouvait entraîner qu’une annulation partielle de la procédure de passation au stade de l’examen des offres et non une annulation totale de ladite procédure.
Voir en ce sens CE, 2 mars 2022, Pôle Emploi, n°458019 : « […] qu'en conséquence Pôle Emploi avait commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant d'écarter les offres présentées par cette société au motif de leur caractère anormalement bas et qu'il avait ainsi méconnu le principe d'égalité entre les candidats. Compte tenu du manquement ainsi relevé, qui se rapportait à la seule phase de sélection des offres par l'acheteur public, il appartenait au juge des référés de n'annuler la procédure qu'à compter de l'examen de ces offres. Par suite, le juge des référés a commis une erreur de droit en annulant l'ensemble de cette procédure et en enjoignant à Pôle Emploi, s'il entendait la poursuivre, de la reprendre dans son intégralité. Pôle Emploi est en conséquence fondé à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de La Réunion en tant qu'elle a annulé la procédure à un stade antérieur à la phase de sélection des offres. […] »
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