Selon l'article L. 1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Selon l'article L. 1152-3 du même code, toute rupture de contrat de travail intervenue en méconnaissance des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 du code du travail, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

(on trouve des  dispositions similaires pour le harcèlement sexuel : Article 1153-1 et suivant’)

Selon l’article L. 1132-3 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L. 1132-1 et L. 1132-2 ou pour les avoir relatés.

Selon l’article L. 1132-4 du même code, toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.

 

Le salarié est donc protégé contre toutes mesures de sanction à son égard pour avoir dénoncé ou relaté des faits de harcèlement ou de discrimination.

La Cour de cassation a depuis longtemps fixé une limite à cette protection lorsque le salarié est de mauvaise foi dans les termes similaires suivants « il s’en déduit que le salarié qui relate des faits de [discrimination]/[harcèlement moral] ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ».

L’employeur devra donc établir que les faits dénoncés sont faux mais cela ne suffit pas. Il faut ensuite démontrer que le salarié en avait connaissance.

 

Cette preuve est difficile et elle repose également sur l’employeur qui a licencié le salarié pour avoir dénoncé des faits de harcèlement ou de discrimination de prouver qu’ils étaient faux et surtout que le salarié le savait.

 

Par deux arrêts, la Cour de cassation nous donne un éclairage sur l’appréciation de cette connaissance par le salarié de la fausseté des faits :

Dans la décision du 16 septembre 2020 rendu en matière de harcèlement, la Cour de cassation valide l’appréciation de la Cour d’appel qui a relevé les comportements contradictoire du salarié :

  • Persister à reprocher mensongèrement à l'employeur de ne pas lui avoir donné « pendant plusieurs mois » les motifs de sa sortie de mission alors qu'ils avaient été portés à sa connaissance par écrit le 1 juin 2015 et qu'il était à l'origine du blocage de toute communication sur ce point,
  • en dénonçant des faits qu'il savait inexistants de harcèlement moral, l'intéressé, déniant tout pouvoir d'appréciation de l'employeur sur son comportement et sur son travail, avait adopté une stratégie lui permettant de se soustraire aux différents entretiens qui étaient fixés par l'employeur et à la discussion contradictoire qu'il appelait pourtant de ses vœux,
  • contradiction existant entre son souhait affiché d'obtenir des explications sur les motifs de son retrait de mission et son refus persistant de s'expliquer loyalement avec l'employeur sur lesdits motifs
  • caractère répétitif des remerciements qu'il avait adressés à l'employeur et de l'expression réitérée de sa volonté d'ouverture au dialogue, alors qu'il avait mis en réalité en échec toutes les tentatives de l'employeur de parvenir à une communication constructive en refusant d'honorer tous les rendez-vous qui lui étaient donnés au mépris de ses obligations contractuelles.

Dans la décision du 13 janvier 2021 rendue en matière de discrimination, la Cour de cassation valide l’appréciation de la Cour d’appel qui a jugé que l’employeur démontrait que :

  • plusieurs propositions de missions avaient été faites au salarié qui se trouvait en inter-contrat, que celui-ci avait refusé en février 2012 d’effectuer une mission à Pessac, et que, dans le même temps, il alléguait auprès du Défenseur des droits et de ses supérieurs hiérarchiques pour la première fois une situation de discrimination en raison de ses origines, que l’allégation a été faite par le salarié en des termes très généraux sans invoquer de faits circonstanciés,
  • le salarié était dès le mois de décembre 2011 déterminé à quitter l’entreprise, son désengagement professionnel durant la période d’inter-contrat montrant sa volonté d’obtenir une rupture conventionnelle du contrat de travail en cherchant à imposer ses conditions financières,
  • aucune alerte n’avait été faite durant la relation de travail auprès des délégués du personnel, de la médecine du travail ou de l’inspection du travail et
  • le salarié n’avait fait aucun lien avec ses origines avant les emails adressés à ses supérieurs hiérarchiques et au Défenseur des droits en février 2012.

Dans les deux affaires, les cours d’appel ont pu déterminer un dessein poursuivi par le salarié (« stratégie lui permettant de se soustraire aux différents entretiens qui étaient fixés par l'employeur et à la discussion contradictoire » et « volonté d’obtenir une rupture conventionnelle du contrat de travail en cherchant à imposer ses conditions financières », en contradiction avec la simple dénonciation des faits relatés.

 

Notons que la Cour de cassation (Cass. soc., 16 sept. 2020, n° 18-26.696) a considéré qu’il n’était pas impératif que la lettre de licenciement évoque la mauvaise foi du salarié.

 

Source : Arrêt n°64 du 13 janvier 2021 (19-21.138) - Cour de cassation - Chambre sociale, Arrêt n°699 du 16 septembre 2020 (18-26.696) - Cour de cassation - Chambre sociale