Un employeur informé des heures de travail supplémentaires effectuées et enregistrées dans un logiciel informatique mis à disposition par celui-ci donne son accord à leur réalisation, même en l’absence d’autorisation préalable expresse de sa part.

Un employeur informé par pointage informatique des heures supplémentaires effectuées par un salarié…

Une affaire récente est venue illustrer cette situation.

Les faits étaient les suivants : un salarié, représentant technique d’une société aéronautique, a saisi la juridiction prud’homale d’une demande en paiement d’heures supplémentaires. Le conseil de prud’hommes puis la cour d’appel ont fait droit à cette demande, que le salarié fondait sur un relevé de ses heures de travail comptabilisées au moyen d’un logiciel de pointage mis en place par l’employeur.

L’employeur reproche aux juges de l’avoir condamné. Selon lui, le salarié n’avait pas, avant l’accomplissement des heures supplémentaires alléguées, sollicité ou obtenu une autorisation expresse dans les formes et selon les modalités prévues par les procédures applicables. Ce qui, d’après l’employeur, privait le salarié de la faculté de se prévaloir d’un accord tacite à l’accomplissement desdites heures.

En effet, et en principe, la décision de recourir aux heures supplémentaires constitue une prérogative de l’employeur relevant de l’exercice de son pouvoir de direction. Dès lors, seules les heures accomplies à la demande de l’employeur ouvrent droit à rémunération.

L’employeur se pourvoit en cassation sur la base de ce principe.

…donne son accord, au moins implicite, à leur accomplissement

La chambre sociale de la Cour de cassation ne partage pas l’avis de l’employeur.

Elle approuve la cour d’appel d’avoir retenu que, peu important l’absence d’autorisation expresse préalable, il était constant que le salarié produisait les relevés de pointage de ses heures supplémentaires, telles qu’enregistrées dans le logiciel informatique mis à disposition par l’employeur.

Dès lors l’employeur, qui ne pouvait pas ignorer l’existence de ces heures supplémentaires et qui pour autant ne s’est jamais opposé à leur réalisation, avait nécessairement donné son accord tacite à leur réalisation.

Cet accord implicite oblige l’employeur à rémunérer les heures supplémentaires ainsi réalisées et comptabilisées.

Le pourvoi de l’employeur est rejeté.

Cette décision se situe dans la ligne de la jurisprudence constante de la Cour de cassation, qui avait notamment déjà confirmé qu’est fondé à demander en justice le paiement de ses heures supplémentaires le salarié qui a accompli régulièrement, pendant une longue période, des heures supplémentaires, au vu et au su de l’employeur qui ne s’y est pas opposé (Cass. soc. 19-6-1974 no 73-40.670 ; Cass. soc. 31-3-1998 no 96-41.878 P).

Cass. soc. 8 juillet 2020, n° 18-23.366 F-D