En l’absence de clause de non-concurrence, un salarié peut exercer une activité concurrente de celle de son ancien employeur. Toutefois, il doit s’abstenir de tous agissements déloyaux à l’égard de celui-ci.
Des actes de concurrence déloyale…
Dans une affaire récente, une ex-salariée a :
- créé une auto-entreprise concurrente de celle de son ancien employeur durant l’exécution de son contrat de travail ;
- annoncé aux clients de celui-ci qu’elle allait dorénavant travailler comme auto-entrepreneuse à son propre compte alors qu’elle était encore salariée ;
- confirmé que dans les mois qui avaient suivi son départ au moins deux clients sur les cinq pour lesquels elle avait travaillé comme salariée avaient résilié leur contrat et retenu les services de son auto entreprise ;
- admis leur avoir proposé des prix légèrement inférieurs à ceux de son ancien employeur.
Ce dernier l’a alors assignée devant le Tribunal de commerce en paiement de dommages-intérêts pour actes de concurrence déloyale commis à son encontre et afin de lui faire cesser toute activité concurrente dans un rayon de vingt kilomètres autour du siège social de l’entreprise.
La cour d’appel a rejeté les demandes de l’ancien employeur.
Ce dernier s’est pourvu en cassation, exposant que la cour d’appel avait elle-même constaté les différents agissements déloyaux de son ancienne salariée. Les juges auraient dû en tirer toutes les conséquences en jugeant que ces agissements étaient bien constitutifs d’actes de concurrence déloyale ayant entraîné un détournement de sa clientèle.
…qui n’en sont pas.
La Cour de cassation donne raison à la cour d’appel, qui avait exactement constaté et apprécié :
- que le détournement de clientèle ne saurait résulter du seul fait que les clients se sont reportés sur l’auto-entreprise de l’ex-salariée en raison de sa compétence ;
- qu’aucune manœuvre déloyale imputable à la salariée tendant à détourner les clients de son ancien employeur n’avait été établie.
La Cour de cassation ajoute que la seule création d’une entreprise concurrente durant le contrat de travail, sans que soit démontré l’exercice effectif d’une activité concurrente au cours de celui-ci, n’est pas déloyale.
L’ancienne salariée n’avait donc commis aucun comportement fautif susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard de son ancien employeur.
Cette décision de la chambre commerciale est conforme à la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, laquelle juge de longue date que les seuls actes préparatoires à l’exercice d’une future activité concurrentielle ne sont pas constitutifs d’une concurrence déloyale, dès lors que l’activité effective de la société ne débute qu’après la rupture du contrat de travail.
Les principes à valeur constitutionnelle de liberté du travail et de liberté d’établissement sont au cœur de cette jurisprudence.
Il a ainsi été jugé que le salarié licencié effectuant pendant son préavis les démarches nécessaires pour créer une société concurrente dont il doit être le gérant ne commet pas de faute grave dès lors que, ce préavis expirant le 3 avril, l’activité de la société a seulement débuté au cours de ce mois (Cass. soc., 28 avr. 1986, n°83-406309).
En revanche, si le salarié démissionnaire commence à travailler – sans attendre la fin de son préavis – pour une société concurrente dont il est actionnaire, il commet une faute lourde le privant des indemnités de rupture et pouvant justifier une condamnation à verser à l’employeur des DI pour concurrence déloyale » (Cass. soc., 5 mai 1971, n° 70 40.021).
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