Dans le cadre d’un dossier dont le cabinet a actuellement la charge, il convient de revenir sur la notion de dirigeant social et des conséquences de son maintien en exercice au-delà du terme initialement prévu.

Les faits :

Les faits sont relativement simples, M. X était président et membre du directoire d’une société. En l’absence de nomination d’un nouveau dirigeant social à la fin de son mandat, il soutenait que la nomination ultérieure de son successeur était nulle.

Question de droit :

Le mandat d’un dirigeant social peut-il faire l’objet d’une tacite reconduction ? Qu’en est-il lorsque le dirigeant a été maintenu dans son mandat à l’expiration de ce dernier ?

Attendu de principe :

« C’est en vain que M. X soutient que le procès-verbal de la réunion du conseil de surveillance du 12 septembre 2013 ne retranscrit pas fidèlement la réalité des débats ayant eu lieu lors de celles-ci, puisque les personnes présentes à cette date attestent toutes que pendant toute la durée de cette réunion à laquelle ils ont assisté, à aucun moment n’a été abordé le sujet de renouvellement du mandat de M. A X.

S’il est effectif que, de fait, le mandat social de M. X a été prorogé, cette prorogation ne s’analyse pas en une tacite reconduction et la société Courrier international était donc en droit, et avait même l’obligation, de désigner un nouveau président du directoire. »

Enseignement n°1 :

L’article L.225-61 du code de commerce impose qu’une durée soit fixée pour l’exercice des fonctions de membre d’un directoire. Cette durée doit être comprise entre 2 et 6 ans et doit être indiquée dans les statuts. A défaut d’une telle indication, il est retenu une durée intermédiaire de 4 ans.

Toutefois, même si cela n’est pas expressément repris par la juridiction, il faut rappeler que l’article R.225-36 du code de commerce précise que l’arrivée au terme du mandat implique une vacance du siège du directoire en question.

Il ne saurait y avoir donc tacite reconduction du mandat. Cette décision est classique et avait déjà été dégagée par la Cour d’appel de Versailles (CA de Versailles, 12 septembre 2002, Rev. Sociétés 2003. 164).

Enseignement n°2 :

Lorsque le mandat a expiré mais que le dirigeant est maintenu dans l’exercice de son mandat, la Cour d’appel de Paris considère qu’il s’agit d’une « prorogation » de ce dernier. Elle n’explique pas davantage ce qu’il faut entendre par prorogation.

En outre, on comprend de cette décision que les décisions collectives prises en sa présence ne sont pas frappées de nullité.

Toutefois, on peut constater que cette situation constitue un risque pour la société. En effet qu’en serait-il si un tiers venait à contester la décision prise par cet organe alors que le mandat de l’un de ses membres a expiré ? Sans doute cet acte serait-il annulé.

Enseignement n°3 :

Dans la décision le dirigeant voit sa demande de rémunération rejetée par la Cour d’appel. Néanmoins, cette décision est logique puisque cette fonction était exercée à titre gracieux. Il n’y avait donc aucune raison pour que le dirigeant bénéficie d’une rémunération qui n’était pas convenue.

Deux questions méritent d’être posées à ce sujet :

  • Qu’en serait-il si une rémunération était attachée à ce mandat ?

La Cour d’appel ne semble pas exclure ipso facto cette possibilité. Si une rémunération était convenue pour l’exercice de ce mandat alors elle doit être maintenue.

  • Doit-on octroyer des indemnités de révocation au dirigeant ?

Sur ce point aussi, la question mérite une attention particulière. En effet, lorsqu’un dirigeant social quitte son mandat à l’expiration de ce dernier, il ne peut prétendre à une quelconque indemnisation puisqu’il ne peut s’agir d’une révocation.

Sauf stipulation statutaire ou conventionnelle contraire, le non-renouvellement ne déclenche pas les règles prévues pour s'appliquer en cas de révocation en cours de mandat. Bien évidemment, l'éventuelle indemnisation pour révocation sans juste motif n'a pas lieu de s'appliquer, puisqu'elle repose, justement, sur un acte de révocation qui, en l'espèce, n'existe pas.

Toutefois, la Cour d’appel reconnait, qu’en l’espèce, la fin du mandat s’est effectuée dans des conditions injurieuses ou vexatoires, qui ouvrent droit à l’indemnisation du demandeur.

Finalement la défenderesse est condamnée à verser 8.000 euros à son ancien dirigeant.