A la suite d’un dossier en cours de traitement par le Cabinet MOGENIER, il convient de faire un point sur la notion de réception tacite.

La réception tacite est l’une des formes de réception qui sont admises par le droit français avec la réception expresse et la réception judiciaire.

La réception des travaux est le constat par le maître de l’ouvrage de ce que les travaux ont été bien exécutés ainsi que leur achèvement et leur conformité. La conséquence est importante pour le maitre de l’ouvrage puisque cette réception constate la prise de jouissance de l’ouvrage exécuté et conduit (exception faite d’éventuelles réserves) à l’extinction des relations contractuelles. C’est le point de départ des garanties pesant sur l’ouvrage.

Des différences sont toutefois à noter entre la réception tacite en droit privé (I) et celle en droit public (II).

  • Principe général

A la différence de la réception expresse qui fait l’objet d’un procès-verbal et donc d’un acte en bonne et due forme (en ce qui concerne les maisons individuelles, la Cour de cassation a reconnu la possibilité d’une réception tacite par un arrêt du 20 avril 2017, n°16-10486) et de la réception judiciaire qui est consécutive à une décision juridictionnelle, la réception tacite est marquée par l’absence d’acte écrit entre les parties. Le juge va donc rechercher l’intention du maître d’ouvrage de prendre réception de l’ouvrage.

  • Réception tacite en droit privé

Se référer aux dispositions de l’article 1792-6 du code civil n’est d’aucune utilité puisque ce dernier n’envisage pas réellement le principe de réception tacite. Il s’agit d’une construction prétorienne de la Cour de Cassation qui, dans un arrêt du 16 juillet 1987 énonce que :

« Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que l'article 1792-6 du Code civil laisse subsister la possibilité d'une réception tacite, la cour d'appel, en relevant que M. X... avait pris possession des ouvrages et les avait acceptés sans réserves, n'en contestant que le prix, a, par ces constatations, caractérisé la réception des travaux en conformité avec les exigences légales ; »

Lorsque la réception tacite est contestée, le juge judiciaire va donc s’atteler à constater si le maître de l’ouvrage a manifesté une volonté équivoque de prendre réception de l’ouvrage et d’en fixer la date. En effet, la réception des travaux faisant courir les délais des différentes garanties, le maître de l’ouvrage prendra garde à ne pas procéder avec légèreté.

Peut apparaitre comme une volonté de procéder à une réception tacite le fait de prendre possession y compris en contestant le prix  (Civ 3ème 16 juillet 1987, n°86-11455, de régler le solde du marché, d’émettre des lettres mentionnant les réserves, procéder à des constats.

Récemment la Cour de cassation a jugé que même en présence de travaux inachevés, le paiement par le maître d’ouvrage du solde du marché constitue une volonté non équivoque de recevoir l’ouvrage (Cass. 3ème civ, 18 mai 2017, n°16-11260).

Dans un arrêt du 18 avril 2019 (Cass.3ème civ., n°18.13734), la Cour de cassation a confirmé que la prise de possession ainsi que le paiement du solde du marché « font présumer de la volonté non équivoque du maitre de l’ouvrage de réceptionner l’ouvrage ». Cet arrêt est d’importance car, désormais, la volonté non-équivoque est déduite de la prise de possession de l’ouvrage et son paiement, faisant naitre la réception tacite de l’ouvrage.

  • Réception tacite en droit public

C’est l’article 41 du CCAG-Travaux qui constitue le fondement juridique de la réception tacite en droit public. La possibilité de réceptionner tacitement l’ouvrage a été reconnue par le Conseil d’État (CE, 6 février 2009, Rougerie c/ Fleury d’Aude, n° 294214).

Pratiquement, le maitre d’œuvre doit convoquer les OPR dans un délai de 20 jours suivant la demande de l’entreprise.

L’entrepreneur doit alors avertir le maitre d’ouvrage de la difficulté rencontrée. Ce dernier doit alors fixer une date dans les 30 jours suivant la réception de ce courrier. A défaut de fixation de cette opération dans les délais convenus, la réception est réputée avoir été effectuée à l’issue de ce délai.

 

 

Le Cabinet MOGENIER intervient à vos côtés pour solutionner, tant en conseil qu’en contentieux, les problématiques afférentes à la réception d’ouvrage.