Par une décision du 24 juin 2019 (n°428866), le Conseil d’État précise dans quelles conditions un pouvoir adjudicateur peut exclure la candidature d’une entreprise.

Faits :

Le département des Bouches-du-Rhône avait lancé un appel d’offres en septembre 2018 pour des travaux de remise en valeur du parvis, de rénovation de l’éclairage et de mise en accessibilité PMR des archives et de la bibliothèques départementales à Marseille. La société EGBTI a candidaté au lot n°3 « Électricité » et au lot n°4 « Éclairage dynamique ». par un courrier en date du 13 décembre 2018, le pouvoir adjudicateur a informé la société de ce qu’elle était susceptible d’être exclue. Un dirigeant de la société ayant tenté d’influencer le processus de sélection dans plusieurs marchés publics.

Le département a demandé  à la société de justifier de sa probité. La société a répondu le 19 décembre 2018 à ces griefs. Cependant, par courrier en date du 31 janvier 2019, le département a informé la société que sa candidature était définitivement exclue, faute pour elle d’avoir « apporté d'éléments relatifs à d'éventuelles mesures correctives mises en œuvre par la société et de nature à établir que son professionnalisme et sa fiabilité ne pouvaient plus être remis en cause pour la procédure en cours. »

La société a saisi le juge des référés afin d’obtenir l’annulation de la décision d’exclusion et d’annuler la procédure de passation du marché. Cette requête a été acceptée. C’est contre cette décision que le département se pourvoit.

Question de droit :

Dans quelles conditions un pouvoir adjudicateur peut-il exclure la candidature d’une société, sur le fondement des dispositions de l’article 48 de l’ordonnance du 23 juillet 2015, aujourd’hui codifié aux articles L. 2141-7 à L. 2141-7-11 du code de la commande publique ?

Considérant de principe :

« Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 3, les dispositions du 2° du I de l'article 48 de cette même ordonnance ne réservent pas la faculté de mettre en oeuvre cette cause d'exclusion facultative au seul cas des agissements commis dans le cadre de la procédure de passation en cours. Par suite, en jugeant qu'un acheteur ne pouvait pas exclure une entreprise de la procédure de passation d'un marché en application des dispositions du 2° du I de l'article 48 de l'ordonnance du 23 juillet 2015 pour des faits portant sur des marchés antérieurs, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a commis une erreur de droit. »

Enseignement n°1 :

Le principal doute concernant ce litige se portait sur l’interprétation des dispositions de l’article 48 de l’ordonnance. En particulier, comme l’a rappelé le rapporteur public, les interdictions doivent être strictement cantonnées. Si l’alinéa 1er de cet article indique que l’interdiction doit être cantonnée aux agissements commis au cours des « trois dernières années », aucune limite temporelle n’a été posée au second alinéa de même article. Les dispositions de la loi sont incomplètes sur ce point.

Enseignement n°2 :

Toutefois, dans un second temps, le Conseil d’État considère que les conflits d’intérêts constituent une cause d’exclusion sur le fondement de l’article 48 de l’ordonnance du 23 juillet 2015. De ce fait, le juge des référés, en faisant droit à la requête de la société, a commis une erreur de droit.

Enseignement n°3 :

Réglant l’affaire au fond, le Conseil d’État annule l’ordonnance du juge des référés et, rejette la demande d’annulation formulée par la société, estimant qu’elle n’a pas produits d’élément de nature à établir son professionnalisme et sa fiabilité pour ne plus être remis en cause.