Lorsqu’une société se retrouve en faillite se pose naturellement la question de la responsabilité des dirigeants. Lorsque le dirigeant a commis une faute dans le cadre de la gestion de la société, il peut être sanctionné de trois manières différentes : patrimoniale, professionnelle et pénale.

  • Sanctions patrimoniales

La sanction patrimoniale pouvant toucher le dirigeant d'une société est donc essentiellement l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif ou comblement de passif. Il s'agit d'une action indemnitaire. Son objet est de réparer le préjudice subi par la personne morale du fait du comportement de ses dirigeants. L’article L.651-1 du code de commerce indique que ce sont tous les dirigeants, quelle que soit la forme de la société, qui sont susceptibles de voir leur responsabilité engagée.

Il est à noter que cette action se distingue de celle prévue à l’article L.225-254 du code de commerce.

Seuls les membres des conseils de surveillance ainsi que les porteurs de parts ne sont pas susceptibles de voir leur responsabilité engagée. Il en est de même pour la société mère ne peut voir sa responsabilité pour insuffisance d'actif engagée de sa société fille.

Le dirigeant de fait est expressément visé parmi les personnes concernées par la responsabilité pour insuffisance d'actif. Est un dirigeant de fait celui qui exerce une activité de direction ou de gestion en toute liberté et indépendance.

Concernant la saisine de la juridiction, le tribunal compétent pour statuer dans les cas prévus à l'article L. 651-2 est celui qui a ouvert ou prononcé la liquidation judiciaire. Il est saisi par le liquidateur ou le ministère public. Dans l'intérêt collectif des créanciers, le tribunal peut également être saisi par la majorité des créanciers contrôleurs (une mise en demeure doit avoir été préalablement notifiée)

Le tribunal dispose d’un certain nombre de pouvoirs. Ainsi, le Président du tribunal peut requérir toute personne afin d’obtenir des informations quant à la situation patrimoniale des dirigeants. Il peut aussi ordonner toute mesure conservatoire afin d’éviter que les dirigeants n’organisent leur insolvabilité.

Un expert peut aussi être désigné.

Le délai de prescription de cette action est de trois ans à compter du jugement prononçant la liquidation judiciaire.

Le tribunal « peut » décider que le montant de l'insuffisance d'actif sera supporté « en tout ou en partie » par les dirigeants « ayant contribué » à la faute de gestion. Toutefois, le juge dispose d’un pouvoir souverain d’appréciation et pourra être amené à moduler la condamnation. Même, la Cour de cassation n’exerce aucun contrôle sur le montant des condamnations. La jurisprudence a simplement déterminé que le montant de cette condamnation ne pouvait pas être supérieur à celui de l’insuffisance d’actif.

Ces dettes rentrent alors dans le patrimoine du dirigeant. Il doit bien entendu exécuter ces condamnations sous peine que d’autres sanctions soient prononcées à son encontre.

  • Sanctions professionnelles

L'article L. 653-7 du code de commerce prévoit que, dans le cadre d'une action visant à une sanction professionnelle, le tribunal peut être saisi par le mandataire judiciaire, le liquidateur ou le ministère public. Le tribunal compétent pour prononcer la faillite personnelle ou une mesure d'interdiction est celui qui l'est pour prononcer le redressement ou la liquidation judiciaire de l'entreprise.

La première sanction qui est susceptible d’être prononcée est la faillite personnelle. Elle concerne que les personnes physiques visées à l’article L. 653-1 du code de commerce. Il vise tant les dirigeants de droit que de fait de personnes morales. Les cas de faillite personnelle peuvent s'observer uniquement en redressement et liquidation judiciaires.

Une nouvelle fois les membres du conseil de surveillance ne peuvent faire l’objet d’une telle condamnation.

L'article L. 653-2 du code de commerce dispose que la faillite personnelle emporte interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute entreprise ayant toute autre activité indépendante et toute personne morale. Certaines fonctions électives sont aussi interdites ou encore quelle que fonction publique, administrative ou judiciaire que ce soit.

En outre, le dirigeant reste tenu au paiement du passif.

La durée de cette mesure peut être de cinq ans maximum.

La seconde sanction consiste en le prononcé d’une interdiction de gérer. Cette sanction est visée à l’article L. 653-8 du code de commerce. Le tribunal peut prononcer l'interdiction de gérer, d'administrer ou de contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci. Cette interdiction, dite « diminutif » de la faillite personnelle, est prononcée à la place de la faillite personnelle lorsque celle-ci, de par sa sévérité, se révèle inadaptée.

Ici, les comportements susceptibles d’entrainer cette sanction sont ceux qui sont visés dans le cadre de la faillite personnelle. Elle peut aussi être prononcée lorsque l’une des personnes mentionnées à l’article L. 653-1 du code de commerce n'aura pas remis au mandataire judiciaire, à l'administrateur ou au liquidateur les renseignements qu'elle est tenue de lui communiquer en application de l'article L. 622-6 dans le mois suivant le jugement d'ouverture. Il en est de même pour tout dirigeant qui aura omis sciemment de faire, dans le délai de quarante-cinq jours, la déclaration de cessation des paiements sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.

L'interdiction de gérer n'entraîne pas la reprise des poursuites individuelles des créanciers à l'égard du débiteur personne physique.

Toute violation de cette interdiction de gérer est punie d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 375.000 euros d’amende.

  • Sanctions pénales

La première des infractions est la banqueroute. Les personnes visées sont énoncées à l’article L.654-1 du code de commerce.  L’article L.654-2 du code de commerce indique pour sa part quels sont les comportements susceptibles d’être incriminés :

« 1° Avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, soit fait des achats en vue d'une revente au-dessous du cours, soit employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;

2° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif du débiteur ;

3° Avoir frauduleusement augmenté le passif du débiteur ;

4° Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de l'entreprise ou de la personne morale ou s'être abstenu de tenir toute comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation ;

5° Avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales. »

Les peines principales de la banqueroute sont désormais prévues par les articles L. 654-3 et L. 654-4 du code de commerce. Le délit de banqueroute est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende. Le code de commerce prévoit une aggravation des peines sanctionnant la banqueroute qui est punie de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 € d'amende lorsque l'auteur ou le complice de banqueroute est un dirigeant d'entreprise prestataire de services d'investissement. Des peines complémentaires peuvent aussi être prononcées.

D’autres délits connexes peuvent être constatés :

  • Les actes de disposition irréguliers ;
  • La soustraction, le recel ou la dissimulation d’actifs ;
  • La malversation ;
  • L’abus de confiance

Enfin, des actions civiles peuvent aussi être engagées à l’encontre des dirigeants qui auraient commis des fautes.