Une clause exorbitante au bénéfice d’une personne privée ne suffit pas à caractériser un contrat administratif : TC, 2 novembre 2020, n°C4196 :

Dans cette affaire, les faits sont relativement peu importants, nous les éluderons donc vite.

Le tribunal des conflits saisit par la cour administrative d’appel devait s’interroger sur le caractère éventuellement administratif d’un contrat conclu entre une SPLA et une communauté d’agglomération.

En l’espèce, le tribunal des conflits rappelle qu’un contrat « passé entre une personne publique et une personne privée qui comporte une clause qui, notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l’exécution du contrat, implique, dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs, est un contrat administratif ».

Ici, le tribunal des conflits reprend la formulation de son arrêt du 13 octobre 2014 (Société Axa France IARD c/ MAIF, n°C3963)

Aussi, le fait que ce contrat prévoit au bénéfice de la personne publique des clauses exorbitantes de droit commun ne suffit pas à regarder un tel contrat comme un contrat administratif. De fait, pour qu’un contrat soit considéré comme administratif en raison de l’existence de clauses exorbitantes de droit commun, encore faut-il que ces clauses soient au bénéfice de la personne publique.

 

Accord-cadre à marchés subséquents : le Conseil d’Etat apporte d’utiles précisions : CE, 6 novembre 2020, MEL, n°437718.

Le Conseil d’Etat vient de rendre un arrêt très important concernant les accords cadre à marchés subséquents.

Dans cette affaire la société Manganelli, classée seconde de l’appel d’offres, a contesté l’attribution du marché à une société concurrente. La procédure de passation a été annulée par le juge des référés du TA de Lille. Décision contre laquelle la MEL se pourvoyait.

En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle que rien ne s’oppose à ce que le titulaire de l’accord cadre soit remis en concurrence sur les marchés subséquents. Plus précisément, le Conseil d’Etat indique que « la circonstance qu’un accord-cadre soit conclu avec un seul opérateur économique n’implique pas que son titulaire bénéficie de l’octroi automatique des marchés subséquents. »

On pourra difficilement faire plus clair…

L’ordonnance du juge des référés est donc censurée.

Second point intéressant de cette décision, le Conseil d’Etat revient sur la notion d’allotissement (article L.2113-10 du code de la commande publique). On le sait, l’allotissement est la règle afin de favoriser l’accès des TPE et PME aux marchés publics.

La société Manganelli faisait grief à la MEL de ne pas avoir alloti son marché.

En l’espèce, le Conseil d’Etat rappelle que l’allotissement ne pouvoir avoir lieu en raison de l’objet du marché qui était « basé sur des solutions numériques et informatiques interconnectées entre elles et, par conséquent, rétives techniquement à tout allotissement ».

 

Disproportion d’une indemnité pour motif d’intérêt général : CAA Paris, 20 octobre 2020, n°18PA00114

La CAA de Paris était amenée à se prononcer sur le caractère disproportionné d’une indemnité octroyée à un cocontractant de l’administration, dont le contrat avait résilié en raison d’un motif d’intérêt général.

Le contrat prévoyait en effet le versement d’une indemnité d’un montant supérieur à 1.2 millions d’euros en cas de résiliation pour motif d’intérêt général. Suite à la résiliation du contrat pour ce motif, le cocontractant avait saisi le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner l’administration à lui payer l’indemnité prévue au contrat.

Pour sa part, l’administration excipait du caractère disproportionné de ladite indemnisation, pourtant contractuellement prévue…

En l’espèce, la CAA rappelle la jurisprudence désormais constante du Conseil d’Etat (CE, 4 mai 2011, n°334280 et CE, 11 mai 2016, n°383768) en indiquant :

« 10. En vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, l'étendue et les modalités de l'indemnisation due par la personne publique à son cocontractant en cas d'annulation ou de résiliation pour un motif d'intérêt général du contrat peuvent être déterminées par les stipulations du contrat, sous réserve qu'il n'en résulte pas, au détriment de la personne publique, une disproportion manifeste entre l'indemnité ainsi fixée et le montant du préjudice résultant, pour le titulaire du contrat, des dépenses qu'il a exposées et du gain dont il a été privé »

Après avoir calculé les frais exposés par le cocontractant dans le cadre de l’exécution du marché, ainsi que la perte de marge financière due à la résiliation du contrat, la CAA de Paris rejette la demande du cocontractant de l’administration de faire droit à sa demande d’indemnisation au regard de son caractère disproportionné.