Dans cette décision, le Conseil d’Etat était amené à s’interroger sur les « pouvoirs » dont disposent le titulaire défaillant lorsqu’un marché de substitution est conclu pour pallier ses défaillances ainsi que l’absence d’achèvement des travaux commandés.
En l’espèce, après vu son marché résilié et un contrat de substitution conclu, la société CBI a contesté les décomptes qui lui ont été présentés et qui faisaient apparaitre des soldes négatifs.
Les juridictions de première instance et d’appel ont rejeté le recours de la société CBI, laquelle s’est pourvue en cassation.
Le Conseil d’Etat devait donc se prononcer sur deux points :
- Les modalités de recours aux marchés de substitution ;
- L’existence d’un droit de suivi de l’entrepreneur défaillant.
S’agissant du premier point, le Conseil d’Etat était interrogé sur le fait de savoir si un marché de substitution pouvait porter sur des travaux de reprise de malfaçons. En l’espèce, la Haute juridiction rappelle sa jurisprudence récente (CE, 18 décembre 2020, n°433386) et indique que le maître d’ouvrage d’un marché de travaux publics peut ainsi décider, après avoir vainement mis en demeure son cocontractant de poursuivre l’exécution des prestations que celui-ci s’était engagé à réaliser conformément aux stipulations du contrat, de confier l’achèvement des travaux à un autre entrepreneur aux frais et risques de son cocontractant. La mise en œuvre de cette mesure coercitive n’a pas pour effet de rompre le lien contractuel entre le maître d’ouvrage et le cocontractant défaillant. Il s’agit donc bien d’un marché de substitution :
« Il est loisible au maître d’ouvrage qui, après avoir mis en régie le marché, confie la poursuite de l’exécution du contrat à un autre entrepreneur, d’inclure dans ce marché de substitution des prestations tendant à la reprise de malfaçons sur des parties du marché déjà exécutées ».
Celui-ci doit en effet pouvoir suivre l’exécution du marché de substitution afin de veiller à la sauvegarde de ses intérêts, dès lors que les surcoûts supportés par le maître d’ouvrage demeurent à sa charge.
Dans un second temps, le Conseil d’Etat devait se prononcer sur l’existence d’un droit de suivi de l’entrepreneur défaillant sur les travaux réalisés par l’entreprise nouvellement désignée. En l’espèce, le Conseil d’Etat estime que le droit de suivi de l’entrepreneur défaillant s’exerce sur l’ensemble du marché de substitution, que ce soit les prestations d’achèvement des travaux ainsi que la reprise des malfaçons :
« le droit de suivi du titulaire initial du marché s’exerce sur l’ensemble des prestations du marché de substitution, sans qu’il y ait lieu de distinguer celles de ces prestations qui auraient pu faire l’objet de contrats conclus sans mise en régie préalable ».
Si la jurisprudence commentée a été rendue sous l’empire de l’ancien CCAG de 1976, il est probable que la solution dégagée trouve à s’appliquer aux nouveaux marchés conclus puisque les règles relatives aux marchés de substitution relèvent des règles générales applicables aux contrats administratifs et sont d’ordre public.
A cet égard, l’article 52 du nouveau CCAG-travaux en date du 30 mars 2021 reprend la possibilité de conclure des marchés de substitution.
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