La question des primes d'assurance vie manifestement exagérées est complexe d'autant qu' elle met en opposition la liberté de disposer avec les devoirs fixés par le régime matrimonial ou le droit successoral.

Souvent la jurisprudence se livre à un exercice de grand équilibre. Dans l'espèce qui a retenu notre attention, un mari décède le 14 janvier 2005.

Il avait souscrit, en 1994, trois contrats d'assurance-vie désignant sa soeur, en qualité de bénéficiaire et, en 1996 et 1998, deux autres contrats d'assurance-vie en faveur de sa nièce.

son épouse commune en bien, a demandé la réintégration des capitaux assurés dans l'actif communautaire, sur le fondement de l'article 1421 du Code civil et, subsidiairement, la réintégration des primes versées dans l'actif successoral et leur réduction, sur le fondement de l'article L. 132-13 du Code des assurances .

La Cour de Cassation approuve les juges du fonds qui n'ont pas reconnu le caractère manifestement exagéré des primes, en se livrant à une analyse circonstanciée :

« Attendu que, par motifs propres et adoptés, après avoir constaté que Jean-Claude B., qui n'avait pas d'enfant, avait perçu un revenu global de 3 098 833 euros de 1994 à 2004 et que ses déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune mentionnaient une base imposable comprise entre 1 et près de 2 millions d'euros au cours de la même période, la cour d'appel a retenu que, pour l'ensemble des contrats, il avait payé environ 1 900 000 euros à titre de primes, déduction faite des rachats intervenus pour un montant de 862 898 euros, soit approximativement la moitié de ses revenus .......... ; que les juges du fond ont relevé qu'âgé de 78 ans en 2004, Jean-Claude B. dirigeait toujours ses entreprises et retenu que, compte tenu de son espérance de vie, de la nature de ses obligations familiales et de la possibilité de rachat en cas de difficultés de trésorerie, faculté dont il avait usé en rachetant en 2004, sans frais ni pénalité, l'un des deux contrats d'assurance-vie, le contrat souscrit présentait pour le souscripteur une utilité certaine, tout en lui permettant, à raison de sa situation de fortune et de ses revenus, d'assurer ses obligations à l'égard de son épouse ; qu'en l'état de ces énonciations et sans être tenue de répondre aux conclusions inopérantes invoquées par la quatrième branche du moyen, la cour d'appel a souverainement estimé qu'au regard des situations patrimoniale et familiale du souscripteur, les primes versées n'étaient pas manifestement exagérées au sens de l'article L. 132-13 du Code des assurances »

En la matière il s'agit toujours d'effectuer un difficile arbitrage entre la liberté de disposer et les droits des héritiers.