La directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux (n° 85/374/CEE, 25 juill. 1985, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux), prévoit un délai de dix ans pour intenter une action contre le producteur.
La loi qui transpose cette directive au Royaume-Uni autorise, dans le cadre d'une procédure judiciaire, la substitution, après ce délai, d'un défendeur à un autre dans certaines circonstances et notamment lorsqu'il y a une erreur sur l'identité de la personne contre laquelle l'action doit être intentée.
Dans cette affaire, la société française Aventis Pasteur SA (APSA) fabrique des produits pharmaceutiques dont un vaccin antihaemophilus. Mérieux UK Ltd. Sa filiale à 100 % agissant comme distributeur au Royaume-Uni, a vendu un lot de vaccins au ministère britannique de la Santé à destination d'un hôpital qui, à son tour, a fourni une partie des vaccins à un cabinet médical.
Suite à l'administration d'une dose du vaccin en cause, M. OB a été atteint de graves lésions. Il a introduit dans un premier temps une action en réparation, dans le délai de dix ans, contre la filiale britannique Mérieux UK Ltd, devenue Aventis Pasteur MSD (APMSD). Ensuite, OB a demandé qu'APSA soit substituée à APMSD du fait que, au moment de l'engagement de la procédure, il avait cru à tort que le fabricant du vaccin en cause était APMSD. Toutefois, cette demande de substitution a été présentée après l'expiration du délai de dix ans prévu pour intenter une action à l'encontre du producteur.
La House of Lords, saisie du litige, interroge la Cour sur la compatibilité de la législation nationale avec la directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux
La Cour considère que la prise en compte d'éléments subjectifs, telle que l'attribution erronée, par la victime, de la qualité de fabricant du produit prétendument défectueux à une société qui ne l'est pas, méconnaîtrait les règles objectives d'harmonisation édictées par la directive.
Par conséquent, la Cour conclut qu'en principe la directive s'oppose à ce qu'une réglementation nationale autorisant la substitution d'une partie défenderesse à une autre au cours d'une procédure judiciaire soit appliquée de manière à permettre d'attraire, après l'expiration du délai de dix ans qu'elle fixe, un producteur comme partie défenderesse à une procédure judicaire intentée dans ce délai contre une autre personne que lui.
Par ailleurs, dans ce cas concret, la Cour considère que la directive ne s'oppose pas à ce que, dans la procédure engagée dans le délai de dix ans à l'encontre de la filiale appartenant à 100 % au producteur, ce dernier puisse être substitué à sa filiale si la juridiction constate que la mise en circulation du produit concerné a été déterminée par ce producteur.
En outre, selon la Cour, la directive doit être interprétée en ce sens que, lorsque la victime d'un produit prétendument défectueux n'a raisonnablement pas pu identifier le producteur avant d'exercer ses droits à l'encontre du fournisseur de ce produit, ledit fournisseur doit être considéré comme un « producteur » au sens de la directive, s'il n'a pas communiqué à la victime, de sa propre initiative et de manière diligente, l'identité du producteur ou de son propre fournisseur. Or, en l'espèce, APMSD, en tant que filiale d'APSA a acheté le vaccin en cause directement auprès de cette dernière, et connaissait nécessairement l'identité du producteur au moment où OB l'a assignée en justice.
La Cour précise, sur ce point, qu'il appartient à la juridiction nationale d'effectuer les vérifications nécessaires. Si elle considérait APMSD comme un « producteur », il serait permis de conclure que la procédure judiciaire engagée par OB contre cette société a interrompu le délai de prescription à son égard. En revanche, un tel constat n'autoriserait pas à accueillir la demande de substitution d'APSA à APMSD eu égard au fait que la demande a été introduite après l'expiration du délai de dix ans.
(CJCE, 2 déc. 2009, aff. C-358/08, Aventis Pasteur SA c/ OB)
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