Le fait pour les propriétaires d'une maison de cultiver de manière continue depuis 1977 une parcelle de terrain la jouxtant permet-il à ceux-ci d'en revendiquer la propriété au bout de trente ans ?

Le Tribunal de Grande Instance de Nevers a répondu par la négative en retenant l'existence d'une lettre par laquelle les propriétaires véritables du terrain auraient consenti une location aux utilisateurs de la parcelle litigieuse.

Ce jugement est infirmé par la Cour d'Appel de Bourges en retenant que: si les possesseurs ne pouvaient ignorer que le courrier en question n'était pas suffisant pour leur conférer la qualité de propriétaire, il n'en est pas moins établi qu'ils se sont comportés comme de véritables propriétaires. Les actes de possession ont été non interrompus, paisibles, publics, à titre de propriétaire et, ce qui était contesté, non équivoques. Pour la cour d'appel, la possession n'est équivoque que si les actes du possesseur ne révèlent pas son intention de se comporter comme propriétaire exclusif. L'équivoque est donc liée à l'animus. « L'équivoque suppose le doute dans l'esprit des tiers mais non dans celui du possesseur », rappelle la cour d'appel.

En l'espèce, le possesseur avait débroussaillé le terrain, l'avait cultivé et clôturé.

E conclusion, un possesseur de mauvaise foi peut donc prescrire à condition que ses agissements traduisent clairement sa détermination à se substituer au propriétaire. Il revenait au propriétaire originaire de se manifester à ce moment soit en s'y opposant, soit en avisant les utilisateurs du terrain de la bienveillance dont ils bénéficiaient.

(CA Bourges, ch. civ., 3 mars 2011, n° 10/00953 : JurisData n° 2011-003008)