Par un arrêt remarqué et remarquable, l'assemblée plénière de la Cour de cassation opte pour une uniformisation du procès pénal et du procès civil de presse, appliquant aux actions engagées devant la juridiction civile les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

En l'espèce, des propos faisant état de pratiques commerciales malhonnêtes imputées à un médecin fondateur d'un centre spécialisé dans l'épilation au laser avaient été diffusés sur un forum internet.

Ledit médecin et sa SELARL ont fait assigner la personne ayant fait diffuser ces propos ainsi que la société responsable du forum du chef de diffamation et d'injures en raison de passages déterminés.

Par ordonnance du 19 décembre 2007, le juge de la mise en état a annulé l'assignation en son ensemble en raison de son imprécision.

La cour d'appel de Paris a, par la suite, confirmé cette décision, énonçant que l' article 53 de la loi du 29 juillet 1881 applicable aux instances civiles, impose, à peine de nullité, que l'assignation précise et qualifie les faits incriminés et indique le texte de loi applicable, permettant ainsi au défendeur de faire la distinction et de savoir en quoi les passages similaires sont susceptibles de caractériser soit l'imputation de faits précis contraires à l'honneur ou à la considération, soit des injures, la cour estimant qu'à défaut il en résulte une incertitude contraire aux exigences de la loi sur la presse et aux droits de la défense.

La première chambre civile de la Cour de cassation, par un premier arrêt du 8 avril 2010, assouplit ces exigences et casse cette décision d'appel au motif qu'il n'est pas nécessaire que la citation précise ceux des faits qui constitueraient des injures, et ceux qui constitueraient des diffamations et renvoie en conséquence les parties devant la cour d'appel.

La Cour d'Appel de Paris campe sur ses positions, annulant de nouveau l' assignation en son entier (CA Paris, 15 févr. 2011).

Le médecin se pourvoit de nouveau en cassation ; mais la Haute juridiction met un point final à cette affaire en rejetant solennellement ce pourvoi par un arrêt d'assemblée en date du 15 février 2013, adoptant cette fois le point de vue exact des juges d'appel, au motif que, selon l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, qui doit recevoir application devant la juridiction civile, l'assignation doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait incriminé et énoncer le texte de loi applicable ; et qu'est donc nulle une assignation retenant pour le même fait la double qualification d'injure et de diffamation.

En effet des propos identiques ou quasiment identiques, même figurant pour certains dans des commentaires publiés à des dates distinctes, se trouvaient poursuivis sous deux qualifications différentes, ce qui était de nature à créer pour les défenderesses une incertitude préjudiciable à leur défense, et justifiait donc l'annulation en son entier de l'assignation.

(Cass. ass. plén., 15 févr. 2013, n° 11-14.637, P B+R+I)