Le jury de la Conférence de consensus sur la prévention de la récidive, présidé par Françoise Tulkens, a remis ses 12 recommandations « Pour une nouvelle politique publique de prévention de la récidive » au Premier ministre et au garde des Sceaux, le 20 février.

Point d'orgue des 5 mois de travaux préparatoires du Comité d'organisation présidé par Nicole Maestracci, les deux journées d'auditions publiques des 16 et 17 février ont permis au jury d'arrêter ses recommandations. Il a ainsi estimé « disposer d'éléments fiables pour remettre en cause l'efficacité de la peine de prison en termes de prévention de la récidive » et recommande de « reposer la question du sens et des finalités de la peine ».

Partant du constat que les peines non privatives de liberté « ne sont pas suffisamment utilisées par les juridictions, dont la pratique reste largement déterminée par le recours à la détention », il propose de créer une nouvelle peine : la peine de probation, souhaitée par la garde des Sceaux. Pour le jury, elle apparaît comme « la seule voie pour faire diminuer les courtes peines d'emprisonnement ».

Seraient fusionnées au sein de cette nouvelle peine, les différentes peines et mesures non privatives de liberté de nature différente actuellement éparses. La peine de probation devra être perçue « comme une vraie peine, avec des éléments de contrainte et de contrôle ainsi que des fonctions de réparation et de réinsertion ».

Limitée dans le temps, la peine de probation implique la définition d'objectifs et un plan d'exécution à suivre par le service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP). Il reviendra au juge d'application des peines de préciser le contenu des mesures de probation qui devra se traduire par des modes de réparation (médiation, réparation du préjudice, travail d'intérêt général), un suivi de mesures susceptibles de permettre à la personne de modifier le comportement à l'origine du délit (injonction thérapeutique, stage de sensibilisation à la sécurité routière, stage de citoyenneté, etc) et un travail sur les facteurs de réinsertion (accès au logement, recherche d'emploi, etc.). La durée maximale de la peine de probation devra être fixée par la loi et sa durée effective déterminée par le juge du fond. Une infraction de non-respect de la peine de probation devra être prévue.

Pour lutter contre la récidive, le jury préconise donc de s'orienter vers une politique de limitation de l'incarcération et l'abandon de tous les mécanismes automatiques d'aggravation des peines ou de limitation des possibilités de leur aménagement, y compris pour les condamnés en état de récidive, ainsi que l'abandon des peines plancher pour les récidivistes. Les experts estiment qu'il est nécessaire de laisser les magistrats libres de prononcer ou non la circonstance aggravante de récidive en fonction du parcours et de la personnalité du justiciable, généralement appliquée automatiquement.

Le jury recommande en outre :

- d'adopter un système de libération conditionnelle d'office, qui permettrait de ne plus considérer cette mesure comme une faveur, mais bien comme le mode normal de libération ;

- de proscrire les « sorties sèches » ;

- d'abolir la rétention de sûreté et la surveillance de sûreté ;

- de prévoir la contraventionnalisation de certains délits, et non la dépénalisation, (délits représentant un contentieux quantitativement important mais de faible gravité) ;

- d'institutionnaliser la prise en charge des personnes placées sous main de justice, c'est-à-dire d'instaurer une politique interministérielle pour garantir l'accès de ces personnes aux dispositifs de droit commun.

Enfin, le Gouvernement est appelé à « rendre la prison digne des citoyens » et « construire un temps d'incarcération utile ».

Les pistes retenues nous paraissent des plus intéressantes.

Un projet de loi est attendu pour le mois de juin.

(Conf. de consensus, 20 févr. 2013, rapp. Min. Justice, 20 févr. 2013, communiqué)