Dans le cadre du contentieux lié aux opérations de défiscalisation immobilière, trop fréquentes sont encore les décisions de justice qui se focalisent sur la perte ou non de l’avantage fiscal (avantage dont le contenu varie bien entendu en fonction du dispositif considéré – Girardin, Pinel, Censi-bouvard, etc.) pour apprécier le bien fondé des prétentions des investisseurs.

En substance et de manière schématique, la logique de ces décisions est la suivante :

  • une opération de défiscalisation immobilière est pour l’investisseur une opération à finalité fiscale qui a pour support un bien immobilier,
  • dès lors que l’investisseur a été informé sur le contenu et les conditions du régime fiscal de faveur, ou a pu bénéficier de l’avantage fiscal, il n’y a pas, par principe, matière à grief puisque l’intermédiaire en opération de défiscalisation immobilière a satisfait à son obligation d’information ou que l’objectif recherché avec la réalisation de l’opération (la défiscalisation) a été atteint.

Un tel raisonnement de principe sera le plus souvent erroné.

Il résulte en effet le plus souvent (pour ne pas dire systématiquement) de l’analyse des documents remis aux investisseurs en phase précontractuelle (principalement les plaquettes publicitaires, les analyses patrimoniales et les études financières) que les opérations de défiscalisation immobilière sont présentées comme des opérations financières (i) ayant pour support un bien immobilier géré par un tiers, (ii) financées par la perception de loyers, par les réductions d’impôt procurées par le dispositif d’incitation fiscale avec en complément un effort d’épargne mensuel défini et censé être maîtrisé, (iii) destinées à permettre, suivant la revente du bien au terme de la période de défiscalisation, la réalisation d’un capital supérieur à l’effort d’épargne fourni et donc la constitution d’un capital

Ainsi, et dans le cadre de telles opérations, la défiscalisation n’est pas une finalité en soi mais uniquement l’un des éléments de l’opération, un levier (on parle d’effet de levier fiscal) destiné à alléger l’effort d’épargne en cours d’opération.

Ces précisions apportées sur la nature des opérations de défiscalisation immobilière telles qu’elles sont effectivement présentées aux investisseurs, l’on comprend aisément que :

  • l’obligation d’information des intermédiaires en opération de défiscalisation immobilière ne porte pas uniquement, en sus bien entendu d’une information sur les caractéristiques physiques du bien (due par toute personne qui s’entremet dans une vente immobilière), sur le contenu et les conditions du régime fiscal de faveur,
  • des paramètres économiques comme notamment le montant du loyer, la valeur du support de l’investissementprojeté ou encore le potentiel locatif du lieu d’implantation de l’immeuble constituent autant d’éléments essentiels de l’opération proposée pour lesquels l’investisseur doit être destinataire d’une information précontractuelle loyale et utile lui permettant de prendre sa décision d’investissement en toute connaissance de cause,
  • la perte de l’avantage fiscal (ou sa reprise) n’est pas pour les investisseurs le seul préjudice indemnisable.

Ainsi, une rentabilité locative significativement inférieure à celle annoncée ou encore une impossibilité de réaliser le capital promis au terme de l’opération pourront, sous certaines conditions, justifier pleinement une action en responsabilité voire une action en nullité de l’opération.

Et ce nonobstant le fait que l’investisseur ait pu bénéficier à plein du régime fiscal de faveur.