Imaginez que vous êtes en plein combat judiciaire, avec des échéances cruciales à l'horizon, et que votre avocat vous abandonne subitement. C'est le cauchemar qu'a vécu Monsieur Martin (nous avons anonymisé son nom), un propriétaire foncier, empêtré dans trois procédures complexes à la fois. M. Martin possède de vieux terrains familiaux et se bat depuis des années pour défendre ses droits dessus. En 2021, il confie tous ses dossiers à un avocat local, Maître V., pensant trouver en lui un allié solide. Maître V. engage pour son client plusieurs actions judiciaires : un appel contre un jugement qui avait débouté M. Martin dans une affaire de titre de propriété, une action en nullité de ventes immobilières contestées, et même une procédure d'inscription de faux contre un document suspect produit par l'adversaire. Les enjeux sont considérables : il s'agit pour M. Martin de récupérer ou de conserver des biens immobiliers de grande valeur, et d'éviter d'avoir à financer des remises en état coûteuses si les jugements lui sont défavorables. L'octogénaire place toute sa confiance dans son avocat… hélas, ce dernier va le trahir de la pire des façons.
Alors que deux audiences décisives approchent (l'une en avril 2023 devant la Cour d'appel, l'autre en mai 2023 devant le tribunal dans l'affaire de faux), Maître V. informe abruptement M. Martin qu'il se retire du dossier. D'abord par un simple e-mail mi-mars, puis officiellement via la plateforme RPVA début mai, l'avocat fait savoir qu'il ne le représentera plus. Aucune raison valable n'est donnée, si ce n'est une vague mention de surcharge. Le timing est catastrophique : au lieu d'assurer la défense de son client lors des échéances cruciales, Maître V. jette l'éponge à la dernière minute. Il ne prend même pas la peine de s'assurer qu'un confrère reprenne le flambeau, alors que le Code de procédure l'exige (article 419 du CPC : un avocat ne peut cesser de représenter une partie sans être remplacé). M. Martin, déconcerté, tente de trouver un nouvel avocat en urgence – mission quasi impossible en si peu de temps sur des dossiers aussi techniques.
Comme redouté, l'irréparable se produit : à l'audience du 1er juin 2023, concernant l'action en faux, personne n'est là pour défendre M. Martin. Maître V. était encore officiellement son avocat (la procédure de retrait de mandat était en cours), mais il ne s'est pas présenté à l'audience. Le juge, constatant l'absence de comparution du demandeur, n'a d'autre choix que de rejeter la demande. L'adversaire obtient gain de cause par forfait. Cette absence injustifiée constitue une violation flagrante du principe du contradictoire et des droits de la défense. Pour M. Martin, c'est un échec cuisant, non pas sur le fond, mais par abandon pur et simple.
Et ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. En effet, les autres procédures subissent le même sort funeste du fait des manquements de Maître V.
: L'appel principal, qu'il avait formé en 2021 dans l'affaire du titre de propriété, est déclaré caduc en octobre 2022 parce que l'avocat n'avait pas conclu dans le délai imposé (article 908 du CPC). Un vice de procédure technique, mais lourd de conséquences : l'appel est anéanti, et le jugement initial (défavorable à M. Martin) devient définitif. L'espoir de récupérer la parcelle contestée s'évanouit.
L'action en nullité de vente d'un autre terrain est quant à elle jugée irrecevable fin 2023, car Maître V. n'avait pas publié l'assignation au fichier immobilier comme requis par les textes. Une erreur de procédure basique pour un avocat spécialisé en immobilier, équivalente à oublier d'enregistrer un acte : le tribunal a donc rejeté l'affaire sans même examiner les arguments. Comme on l'a vu, la procédure en faux s'est soldée par un rejet faute de comparution, là encore imputable à l'avocat défaillant.
Un avocat incompétent
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