Les articles L. 651-7 et suivants de code de la construction et de l’habitation (CCH) soumettent à autorisation le changement d’usage des locaux « à usage d’habitation ».

L’article L. 631-7 précise que « constituent des locaux à usage d'habitation toutes catégories de logements et leurs annexes, y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de service, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés donnés en location dans les conditions de l'article L.632-1 ou dans le cadre d'un bail mobilité conclu dans les conditions prévues au titre Ier ter de la loi n° 89-462 du 6juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 ».

Avant l’entrée en vigueur de la loi Le Meur, ce même article précisait que « pour l'application de la présente section, un local est réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970 ».

Désormais, le 3ème alinéa dispose que « un local est réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage soit à une date comprise entre le 1er janvier 1970 et le 31 décembre 1976 inclus, soit à n'importe quel moment au cours des trente dernières années précédant la demande d'autorisation préalable au changement d'usage ou la contestation de l'usage dans le cadre des procédures prévues au présent livre, et sauf autorisation ultérieure mentionnée au quatrième alinéa du présent article ».

L’article L. 631-7 du CCH demeure inchangé en ce qu’il dispose que « les locaux construits ou ayant fait l'objet de travaux après le 1er janvier 1970 sont réputés avoir l'usage pour lequel la construction ou les travaux ont été autorisés ». Tout juste la loi Le Meur précise-t-elle que cette présomption tombe (évidemment) si le local en question a fait l’objet, ensuite, d’une autorisation de changement d’usage. Cet ajout a le mérité de la clarté.

Le législateur abandonne toutefois son œuvre clarificatrice en précisant, à l’alinéa 5 de l’article L. 631-7 du CCH, que « une autorisation d'urbanisme ayant pour conséquence de changer la destination de locaux à usage d'habitation ne constitue un mode de preuve valable que si elle est accompagnée d'une autorisation de changement d'usage ».

La lecture combinée de ces dispositions amène donc à considérer, d’une part, qu’un local ayant fait l’objet de travaux autorisés par une autorisation d’urbanisme (permis de construire ou décision de non-opposition à déclaration préalable) est réputé avoir l’usage correspondant à la destination autorisée et, d’autre part, qu’une autorisation d’urbanisme ayant pour conséquence de changer la destination de locaux à usage d’habitation demeure sans incidence sur la preuve de l’usage.

Le législateur précise cependant que l’autorisation d’urbanisme ayant pour conséquence de changer la destination d’un local à usage d’habitation constitue, lorsqu’elle a été accompagnée d’une autorisation de changement d’usage, un mode de preuve de l’usage. Cela ne faisait que peu de doute.

L’hypothèse, fréquente en pratique, dans laquelle un immeuble a fait l’objet de travaux entraînant son changement de destination (de l’habitation vers une autre destination) et autorisés à ce titre par une autorisation d’urbanisme, et situé dans une commune qui n’avait pas adopté de règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage à la date du permis ou de la décision de non-opposition (parce qu’elle n’entrait pas dans le champ d’application territorial de la loi, ou par choix) de sorte qu’aucune demande de changement d’usage n’a été sollicitée, se pose cependant.

Pour ces locaux, la prudence amène à considérer que la preuve éventuelle de leur usage d’habitation, soit entre le 1erjanvier 1970 et le 31 décembre 1976, soit à « n’importe quel moment au cours des trente dernières années » (i.e. avant la délivrance de l’autorisation d’urbanisme qui eut pour conséquence d’en changer la destination) suffise à les qualifier de locaux à usage d’habitation pour l’application de ces dispositions, nonobstant leur destination « autre que l’habitation », y compris ancienne, et ce en contradiction frontale avec l’alinéa 3 de l’article L. 631-7 du CCH.

Les débats parlementaires n’éclairent guère quant à l’intention du législateur sur ce strict point.

Si le législateur a pris le soin d’indiquer que « la charge de la preuve incomb[e] à celui qui veut démontrer un usage illicite », la pratique (notamment notariale) implique que l’usage soit déterminé en amont des transactions et des prises à bail, eu égard à la portée des sanctions encourues en cas de violation de cette législation (nullité de plein droit des accords et conventions). Les praticiens sont donc les premiers confrontés à ces questionnements directement causés par une rédaction pour le moins perfectible de la Loi.