L’état d’urgence sanitaire a été annoncé par le Président de la République, Emmanuel MACRON, pour faire face à l’épidémie du Covid-19, dès le 16 mars 2020, restreignant la liberté de circulation de tous les citoyens français.

Le décret du 23 mars 2020 permet aux Français de se déplacer en téléchargeant et imprimant une « attestation de déplacement dérogatoire ».

Il est alors tout à fait légitime que des parents, séparés ou divorcés, se posent la question de l’impact de la crise sanitaire exceptionnelle sur l’exercice et le respect du droit de garde d’enfants ou de la résidence alternée qui organisait jusque-là leur vie familiale.

Les droits de visite et d’hébergement ou l’alternance du droit de garde des enfants se poursuivent comme à l’accoutumée, même lorsque les parents vivent éloignés l’un de l’autre, dans le respect des gestes barrières.

En revanche, les droits de visite à la journée, au domicile ou avec l’assistance de tiers comme un éducateur sont suspendus. Les espaces de rencontre, utilisés pour permettre une rencontre encadrée et sécurisée des parents avec leurs enfants sont actuellement fermés.

D’ailleurs, Marlene SCHIAPPA, Secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, a confirmé cette exception possible sur le réseau social, Twitter, le 16 mars 2020, comme suit : « Pour répondre à la question qui m’a été posée (légitimement) des centaines de fois : Oui, les parents séparés peuvent aller chercher, déposer ou ramener leurs enfants chez l’autre parent. »

Pour cette exception autorisée, le parent accompagnant son enfant au domicile de l’autre doit obligatoirement être muni de l’attestation de déplacement dérogatoire en ayant préalablement coché la case « déplacements pour motif familial impérieux pour garde d’enfants ».

Ainsi, ce parent doit se munir du jugement ou de la convention de divorce, accompagnée de l’attestation de dépôt par le notaire, qui précise les modalités de garde. Le cas échéant, lorsque les parents ne sont pas passés devant le Juge aux affaires familiales, le parent qui accompagne son enfant chez l’autre doit avoir un échange de mails ou de messages téléphoniques fixant leur accord, qui doivent être nécessairement imprimés en cas de contrôle des forces de l’ordre.

Les parents veillent à ne pas imposer à l’enfant de trajets trop longs ni des déplacements en transports en commun pour éviter une fatigue ou une exposition à des zones sanitaires à risque. Les trajets à pied ou en voiture dans une même agglomération ne posent pas de difficultés et sont privilégiés.

Les parents peuvent modifier la fréquence des transferts ou diviser le temps de la période de confinement pour respecter, un tant soit peu, le droit de garde ou la résidence alternée. Ils doivent conserver une trace de cet aménagement. Ce « temps perdu » pourra être rattrapé par la suite.

L’accent est alors mis sur un droit de communication élargi entre l’enfant et le parent chez qui il ne réside pas : des échanges via WhatsApp, Skype, FaceTime, ou encore des courriers électroniques peuvent être prévus de manière quotidienne ou hebdomadaire pour le suivi des devoirs, la santé et l’épanouissement de l’enfant.

Néanmoins, il est également légitime et compréhensible qu’un parent refuse que son enfant aille chez l’autre parent, susceptible d’être exposé au virus du fait de sa profession et angoisse de voir son enfant malade à l’occasion du changement de lieu de vie dans ce contexte anxiogène.

Certains parents malveillants, notamment lorsque des tensions étaient sous-jacentes, peuvent utiliser l’épidémie comme prétexte supplémentaire pour ne pas respecter le droit de garde ou la résidence alternée.

Les parents doivent dépasser les modalités du jugement de divorce pour s’adapter à la situation inédite. Leur comportement responsable permettra d’éviter, d’une part, de proroger la maladie, et d’autre part, de multiplier les contentieux, car l’activité des tribunaux est réduite de sorte qu’une plainte pour non-représentation d’enfant n’a pas beaucoup de chance de poursuite et a fortiori de permettre la condamnation du parent en faute.

L’essentiel est de préserver l’intérêt supérieur de l’enfant et ne mettre personne en danger.         

Enfin, la contribution habituelle à l’entretien et à l’éducation des enfants qui prend la forme d’une pension alimentaire est maintenue : elle est prioritaire sur toutes les autres dettes et engagements financiers. Elle doit continuer à être versée dans les délais fixés.

Les sanctions en l’absence de versement continueront à être appliquées.

En cas d’impossibilité totale de versement de cette dette alimentaire pour le parent débiteur, il devra informer le parent créancier du non-respect de ses obligations en le lui communiquant par lettre recommandée avec accusé de réception.

 

Maître Yannick LUCE

Avocate au Barreau de Paris