La bigamie est le fait pour une personne déjà mariée (et non divorcée) de se marier à nouveau, que ce soit avec la personne avec qui avait été contractée la première union (Civ. 1ère, 3 février 2004, n° 00-19.838), ou avec une autre personne. On parle de polygamie au-delà de deux unions concomitantes.
La bigamie est prohibée par la loi française. L'article 147 du code civil dispose en effet : "On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier". La dissolution du mariage résulte soit d'un jugement ou d'une convention de divorce, soit du décès de l'un des époux, soit d'une déclaration d'absence.
La bigamie est sanctionnée par la nullité du nouveau mariage. Il s'agit d'une nullité absolue, qui peut en conséquence être invoquée par toute personne intéressée, dans un délai de 30 ans à compter de la célébration du mariage (article 184 du code civil).
Si à la nullité du second mariage est opposée la première, le juge vérifiera d'abord la validité de la première union (article 189 du code civil).
L'apparente simplificité de cette interdiction française de la bigamie se heurte toutefois aux principes du droit international privé.
La décision rendue le 17 novembre 2021 par la première chambre civile de la Cour de cassation (pourvoi n° 20-19.420) est venue expliciter les limites de l'interdiction française de la bigamie dans un contexte de divorce présentant un élément d'extranéité.
En l'espèce, un ressortissant libyen se marie avec deux femmes différentes, successivement, en Lybie. La bigamie est pleinement constituée.
Sa seconde épouse, de nationalité libyenne, dépose une requête en divorce en France.
Le juge aux affaires familiales français estime, puisque la France interdit la bigamie, que le second mariage n'a pas d'existence légale et que la demande en divorce doit, en conséquence, être déclarée irrecevable.
L'épouse se pourvoit en cassation.
L'arrêt d'appel est cassé par la Haute juridiction, et ce à juste titre !
Tout d'abord, le fait de parler d'inexistence du second mariage est juridiquement maladroit.
Par ailleurs et surtout, les juges du fonds ont oublié un principe fondamental en matière de divorce international : celui du conflit de lois et de la détermination de la loi applicable au divorce.
En effet, l'article 202-1 du code civil rappelle que les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont régies par la loi personnelle de chaque époux.
En l'espèce, on avait deux ressortissants libyens mariés en Libye : le juge français aurait donc dû vérifier quelle était la loi personnelle des époux. Si c'est la loi libyenne, cette dernière autorisant la bigamie, cela aurait, par voie de conséquence, permis au second mariage de produire ses effets en France, et donc à l'épouse de demander le divorce, sous réserve pour les juridictions françaises d'être territorialement compétentes pour connaître de cette demande.
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