La F.R.A. vient de publier (pour le moment uniquement en anglais) un rapport sur la « pandémie de coronavirus dans l’Union européenne – Conséquences en matière de Droits fondamentaux ».

La FRA, « Agence des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne », rappelons-le, a été créée par le règlement n° 168/2007 du Conseil du 15 février 2007, JOUE L 53/1. L’Agence est installée en Autriche.

L'Agence a pour objectif de fournir aux institutions, organes, organismes et agences compétents de l’Union, ainsi qu'à ses États membres lorsqu'ils mettent en œuvre le droit communautaire, une assistance et des compétences en matière de droits fondamentaux, afin de les aider à respecter pleinement ces derniers, lorsque, dans leurs domaines de compétence respectifs, ils prennent des mesures ou définissent des actions.

Attention, les « droits fondamentaux » sont ceux adoptés dans le cadre de « la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne »  dans sa version JO C 303 du 14.12.2007, p. 1–16 ; Charte qui, selon son article 53, ne doit être interprétée, dans aucune de ses dispositions, comme limitant ou portant atteinte aux droits de l'homme et libertés fondamentales reconnus, dans leur champ d'application respectif, par le droit de l'Union, le droit international et les conventions internationales auxquelles sont parties l'Union, ou tous les États membres, et notamment la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, ainsi que par les Constitutions des États membres.

Or, le champ d’application de la Charte, pour ce qui est de l’action des États membres, est défini à l’article 51, paragraphe 1, de celle-ci, aux termes duquel les dispositions de la Charte s’adressent aux États membres mais uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union. À cet égard,  la Cour de Justice de l’Union européenne a énonçé que les Droits Fondamentaux garantis dans l’ordre juridique de l’Union ont vocation à être appliqués dans toutes les situations régies par le droit de l’Union, mais pas en dehors de telles situations.  

Attention donc, ce ne sont que les mesures nationales de « mise en œuvre du droit de l’Union » qui relèvent de la Charte . Il est évident qu’il y aura sur ce point, concernant les mesures prises par les Etats et leurs contestations en matière de CORONAVIRUS, COVID 19, de vrais débats juridiques et de nombreuses tentations...et désillusions. Les débats les plus complexes porteront sur les cas où la Commission a pris des dispositions spécifiques concernant le CORONAVIRUS COVID 19 comme en matière … non pas sociale ou de santé, domaines dans lesquels son champ d’action est limité, mais curieusement dans le domaine, par exemple, des aides d’Etat !.....

Par contre, la Charte, et donc les « Droits fondamentaux » concernés dans ce rapport, s’adresse aussi aux Institutions de l’Union, y compris lorsque celles-ci agissent en dehors du cadre juridique de l’Union.

Ceci est un point important concernant la problématique du CORONAVIRUS COVID 19 car certains domaines des actions des Etats échappent au Droit de l’Union européenne et le rapport ne porte donc que sur les aspects liés au Droit de l’Union européenne, bien évidemment. Ceci ne fait que souligner le cadre restreint  des interventions  potentielles mais possibles en la matière.

Ce rapport (pour le moment uniquement en anglais) est un premier point de situation sur les mesures prises par les États, portant sur une ou plusieurs privation(s) de Libertés ou Droits fondamentaux dans le cadre de la pandémie.

Si sur le plan sanitaire la pandémie n’est pas terminée, les imbroglios juridiques sont à venir ! Le principe de proportionnalité, encore écarté par certains, prend toute son importance en la matière….

Ce rapport est donc dans un premier temps, décevant si l’on y cherche une approche juridique, mais il a l’avantage de faire le point de situations avec un classement thématique  (juridiquement utile) en correspondance avec les droits protégés.

Certains n’y retrouveront pas tous les aspects « droits fondamentaux » de la Convention européenne et ce sera normal. D’autres n’y retrouveront pas, mais pourront y penser de textes actuels et spécifiques CORONAVIRUS COVID19  de l’Union européenne mais de textes antérieurs et non spécifiques et ce sera dans certains cas une opportunité ….

Il est par contre très précieux car les informations qu’il contient (de l’important à l’anecdotique) sont fiables en cette période de sur-information d’origines très, trop, diverses et imprécises pour un Juriste.

Mais il prend toute son importance à la lecture de ses conclusions que je vous livre in extenso (bien sûr traduites de l’anglais – traduction personnelle pour nous tous au travers de ce site puisqu’il n’y a pas pour le moment de traduction officielle) : 

« Les mesures décrites dans ce rapport représentent la première vague d'efforts gouvernementaux pour faire face à la crise de santé publique causée par la pandémie de COVID-19. Comme la situation se développe très rapidement, de nouvelles mesures sont susceptibles de traiter à la fois les défis. Ceux-ci continueront d'avoir une incidence significative sur de nombreux droits fondamentaux. Les tribunaux auront un rôle crucial à jouer pour évaluer la nécessité et la proportionnalité des mesures gouvernementales.

En plus des défis médicaux immédiats pour contenir la propagation du virus et sauver des vies, quelques indications des conséquences à plus long terme de l’épidémie sur les droits fondamentaux commencent déjà à émerger. La fermeture effective de nombreuses industries a incité la Banque centrale européenne à anticiper une réduction substantielle de la conjoncture la production, 254 tandis que la dette publique accrue associée aux mesures de soutien économique la mise en œuvre dans l'ensemble de l'UE exercera une pression supplémentaire sur les finances publiques. Cette combinaison place la protection des droits économiques et sociaux, y compris ceux reflétés dans le Objectifs de développement, à haut risque. En outre, la possibilité d’un «état de périodes d’urgence pour contenir la propagation du virus suggère que certaines restrictions les droits civils et politiques peuvent être prolongés.La FRA continuera de collecter des données et des informations évaluer à la fois les implications à court terme et les conséquences à long terme des mesures droits fondamentaux. À l'avenir, la disponibilité et l'utilisation appropriée des données seront déterminantes pour propagation de COVID-19. La Commission européenne a entamé des pourparlers avec les télécommunications opérateurs pour évaluer comment les données des fournisseurs de télécommunications pourraient être transférées autorités scientifiques - tout en respectant la protection des données.255 Tout en confirmant la flexibilité du cadre juridique de la protection des données, le CEPD a rappelé les principes qui doivent garantir un traitement des données efficace et conforme à la législation.256 À la fin de la notification (20 mars 2020), la FRA a noté que plusieurs États membres ont commencé à collecter des opérateurs de télécommunications et de développer des applications de téléphonie mobile dédiées pour suivre, collecter et évaluer les données des téléphones portables des individus ou utiliser les technologies de géolocalisation.À ce stade, la plupart des initiatives sont en cours d'élaboration et les discussions se poursuivent le cadre juridique approprié. Il est trop tôt pour avoir une image complète des impact sur les droits de ces mesures.

Cependant, il est déjà clair que des réponses conformes aux droits fondamentaux à l’épidémie et ses conséquences pour différents domaines de la vie seront plus efficaces dans le long terme. L'ancrage des actions dans les droits fondamentaux contribuera à garantir qu'elles obtiennent le soutien public et promeuvent la cohésion sociale. S'assurer que cela implique un rôle pour toute la gamme des acteurs des droits fondamentaux, des gouvernements aux mécanismes de suivi des instances internationales, régionales et nationales, organismes nationaux des droits de l'homme et société civile. Dans les respects de ce domaine et dans d'autres, des leçons peuvent être tirées des crises précédentes 257, y compris les conséquences de la Crise économique de 2008 ou épidémie de VIH / SIDA.258

La FRA continuera à collecter des preuves pour aider les décideurs politiques à concevoir des réponses à la pandémie actuelle conformes  aux droits. L'agence reconnaît qu'à l'heure actuelle le principal objectif de tous les États membres est d'assurer la vie des personnes vivant dans l'UE. Pour son prochain rapport en réponse à l'épidémie de COVID-19, la FRA sélectionnera un certain nombre de domaines clés sur lesquels il faut se concentrer qui soulèvent des défis particuliers en matière de droits fondamentaux. »

Un rapport à lire et à bien méditer….