Le droit de préemption permet au fermier de se substituer à l’acquéreur du fonds loué, lorsque le fonds est mis en vente par le propriétaire.

Pour bénéficier de ce droit de préemption, le locataire doit remplir plusieurs conditions :

1. Il doit justifier d’un titre régulier d’occupation, c’est-à-dire d’un bail rural opposable au propriétaire.

2. Il doit avoir exercé pendant 3 ans au moins la profession d’exploitant agricole, que ce soit sur les terres objet du bail ou sur d'autres parcelles.

Cette limitation ne s’applique pas aux baux conclus entre copartageants en application de l’article 832-3 du Code Civil (attribution de l’exploitation agricole en jouissance) – Art. L 412-14 du Code Rural et de la Pêche Maritime.

3. Il doit avoir exploité par lui-même (ou par sa famille) le fonds mis en vente (sans condition de durée minimale).

4. Il ne doit pas posséder déjà des terres représentant une superficie supérieure à 3 fois la surface définie par le Schéma Directeur Régional des Exploitations Agricoles (cette limitation ne s’applique pas aux baux conclus entre copartageants en application de l’article 832-3 du Code Civil (attribution de l’exploitation agricole en jouissance) – Art. L 412-14 du Code Rural et de la Pêche Maritime).

Certaines mutations sont soumises au droit de préemption du preneur en place, d'autres non.

Le notaire chargé d’instrumenter doit, alors, faire connaître au preneur (bénéficiaire du droit de préemption) le prix, les charges, les conditions et modalités de la vente projetée.

Le notaire peut s’abstenir de procéder à la notification si le preneur ne remplit pas une des conditions prévues par la loi. Mais cette abstention (lourde de conséquences) exige un examen minutieux de la situation de façon à s'assurer que le preneur est bien exclu du bénéfice du droit de préemption.

Une fois qu'il a reçu la notification, le preneur doit,s'il veut exercer son droit de préemption, notifier personnellement au propriétaire et dans le délai de deux mois son intention d’acquérir le bien loué mis en vente. A défaut, il est réputé renoncer à exercer son droit de préemption.

SANCTIONS EN CAS DE VIOLATION DU DROIT DE PRÉEMPTION

La vente faite par le propriétaire-bailleur à un tiers au mépris des droits du preneur est sanctionnée par la nullité. En outre, la violation du droit de préemption entraîne, soit la substitution du preneur au tiers acquéreur, soit l’allocation de dommages-intérêts.

Deux régimes de sanctions coexistent :

a) Action en nullité de la vente et/ou en substitution du preneur à l’acquéreur (article L 412-10 du Code Rural et de la Pêche Maritime).

Cette sanction s’applique dans trois cas :

  • lorsque le propriétaire a vendu le fonds à un tiers avant l’expiration des délais reconnus au fermier pour exercer son droit de préemption (délai de 2 mois),
  • lorsque le propriétaire a vendu le fonds à un tiers à un prix ou à desconditions de paiement différents de ceux demandés au preneur (dans la notification qui lui a été adressée),
  • lorsque le propriétaire exige du preneur des conditions tendant à l’empêcher d’acquérir (par exemple : offre globale suivie d’une vente divise).

L’article L. 412-10 ne peut être appliqué en dehors de ces trois situations.

En principe, le juge « doit » non seulement «annuler» la vente, mais également substituer le preneur au tiers acquéreur (le preneur devant alors payer la prix de vente).

Mais, la Cour de cassation semble s'écarter de la lettre du texte et admettre une "simple" nullité de la vente, lorsque le preneur limite sa demande à cette mesure.

L’action en nullité doit être exercée dans un délai de 6 mois à compter du jour où le preneur a connu la date de la vente, à peine de forclusion.

Ce cas de figure ne se rencontre quasiment plus, car on voit mal un notaire rédiger un acte de vente dont le contenu serait différent de celui de la notification ou ne pas respecter le délai de 2 mois.

b) Action en nullité de la vente et en dommages-intérêts (article L 412-12 du Code Rural et de la Pêche Maritime).

Cette sanction s’applique dans tous les autres cas, notamment le défaut de notification au preneur ou une notification incomplète (qui ne mentionnerait pas le prix ou les conditions de la vente, par exemple).

La faculté de substitution est alors exclue, ce qui est logique dès lors que, dans cette situation, les conditions de la vente n'ont pas été, en général, notifiées au preneur.

L’action doit être engagée, là encore, dans le délai de six mois à compter de la connaissance par le locataire de la date de la vente frauduleuse et non de la seule connaissance de la vente elle-même.

C'est la raison pour laquelle la décision de ne pas notifier la vente au preneur, en considérant qu'il ne remplit pas toutes les conditions exigées, doit être mûrement réfléchie, dès lors que, en cas d'erreur, la sanction sera lourde de conséquences.

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Me Eric GRANDCHAMP de CUEILLE

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