Les nouvelles solutions d'IA générative induisent une résurgence des personnalités défuntes et de leur image sur les médias et réseaux sociaux.

Ces utilisations soulèvent la question légitime de l'existence d'un droit à l'image post-mortem.

I/ La transmission révolue du droit à l'image aux héritiers

La transmission du droit à l'image aux héritiers a été l'objet de nombreuses controverses et décisions judiciaires contradictoires.

Dans les années 90, la jurisprudence effectuait la distinction entre le caractère moral et patrimonial du droit à l'image pour reconnaître aux héritiers certains droits sur l'image du défunt.

Selon certaines décisions de justice, la valeur patrimoniale de ce droit avait bien vocation à se transmettre aux héritiers qui étaient fondés, à autoriser ou non la divulgation de l'image du défunt à des fins commerciales.

Cette jurisprudence était notamment motivée par le fait que de nombreuses célébrités du spectacle, du sport, des arts et des affaires, tirant parti de l'évolution des mœurs et de pratiques économiques générées par une civilisation de plus en plus tournée vers l'image, bénéficiaient de rémunérations allant croissant avec leur notoriété.

II/ L'extinction du droit à l'image au décès du titulaire des droits

La Cour de cassation, dans une affaire médiatique concernant le contentieux entre l'éditeur du livre « Le grand secret » et les proches de François Mitterrand, est venue clore le débat en estimant que le droit d'agir sur le fondement du respect de la vie privée s'éteint au décès de la personne concernée, seule titulaire de ce droit.

Ainsi et selon le droit positif, le droit à la vie privée et plus spécialement le droit à l'image en tant que droit extrapatrimonial n'appartient qu'aux vivants.

Il est donc incessible, insaisissable et intransmissible entre vifs et à cause de mort.

III/ Les exceptions et évolutions envisageables

Néanmoins, les tribunaux ont tempéré cette position de principe en estimant que l'action demeurait envisageable sur le fondement du droit à l'image en cas de préjudice moral subi par les ayants-droits.

En effet, l'action demeure possible si jamais l'exploitation de l'image du défunt porte atteinte à sa mémoire ou à sa dignité.

Dans une telle hypothèse, il convient néanmoins de caractériser une exhibition ou une indécence particulière, qui sera susceptible de justifier une condamnation.
 

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Quoi qu'il en soit, ces solutions jurisprudentielles ne sont pas figées dans le marbre et sont peut-être disposées à évoluer à l'aune du développement des nouvelles technologies.

De nombreuses personnes utilisent désormais l'IA pour générer des deepfakes superposant l'image et la voix des personnes, notamment celles qui sont décédées. Ces multiples atteintes pourraient présager d'une restructuration du droit à l'image à l'avenir afin de mieux répondre à ces nouveaux usages.

Par ailleurs, si le montage est réalisé à l'insu de la personne concernée et qu'il n'apparaît pas à l'évidence qu'il s'agit d'un montage, restera également la possibilité de se fonder sur les dispositions du Code pénal afin de sanctionner l'auteur et/ou le diffuseur du contenu litigieux.

Etienne Bucher
https://www.erisavocat.com/